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Sollers Céline

D 18 octobre 2009     A par Viktor Kirtov - C 4 messages Version imprimable de cet article Version imprimable    ................... PARTAGER . facebook


...« Tout ce qui ne chante pas, pour moi, c’est de la merde. Qui ne danse pas fait l’aveu tout bas de quelque disgrâce ». L’auteur de Voyage au bout de la nuit, publié en 1932 et vainqueur du Prix Renaudot, a exposé l’absurdité du monde et sa folie dans cet ouvrage, et prôné l’unique mode de résistance envisageable selon lui : la lâcheté.

Dans un avant-propos inédit, Sollers se situe par rapport à Céline. Son premier article paru dans L’Herne, date de 1963. Depuis, son admiration pour Louis-Ferdinand Céline n’a pas varié ; une telle constance est rare dans les milieux littéraires Tel Quel et L’Infini.

Dans ces articles, critiques, préfaces, Sollers souligne l’aspect comique des romans de Louis-Ferdinand Céline et adopte une position originale : pour Sollers, le meilleur Céline est celui de la trilogie allemande, c’est-à-dire la part la moins lue de son oeuvre.

C’est ainsi qu’est présenté le Céline de Sollers sur le site de son éditeur, les Editions Ecriture, Groupe l’Archipel, Collection « Céline & Cie », dirigée par Émile Brami.

À noter : aussi aux Editions Ecriture, la parution des Lettres à Joseph Garcin (1929-1938), réunies et présentées par Pierre Lainé.
www.editionsecriture.com

20/10/09 ajout vidéo, section "Lettres à Jérome Garcin" et section D’un portrait, l’autre

4e couverture

« Je me rappelle très bien le choc que fut la découverte de D’un château l’autre ou de Nord, en 1957 et 1960. Dès la publication d’extraits dans la NRF, j’ai senti qu’il se passait quelque chose d’essentiel. Depuis, ma fréquentation de l’oeuvre de Céline n’a pas cessé. Malgré sa réputation d’infréquentable, alors que son biologisme - ainsi qu’il faudrait définir son racisme - me paraissait en total désaccord avec son génie d’écrivain, j’ai persisté à l’admirer avec constance.

Je sais que cela prendra encore un siècle ou deux, mais il faut débarrasser Céline de ses oripeaux de fou vociférant et, cela va de soi, de son antisémitisme. L’image qui prédominera alors sera celle d’un Céline enfantin. Car c’est sans doute ainsi qu’il faut le voir : un enfant innocent perdu dans un monde coupable. »
Ph. S.

De son premier article consacré au « rire de Céline » dans les Cahiers de l’Herne (1963) aux Voyageurs du Temps (2009) dont il est un des passagers, Philippe Sollers n’a cessé d’affirmer sa fidélité au « bouc émissaire ». Ce volume regroupe l’ensemble des textes qu’il a consacrés à l’humour de Céline, à son « rendu émotif interne », à sa lutte avec le démon et à la « trilogie allemande », part la plus révolutionnaire de son oeuvre.

*

Avant-propos

Mon premier texte sur Céline, qu’il faut relire aujourd’hui comme le texte d’un jeune écrivain, paraît à la demande de Dominique de Roux dans la troisième livraison des Cahiers de L’Herne, Nous sommes en 1963. Ma lecture de Céline aura donc été permanente, avec des hauts et des bas, en fonction de ce vers quoi m’entraînaient ma curiosité et mes passions du moment.
À part Voyage au bout de la nuit et Mort à crédit, je me rappelle très bien le choc que fut la découverte de D’un château l’autre en 1957, ou de Nord, en 1960, avant même de lire ces ouvrages dans leur intégralité. Dès la publication d’extraits dans la NRF, j’ai senti qu’il se passait quelque chose d’essentiel. Depuis, ma fréquentation de l’oeuvre de Céline n’a pas cessé et je me suis exprimé à plusieurs reprises, par exemple dans la préface des Lettres à la NRF, sur ce qu’elle m’apportait.

Plus tard, même après mes engagements extrémistes, et malgré la réputation d’homme de droite infréquentable de Céline, alors que son biologisme - c’est ainsi qu’il faudrait définir son racisme - me paraissait en total désaccord avec son génie d’écrivain, j’ai persisté à l’admirer avec constance. On peut dire aussi, et c’est à peine une plaisanterie, que pour le « maoïste » que j’étais il y avait beaucoup de Chine dans Rigodon !
À propos de Céline, on en revient toujours, par manque d’imagination, à deux expressions tirées d’un article des Izveztia et reprises en 1947 par Combat (qui a d’ailleurs publié la réponse de Céline). Il s’agit de « nullité littéraire » et de « criminel fasciste ». La première définition devient de plus en plus difficile à soutenir. Ce qui m’intéresse au plus haut point, c’est la façon dont Céline a voulu reprendre, réinventer, « voltairiser » le français, comme il dit. Et que voit-on arriver sous sa plume ? Un ensemble d’écrivains classiques qui forment le socle, le fondement de sa langue : la marquise de Sévigné, Louise Labé, La Fontaine, Saint-Simon, le cardinal de Retz, beaucoup d’autres... Je m’en suis souvenu en commençant ce travail sur Paradis, explicité dans Femmes, où j’ai beaucoup pensé à Céline - et je crois que cela s’entend. Il me semblera devoir aller vers Céline en le refondant, en le décalant ; c’est là que son influence, naturellement reformulée, se fait, je crois, sentir dans mes livres. Pour des raisons de forme qui sont en réalité des raisons de fond et surtout d’oreille, cet écrivain est donc essentiel pour moi.
Avant d’évoquer les écrits de Céline, il me paraît nécessaire d’insister sur deux points que l’on n’aborde que rarement à son propos. En premier lieu, son génie du titre, de la formule que l’on peut qualifier d’absolue : Voyage au bout de la nuit, Mort à crédit, Féerie pour une autre fois, D’un château l’autre, même Bagatelles pour un massacre, ou le terrible L’École des cadavres, cela dit tout avec une extraordinaire économie de moyens.

Et puis, son sens du comique : Céline ne parle pas beaucoup de Molière, mais Entretiens avec le Professeur Y est un dialogue digne du meilleur Molière. De façon générale, qui ne s’amuse pas en lisant Céline, malgré la noirceur ou l’outrance du propos, n’y comprend rien. De celui-là je dirais, et ce n’est pas une plaisanterie, qu’il est sourd. Gide croyait que Bagatelles pour un massacre était une blague. C’est un livre que l’on peut juger abominable, mais auquel on rit malgré soi. Il est nécessaire de comprendre ce mélange intime, indissociable, de lyrisme et de comique, car il fait le caractère unique de Céline.
J’ai relevé dans une lettre à Paraz cette formule : « Je suis lyrique, le crime des crimes, surtout en France... Et lyrique comique. » Ce comique est toujours chez Céline associé à la légèreté. Quand il prétend avoir pris son style au music-hall, au cabaret, c’est tout à fait juste, c’est dans la chanson (qui revient sans cesse dans Féerie), dans ce que l’on appelait le burlesque qu’il est allé puiser, dans ce qui est fugace, intemporel, qui par définition ne pèse rien. C’est ainsi que nous arrivons naturellement à la danse et au ballet, dont le but est d’échapper à la pesanteur par la grâce, mais aussi par une discipline aussi rigoureuse qu’invisible. N’est-ce pas là le résumé du travail de Céline et de son style ? Lorsqu’on lui demandera, à la fin de sa vie, ce qu’il pense de ses contemporains, il les exécutera en une phrase : « Ils sont lourds. »

Si l’on veut établir, vite, un catalogue passionné de Céline, il faut commencer par dire que Voyage au bout de la nuit est un chef-d’oeuvre. Que ce livre exceptionnel ne soit pas pris immédiatement par la NRF en 1932, qu’il manque le Goncourt au profit d’un livre médiocre, me semble poser un problème très important. Tout comme il faut s’interroger sur le terrible accueil critique que reçoit, plus tard, Mort à crédit. Autre texte que j’ai tenu à rééditer avec Henri Godard dans L’Infini  : Mea Culpa, pamphlet publié à son retour d’URSS, à mon avis essentiel pour comprendre la suite de la trajectoire de Céline. Et que dire des Entretiens avec le Professeur Y, livre magique, d’une force comique inouïe, à s’écrouler littéralement de rire, mais aussi prodigieux art poétique ? J’ajouterai la découverte éblouie de Féerie pour une autre fois et surtout de Maudits Soupirs pour une autre fois, qui est à mon avis un texte d’une force hors du commun.

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Céline à Meudon

Par ailleurs, je suis un des rares à soutenir que ce que l’on désigne sous le titre générique de « Trilogie allemande », à savoir D’un château l’autre (dont le début, avec la Publique, toute la dimension des enfers, la barque de Caron, relève du grand style homérique), Nord (où Céline est peut-être au sommet de son écriture) et Rigodon, même s’ils sont peu lus, sont des livres peut-être supérieurs à Voyage ou Mort à crédit. La vérité sur la Seconde Guerre mondiale me semble être là et nulle part ailleurs. Pendant la rédaction de D’un château l’autre, Céline écrit, toujours à Paraz : « Il nous était réservé de connaître enfin le sérieux des choses, Lucifer et ses vraies tenailles. » Si vous voyez les tenailles du diable, vous voyez aussi Staline et Hitler.
Je voudrais d’ailleurs insister sur ce thème diabolique, parfois présent chez lui de façon extrêmement étrange. Ainsi, cette formule curieuse qu’il emploie à plusieurs reprises : « Vous savez, moi et le Prince des Ténèbres, on s’évite. » Il y revient souvent : « Le monde à l’envers ! Le mensonge roi ! L’univers du diable ! » On n’attendrait pas Céline sur cette question. Puisque Dieu n’existe pas chez lui, il ne devrait pas y avoir de diable non plus ; or il est là, toujours. De cela au moins il est sûr et il tient à le dire : « Il n’y a que Satan qui puisse être aussi têtu, enragé dans la malfaisance, la cruauté et la crapulerie. » Lucifer est partout en filigrane. Et quand lui, Céline, affirme qu’il n’écrit pas sans un grand dégoût, comme un médium fait tourner les tables, il nous fait comprendre que l’écriture est une épreuve, une véritable expérience diabolique, à l’écoute des ténèbres : « Le diable sait ce qu’il fait, il est subtil, il s’attaque à la musique des peuples qu’il veut supprimer » Il ne peut s’agir d’un jeu, comme cela a pu l’être pour Victor Hugo. Céline engage contre le diable une lutte à mort pour conserver la musique de sa langue.

Ce qui nous conduit à ouvrir une parenthèse. Ces ballets, auxquels Céline tenait tant, sont d’une faiblesse évidente, tant par la mièvrerie de leur propos que par l’écriture. Ils sont aussi, dans Bagatelles pour un massacre, le prétexte avancé de sa fureur antisémite : il s’attaque aux Juifs parce qu’ils lui auraient refusé un ballet. Notons aussi que ses ballets, pour reprendre le titre commun qu’il leur donnera, en 1959, en les regroupant au sein d’un même volume, sont sans musique, sans personne, sans rien et que, ultime pirouette, le plus musical des écrivains français semble fâché avec la musique : il n’en veut pas là où elle paraîtrait pourtant le plus nécessaire.
Car la véritable musique, cette « petite musique » qu’il ne cesse de revendiquer, est ailleurs. Elle est de l’ordre de l’expérimentation fondamentale et de la création. Quand je lis : « Les mots ne sont rien s’ils ne sont pas notes d’une musique du tronc », puis quand Céline ajoute, pour définir sa fonction créatrice au sens le plus organique : « Je suis le Père Sperme », je ne peux que m’interroger : en quoi le sperme aurait-il trait à la musique, au langage ? Plus qu’à Céline, j’ai l’impression d’avoir affaire à Antonin Artaud. Voilà deux grands contemporains liés par une véritable parenté dans l’expérience démoniaque et sexuelle. Aller dans ces parages, le sperme, la « musique du tronc », c’est vouloir une réinvention physiologique - et revendiquée comme telle - de l’écriture. Artaud ne parlait-il pas de la « maladresse sexuelle de Dieu » ? Je pense alors à cette déclaration incroyable de Claudel disant qu’il avait subi 1’« influence séminale » de Rimbaud et qui fit graver sur sa tombe : « Ici reposent les restes et la semence de Paul Claudel. » Toute véritable écriture serait-elle donc une fécondation qui, biologiquement, donnerait naissance à cette fameuse « musique des peuples » ? Souvenons nous, dans Rigodon : « Moi qui suis raciste biologique... »

Il y a chez Céline une physiologie de l’écriture et une écriture physiologique qui tiennent de la grande poésie. Je suis allé sur ses pas, au Danemark. Je regardais la mer, non loin d’Elseneur. Hamlet vous fait signe, des fantômes peuvent éventuellement apparaître, hou ! hou !... C’est de la grande dramaturgie, avec ce qu’il faut de comique. Terrible mais drôle ou, pour reprendre les mots de Mallarmé : « Un tourbillon d’hilarité et d’horreur. » Nous sommes dans la chanson de geste, au sens le plus fort du terme, la geste, la revendication d’écrire dans une langue vivante, alors que tout s’écrit alentour dans une langue morte. Ou, pire, une langue étrangère à elle-même, une traduction, un idiome de seconde main. Même des textes écrits en français par des écrivains français le sont dans une langue déjà presque morte. C’est pourquoi Céline affirme : « Ce que je fais n’a rien à voir avec la prose-prose des arriérés naturalistes américains ou français. »

Mais là n’est pas le plus grave. Le tragique, pour Céline, est que cette langue en voie de disparition traduit, dans le renoncement et la résignation, la volonté suicidaire d’un peuple. Que veut-il dire lorsqu’il affirme : « Sévigné, Voltaire, La Bruyère, Saint-Simon, Chateaubriand, c’est un goût qui reste et une couleur absolue » ? Que plus rien n’a désormais de goût ni de couleur ? Que toutes les langues, ternes et insipides, finissent par se valoir ? Si bien que, pour obtenir le « rendu émotif intime », seule façon d’écrire encore en français selon Céline, mais pour combien de temps, outre le labeur accablant, il faut traiter l’Histoire en direct, se refuser aux romans historiques insignifiants, aux romans naturalistes arriérés dont les Français se bourrent.
« Quand on me lit tout bas, il faut avoir l’impression qu’on vous lit à vous le texte tout haut en pleine tête, dans votre propre tête, c’est un truc. » Voilà comment fonctionne l’écriture de Céline. Et cela, au-delà de l’apparente et fausse simplicité, qui en est capable ? Qui ose comme lui « toucher au nerf » ? Très peu d’artistes. « Lus tout haut, mes textes sont franchement hideux, grotesques d’emphase, vive Bossuet alors ! C’est le rendu émotif interne auquel je m’efforce... Un tout autre travail... » Même lorsqu’il se traite de « vieux con rémouleur de sa sérénade », qui peut encore comprendre cela ?

Il faut foncer tout droit dans l’intimité des choses, voilà ce que répète Céline dans Entretiens avec le Professeur Y, comiquement, mais avec le plus grand sérieux. C’est dit comme du La Fontaine, d’une façon qu’un enfant peut comprendre, mais c’est d’une grande profondeur. Le métro, les rails, les traverses, le bâton trempé dans l’eau qu’il faut casser pour qu’il paraisse droit, cela est très drôle, très amusant, mais il faut le prendre très au sérieux.
Si nous ne devions retenir qu’une chose de Céline, ce serait cela : le « rendu émotif interne ». Je sais que cela prendra encore un siècle ou deux, mais il faut le débarrasser de ses oripeaux, de ses déguisements de fou vociférant, et, cela va de soi, de son antisémitisme. L’image qui prédominera alors sera celle d’un Céline enfantin, plus exactement dans l’innocence de l’enfant qui perdure. Céline est à tout jamais un innocent dans un monde coupable. La formule vient de François Truffaut, interrogeant Hitchcock : « N’avez-vous pas l’impression qu’à cause de votre éducation catholique le péché est toujours présent dans vos films ? » Et Hitchcock répond : « Pourquoi me dites-vous cela ? Je décris toujours un innocent dans un monde coupable. » C’est sans doute ainsi qu’il faut voir Céline, comme il se décrit finalement dans tous ses livres : un enfant innocent perdu dans un monde coupable.

Ph. Sollers

Le livre sur amazon

Sollers évoque Céline


Crédit : Editions de l"Archipel

*

Table

Avant-propos

Le rire de Céline

Stratégie de Céline

Céline au clavier

Imprésentable pour l’éternité

Naissance de Céline

Céline bouc émissaire

Les vies de Céline

« L’opéra est le naturel »

Les Danois ont-ils sauvé Céline

Céline en enfer

Les « rentiers de l’horreur » [1]

« Tout doit être brutal » [2]

Relire Céline

Nota : liens sur les articles déjà dans la base pileface.

*

AUTRES LIENS
Dossier Céline
Entretiens avec le Professeur Y
Lettres à la NRF Préface de Philippe Sollers


Lettres à Joseph Garcin

Parution concomitante avec Céline de Sollers
Lettres à Joseph Garcin
Céline
Editeur : Écriture (14 octobre 2009)
130 pages
ISBN : 9782909240954

Céline rencontre Joseph Garcin avant la rédaction de Voyage au bout de la nuit (1932). Celui-ci lui fournit des informations sur la pègre qu’il fréquente et alimente ainsi la mythomanie de Céline, que le personnage d’affranchi fascine.
De septembre 1929 à octobre 1938, Céline a adressé à Joseph Garcin vingt-huit lettres qui constituent un apport précieux sur la genèse de l’oeuvre célinienne et de sa création romanesque.
Cette correspondance permet d’approcher l’alchimie du travail d’écriture et la genèse tant de l’écrivain lui-même que de son oeuvre majeure. Ce livre constitue une édition augmentée de lettres inédites de l’ouvrage éponyme paru en 1987 aux éditions Librairie Monnier.

Quatrième de couverture

" J’ai un projet - tout autre chose, pas de politique ni de frauduleux commerce, il faudra que je vous en fasse part, et vous pourrez m’aider. " Ainsi Louis Destouches, médecin hygiéniste, s’adresse-t-il, le ler septembre 1929, à Joseph Garcin (1894-1962), ancien combattant devenu proxénète. Un personnage comme il les aime : viveur désabusé, aventurier sans scrupule, mais cultivé et fidèle en amitié. Autre qualité de Garcin, et non des moindres : il a vécu la fin de la guerre à Londres, où la pègre n’a plus de secrets pour lui. Le romancier voit aussitôt le profit qu’il pourra tirer de cette science des bas-fonds, lui qui les connaît mal... C’est en quelque sorte l’acte de naissance de Voyage au bout de la nuit (1932), gestation dont Céline, de lettre en lettre, prend Garcin à témoin. Ces vingt-huit lettres, présentées et commentées par Pierre Lainé, constituent un apport essentiel à la connaissance de l’homme et de l’écrivain. Céline y explore quelques-uns des thèmes qui hanteront son oeuvre : le cauchemar de la guerre, la fatigue de vivre, l’appétit de femmes, mais aussi la fatalité du mensonge et la montée des fascismes - de tous les fascismes. Autant d’obsessions dont Pierre Lainé évoque les prolongements jusqu’à Rigodon (1969), où plane une dernière fois l’ombre posthume de Garcin...

Sur l’auteur

Pierre Lainé, docteur ès Lettres, a soutenu sa thèse d’Etat sur Céline et enseigné son oeuvre dans les universités françaises aussi bien qu’à l’étranger, notamment au Maroc, au Bénin et au Rwanda. C’est à lui que l’on doit la découverte, à la fin des années 1970, de la correspondance de Céline avec Joseph Garcin.

D’un portrait l’autre

(message de Dominique Brouttelande)
« Je trouve réussi le fameux portrait de Céline repris en couverture du recueil de textes de Ph S. Je le trouve surtout très proche de l’autoportrait de Delacroix »
Ci-dessous, le portrait de Céline dont s’est inspiré le dessinateur Corréa pour son dessin.
Cliquez le pour afficher l’autoportait de Delacroix.



[1Les Voyageurs du Temps, Gallimard, 2009.

[2Les Voyageurs du Temps, Gallimard, 2009.

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4 Messages

  • Viktor Kirtov | 9 juin 2019 - 00:01 1

    Déjà Darwin nous rappelait que nous sommes des animaux évolués avec sa théorie de l’évolution et, Patrick Besson nous le dit, à sa façon, dans sa chronique du Point du 6 juin :

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    Le grand gagnant de l’élection européenne de 2019 n’est ni Marine Le Pen (RN) ni Yannick Jadot (EE-LV), qui voguent chacun à leur manière sur les clichés idéologiques contemporains - sauvegarde des frontières et protection de la planète-, mais Hélène Thouy, tête de liste du Parti animaliste. La défense des animaux est devenu un thème politique avec ses candidats.

    […]

    Qui est cette Hélène Thouy qui, avec ses 490 ooo voix, a nargué les trotskistes de Nathalie Arthaud, titillé les communistes de Jan Brossat, moqué les royalistes de Robert de Prévoisin, ridiculisé les gilets jaunes de Francis Lalanne, enfoncé les nationalistes de Florian Philippot ? Ne regardant la télévision qu’au Corcoran’s du boulevard de Clichy les soirs où il y a un bon match de football, je n’avais jamais vu le visage d’Hélène, c’est celui d’une brune intense aux grands yeux obsédés de justice. Normal : une avocate. Une figure carrée de croisée, prête à prendre toutes les places fortes médiatiques jusqu’à la victoire finale de nos seuls amis intelligents : les bêtes. Puisque l’histoire ancienne et récente nous montre que nous ne pouvons rien faire pour les humains, au moins sauvons les animaux.

    […]

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    LES ANIMAUX ET LES ECRIVAINS

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    Louis-Ferdinand Céline, en 1952, dédie son chef d’oeuvre- « Féerie pour une autre fois » (Gallimard) - « aux animaux », ainsi qu’ « aux malades, aux prisonniers ». Il soigne son retour dans la librairie comme, un siècle plus tôt, Fiodor Dostoïesvski, après le bagne, fignola le sien sur la scène littéraire russe avec son chef-d’œuvre « Crime et châtiment » (1866). Quand les auteurs ont eu peur, ils écrivent mieux. C’est l’un des rares avantages de la dictature. Les animaux sont, en effet, nos prisonniers. Les chats sont enchaînés au foyer et les chiens ne sortent qu’en laisse. Quand les uns et les autres sont trop malades, on les tue. Vincent Lambert, s’il était un chat ou un chien, n’aurait aucune chance chez le véto.

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    Louis-Ferdinand Céline et son chien
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    Le Parti animaliste entend réparer les innombrables injustices et mauvais traitements que la plupart des animaux subissent lors de leur existence moins longue que la nôtre, ce qui n’est pas une consolation. Il y en a même qui sont mangés à la fin. »

    PATRICK BESSON

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    LE VOTE ANIMALISTE, VESTIGE ANTIQUE

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    Christiphe ONO-DIT-BIOT souligne aussi le « vote animaliste » lors des élections européennes :

    Ce fut l’une des surprises des européennes. Créé pour protéger les animaux, « mettre fin aux pratiques les plus génératrices de souffrance » ou végétaliser notre alimentation, le Parti animaliste a engrangé plus de voix que la liste pro-Frexit de François Asselineau et celle des Patriotes de Florian Philippot réunies. Toquade contemporaine ? Lubie postmoderne ? Bien au contraire, vestige antique ! Dès le IIe siècle de notre ère, Ellen, philosophe et historien romain d’expression grecque, relativisait la hiérarchie entre les hommes et les animaux : « Que les bêtes brutes, elles aussi, possèdent, par nature un certain sens moral et qu’elles partagent avec l’homme bon nombre de privilèges qui ont été impartis aux humains, voilà bien, pour le coup, quelque chose de grandiose », s’enthousiasmait-il en effet dans son traité « La personnalité des animaux », retraduit par Arnaud Zucker (Les Belles Lettres, 304 p., 26,50 €). Dans cette inestimable somme sur le savoir zoologique antique, l’auteur se refuse à exclure les animaux de la communauté du logos - la raison - et les considère comme des êtres moraux et doués de vertus. La prochaine étape pour les animalistes ?

    CHRISTOPHE ONO-DIT-BIOT


  • V. K. | 4 février 2013 - 12:15 2

    Des nouvelles d’Argentine, de Hugo Savino :

    "...deux articles sur le Céline de Philippe Sollers que j’ai traduit pour la maison d’édition Paradiso :

    Dans le supplément des livres ADN du journal La Nación
    et
    dans Ñ le supplément des livres du journal Clarín :

    Cordialement, et à bientôt,"

    ou Comment Céline et Sollers sont reçus en Argentine :


    Viernes 25 de enero de 2013

    Literatura extranjera

    Maldito imperdonable

    En un conjunto de ensayos breves, Philippe Sollers aborda desde distintos ángulos la obra de Céline, al que define como "el chivo expiatorio de la monstruosidad de una época"

    Siempre habrá un enigma, un escándalo Céline. Ya en 1939 el fatuo narrador galo de "Pierre Menard, autor del Quijote" aludía a su figura : "Atribuir a Louis-Ferdinand Céline o James Joyce La imitación de Cristo ¿no es una suficiente renovación de esos tenues avisos espirituales ?". La idea era asombrosa : imaginar que el autor deEl viaje al fin de la nochey de dos virulentos -y entonces fresquísimos- panfletos antisemitas había escrito línea por línea el libro de Thomas de Kempis podía dar una duplicación más sugestiva, seguramente más pavorosa, que la de Cervantes.

    En Francia, la figura del médico Louis-Ferdinand Céline (1894-1961) todavía posee las propiedades de un ácido corrosivo. La brecha cronológica de los textos que Philippe Sollers reúne en este volumen prueba que no se escribía sobre él impunemente : el primero, "La risa de Céline", es de 1963, y forma parte de uno de los audacesCahiers de L’Hernededicados al escritor apenas murió. "Estrategia de Céline", el segundo, se publicó enLe Magazine littéraireen 1991. Sólo a partir de esa fecha Sollers, que reconoció tempranamente la difícil radicalidad del escritor, se vuelve locuaz.

    "Todo el mundo se fabricó un Céline, genio o espantapájaros, vaguedades, verifiquen, nadie leyó nada o apenas", anota, mimando de manera deliberada el estilo (en su caso más inquieto que vociferante) del autor al que considera "un desafío capital para la comprensión del siglo XX" y, también, "chivo expiatorio de la monstruosidad de una época". El dilema en relación con Céline, ese "impresentable para la eternidad", sugiere Sollers, es que su obsesión antisemita (que evitó en sus novelas, vale acotar) no alcanza para ocultar el inmenso escritor detrás de su obra.

    Sollers no esquiva lo anecdótico, pero orbita alrededor de la comicidad aterradora de la obra de Céline, de la "restitución emotiva" que conjura con su prosa, de la música jadeante de ese discurso vidente lanzado en tromba. Ve en Céline un maldito por definición (porque esa palabra, "maldito", puede rellenarse con veinte adjetivos distintos) y sugiere evitar un lugar común : su supuesta visceralidad. Lo que hay en Céline es una pasión imperdonable ("La sociedad perdona mucho más fácilmente las malas acciones que las malas palabras"). Su batería retórica desciende de Villon y Rabelais. El lenguaje entero es, subraya Sollers, un teclado de piano, una caja de música en busca del acorde que pueda restituir sobre la página el bombardeo sobre Hannover.

    Sollers, factótum en sus tiempos de la revistaTel Quel, es un lector astuto. Sin restarles importancia a libros decisivos como Viaje al fin de la noche, recomienda la publicación de la correspondencia completa de Céline y destaca la centralidad casi inadvertida de su "trilogía alemana". Difícil no concordar. En De un castillo el otro, NorteyRigodón, Céline narra, de manera progresivamente alucinada, su viaje de París y Sigmaringen a Dinamarca como colaboracionista en fuga. Los prodigios de la lengua proveen la inédita "pintura de una Europa destruida", arrasada por las llamas, que nadie antes ni después se atrevió a abordar con semejante furor.

    En Las partículas elementales (1998), de Michel Houellebecq, comparece Sollers como personaje y, en su breve cameo inconsulto, refiriéndose a Baudelaire, le asegura a uno de los protagonistas de la novela que los grandes escritores son siempre reaccionarios. En esta reunión de textos dispersos, repite esa idea. El reaccionario Céline es, también, un revolucionario imperdonable.

    La notable versión de Hugo Savino, en particular cuando traduce las citas de Céline, es digna del fraseo de algunos de los vástagos argentinos (Néstor Sánchez, Osvaldo Lamborghini) del autor deMuerte a Crédito.

    Céline

    Philippe Sollers
    Paradiso
    Trad. : Hugo Savino
    110 páginas
    $ 76

    http://www.lanacion.com.ar/1548420-maldito-imperdonable

    *

    La incómoda conciencia

    En este libro de ensayos recién publicado, el escritor Philippe Sollers descubre en el autor de “Viaje al fin de la noche” una máquina de guerra.

    POR MARIO NOSOTTI

    Céline, una mirada imprescidible del siglo XX.

    Céline ha atravesado el siglo XX como un caso excepcional. Esta monstruosidad -denunciada, discutida y alardeada hasta el cansancio- se debe a tres razones básicas : su antisemitismo, su capacidad para meter el dedo en la llaga y, la más calculadamente borroneada de las tres, su estilo. Quizá va siendo hora de refundarlo - como dice Philippe Sollers en el ensayo Céline (Paradiso) - corriéndolo de ese estereotipo que produce el efecto contrario al que Céline buscaba : lo hace pesado, una especie de dinosaurio bravucón. Para desmentir esto tan sólo hace falta leerlo. Es esa pesadez la que Céline denuncia en sus contemporáneos -brutalidad, costumbre, cálculo- y sobre todo un hecho, que trabajan y viven en una lengua muerta, la lengua que él hará revivir. Contrariamente a la ametralladora de palabras que muchos le adjudican, Céline aspira a una música precisa. Como nadie y antes que ninguno, comprende lo que está en juego, “el diablo se lanza sobre la música de los pueblos a los que quiere suprimir”. Esa será su lucha solitaria, la que pocos comprendan. Sollers descubre que bajo las acusaciones de antisemitismo, bajo el continuo intento de acallarlo, lo que subyace es el desacomodo que produce el estilo Louis-Ferdinand Céline.

    El francés emotivo

    Pero, ¿de qué se trata ese estilo ? Es este el asunto al que Sollers vuelve una y otra vez. La música y la emoción, dice, son todo Céline:esa es su metafísica. Céline buscará devolver al lenguaje escrito la emoción del lenguaje oral, lo que llama “restitución emotiva interna del francés”. Reaccionando a los dichos de un profesor americano que lo tilda de insensible y nulo explica, “todo mi trabajo consistió precisamente en hacer que la prosa francesa sea más sensible, tensa, voltairizada, fustigadora y malvada, inyectándole un lenguaje hablado, su ritmo, su especie de poesía y la ternura a pesar de todo, la restitución emotiva, ¡qué boludo !” Céline compara el proceso de dar a luz una obra con el desmalezamiento de un templo oculto en la espesura, limpiando palmo a palmo eso que él llama “la atmósfera”. Su divisa es un metro directo, todos adentro, al fondo sin escalas. Y para eso hay que saber perfilar exactamente los rieles, un trabajo insalubre, de preso, capaz de volver loco a cualquiera.

    Y es que detrás de la aparente naturalidad, la sensación de urgencia que produce el habla de Céline, Sollers descubre una máquina de guerra, puesta a punto obsesiva y minuciosa donde el escritor queda literalmente pulverizado. Eso, e infinitos recursos : aceleramientos, saltos, freno, risa, los puntos suspensivos “que hacen que la página revolotee”. Para Sollers la magia queda expuesta finalmente : “hacen falta mil precisiones para contar lo inmediato”.

    El aspecto de la ligereza, y otro muy poco frecuentado, la ternura escondida en Céline -cierta inocencia cruda, de niño en un gran campo de batalla- resaltan la otra cara que enfatiza lo complejo del caso. Nada más lejos de la pretendida visceralidad que ponderan sus admiradores. Como dice Sollers, “hacer pasar un murmullo en pendiente por un temblor de tierra”, es esa la potencia de su prosa.

    Pero sobre todo Céline es un escritor cómico, la risa es su mayor provocación, en medio del horror uno no puede parar de reírse. Sollers advierte que quien lo toma al pie de la letra, quién no sabe reírse, no ha entendido nada.

    El innombrable

    La obra de Céline se yergue imprescindible a la hora de comprender el siglo XX, no sólo en su obsesión antisemita, sino por su extraordinaria radiografía de una Europa destruida por la guerra. Para Sollers es claro que Céline ha sido un chivo expiatorio. Fue, y de algún modo sigue siendo, la incómoda conciencia de algo horrible que pesa sobre Francia, aquél al que es preciso acallar, aislar como fenómeno. Tácito acuerdo de silencio para lavar las culpas de una sociedad mayormente antisemita y colaboracionista. Secreto de familia que se esconde en la lengua, la misma que Céline transformará para poner en evidencia lo que incuba la buena conciencia. Declarado desgracia nacional, “Céline se convirtió en el portavoz de una pasión histórica enorme, el antisemitismo, y lo hizo sin sustituciones”. De algún modo nosotros, bienpensantes, seguimos siendo sus contemporáneos.

    El presente volumen -traducción impecable de Hugo Savino- es una recopilación de ensayos y artículos que Sollers publicó en distintas épocas, y que van desplegando un Céline heterogéneo, donde puede seguirse tanto su transformación -el antes y el después que significó la publicación de los panfletos que harán del autor deViaje al fin de la nocheun caso irredimible-, como el derrotero de las lecturas y aproximaciones de Sollers a su autor más amado. La relación explosiva con su editor Gastón Gallimard, la negación del Goncourt, su gusto por el ballet, sus novelas menos leídas y las más célebres, su temporada en el infierno en Dinamarca -que paradójicamente le salvó la vida- fragmentos de entrevistas y cartas -donde destacan las que le envía a su amante, la pianista Luciente Delforge- son algunas de las perlas del libro.

    Por diversas razones, no hay demasiados libros de Céline en la Argentina. Su traducción siempre fue todo un desafío. Además de las españolas de Carlos Manzano y Carmen Kurtz -difíciles de digerir para el lector de estas pampas- son pocos los que se le animaron a Céline -por citar dos ejemplos, Néstor Sánchez tradujoMuerte a crédito, y Mariano Dupont hizo lo mismo conConversaciones con el ProfesorY . Por eso todo nuevo acercamiento a la obra del doctor Destouches (su verdadero nombre) es para nuestro medio literario un golpe de aire fresco.

    http://www.revistaenie.clarin.com/literatura/incomoda-conciencia_0_850115005.html


  • Hugo Savino | 19 octobre 2012 - 17:17 3

    Cher Viktor : bonjour.
    Je vous fais parvenir la couverture du Sollers / Céline que je viens de traduire.
    Sa parution est prévue pour le mois de novembre à Buenos Aires, Éditions Paradiso.

    Je vois que pileface s´est normalisé.

    Un grand bonheur voir ce livre de Philippe Sollers traduit en Argentine.
    J´habite encore à Madrid.

    Cordialement,

    Hugo


    Sollers/Céline, Paradiso, Buenos Aire, 2012 (pdf)


  • A.G. | 26 février 2010 - 14:37 4

    Sur France Inter le 27/02/2010 : Louis-Ferdinand Céline

    "Faire danser des alligators sur une flûte de pan" : voici la définition que donne Céline de la littérature. Auteur complexe, ambigü, insaisissable, il laisse derrière lui une oeuvre monumentale, que je vous propose d’aborder ce soir [samedi], à travers des extraits de : Mort à crédit, (1ère éd. 1936), Gallimard, Folio, 1985 ; Voyage au bout de la nuit, (1ère éd. 1932), Gallimard, Folio, 1972 ; Guignols’band, (1ère éd. 1944), Gallimard, Folio, 1989 ; Féerie pour une autre fois, t. I, (1ère éd. 1952), Gallimard, Folio, 1977 ; Lettres de Céline, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, édition établie par Henri Godart et Jean-Paul Louis, 2009.
    _ Et avec les voix de Céline, Dominique Rolin, Arletty, Judith Magre, Marguerite Yourcenar et Julia Kristeva.

    Non, ça peut pas faire de mal.