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Caravage : un chef-d’oeuvre sort de l’ombre : Madeleine en extase

D 28 octobre 2023     A par Albert Gauvin - C 0 messages Version imprimable de cet article Version imprimable    ................... PARTAGER . facebook


A l’automne 2018, lors de l’exposition « Caravage à Rome. Amis et ennemis », le Musée Jacquemart-André, à Paris, montrait deux Madeleine en extase, l’une dite « Madeleine Klain », peinte par Le Caravage vraisemblablement vers 1606, l’autre, découverte fin 2014 dont l’attribution faisait l’objet d’interrogations. Fasciné par leur beauté (et, depuis plus longtemps encore, par la figure énigmatique de Marie-Madeleine [1]), j’avais photographié et présenté — sans en savoir plus — ces deux oeuvres en marge de mon dossier consacré au livre de Yannick Haenel La solitude Caravage (Fayard, 2019 ; folio n° 6835, 2020). Arte présente ce samedi 28 octobre une passionnante enquête sur cette « Madeleine retrouvée » et sa restauration ainsi que sur la dernière période de la vie du peintre et son exil particulièrement mouvementés. Mieux que Colombo !

Madeleine en extase


Caravage, Madeleine en extase dite « Madeleine Klain », 1606 (?). Collection particulière.
Photo A.G., 29 novembre 2018. ZOOM : cliquer sur l’image.

Caravage, Madeleine en extase, vers 1606 (?). Collection particulière.
Notez le crâne, en bas, à droite, qui ne figure pas sur le premier tableau.

Photo A.G., 29 novembre 2018. ZOOM : cliquer sur l’image.

« Voici pour la première fois réunies deux versions de la Madeleine en extase, un tableau de Caravage dont on connaissait la composition grâce à une réplique fidèle, signée Louis Finson (Marseille, musée des Beaux-Arts).
Ces deux peintures — l’une dite « Klain », attribuée à Caravage depuis longtemps et l’autre, également de la main du maître, découverte en 2015 et encore jamais exposée en Europe — sont présentées ensemble afin d’ouvrir le débat des critiques.
Réalisé sans doute à la même époque que Le Souper à Emmaüs, le thème de l’oeuvre a vraisemblablement connu un succès immédiat. L’iconographie de la Madeleine en extase est tout à fait innovante : sa pose, tout en préfigurant les extases des saintes du Bernin, renvoie à celles des statues antiques de ménades et de satyres ivres, ainsi qu’à Ariane endormie et à Méléagre mourant. Le visage consumé et hagard de la sainte trahit l’extase d’une pécheresse convertie, plongée dans une lumière contrastée qui révèle ses courbes abandonnées.
Certains historiens de l’art ont rapproché le ventre enflé de la sainte de celui du modèle de la Mort de la Vierge conservé au musée du Louvre, tableau peint par Caravage en 1605 [2]. »

LIRE : Philippe Dagen, Le Caravage, une avant-garde à lui tout seul

VOIR AUSSI :
La Madeleine en extase, l’original du Caravage enfin retrouvé ?
et Autres Madeleine.

A.G., 11 janvier - 22 février 2019.

Deux versions de « Madeleine pénitente »
Collections particulières

L’iconographie de cette « Madeleine pénitente » par Caravage est très innovante : tout en préfigurant les extases des saintes du Bernin, sa pose renvoie à celles des statues antiques de ménades et de satyres ivres. Le visage consumé et hagard de la sainte trahit l’extase d’une pécheresse convertie et plongée dans une lumière qui révèle ses courbes et son abandon.
Le musée Jacquemart-André présente deux versions de « Madeleine pénitente » dont l’une a été découverte en 2015 et exposée une seule fois auparavant, à Tokyo, en 2016.
Pierre Curie, conservateur du musée Jacquemart-André, présente ces deux versions du tableau conservées dans des Collections particulières.

Trois Madeleine en extase pour un seul Caravage
Un nouveau Caravage ???

Caravage : un chef-d’oeuvre sort de l’ombre

Documentaire de Frédéric Wilner
France, 2021.

A-t-on retrouvé la version originale de la "Madeleine en extase" du Caravage ? Enquêtant sur l’authenticité de l’œuvre et le contexte de sa création, ce documentaire chemine sur les traces d’un tableau disparu qui éclaire l’épopée tragique du génie lombard.

En 2015, une Madeleine en extase est découverte dans la modeste collection d’une famille italienne. S’agit-il de l’original du Caravage, disparu à sa mort, en 1610, ou d’une des nombreuses copies réalisées ensuite ? Après expertise, Mina Gregori, l’une des plus grandes spécialistes de l’artiste, est convaincue de l’authenticité de l’œuvre. Sur ses conseils, les propriétaires fouillent leurs archives et exhument trois documents : deux inventaires de tableaux, datant de 1842 et 1864, ainsi qu’un vieux papier mentionnant une "‘Madeleine renversée’ de Caravage". Partant de ces pièces à conviction, une experte des archives anciennes et une historienne de l’art italiennes se lancent alors dans une vaste enquête pour tenter de retracer l’itinéraire de la toile. Progressivement, les indices collectés leur permettent de la relier au destin tragique du peintre, génie novateur au tempérament destructeur. Condamné à mort pour meurtre à la suite d’une rixe qui a mal tourné, le Caravage a passé les quatre dernières années de sa vie en exil, entre Naples, Malte et la Sicile, avant de disparaître à 38 ans dans un petit port toscan, alors qu’il faisait son retour à Rome.

Art du suspense

De la restauration de l’œuvre à l’étude de ses moindres détails à Paris, de l’exploration des registres paroissiaux du XVIIe siècle à l’analyse infrarouge des documents retrouvés, Frédéric Wilner (Trois villes à la conquête du monde – Amsterdam, Londres, New York, Il était une fois le musée du Louvre...) reconstitue pas à pas, avec un sens certain du suspense, l’enquête qui a permis à des historiens de l’art, restaurateurs, archivistes et chimistes d’attribuer cette Madeleine en extase au Caravage. Leurs explications passionnantes se mêlent à des extraits de chroniques de l’époque et à d’élégantes animations en rotoscopie – une technique consistant à dessiner ou peindre sur des séquences filmées – pour retracer les dernières années, nimbées de légende, du maître du clair-obscur. L’occasion, aussi, de (re)découvrir les chefs-d’œuvre qu’il a semés sur la route de son exil, au cours de son impossible quête de rédemption.

« Caravage. Un chef-d’œuvre sort de l’ombre », sur Arte : sur les traces de la « Madeleine en extase » du peintre maudit

Le documentaire de Frédéric Wilner se penche, avec brio, sur la quête d’origine, d’identification et d’authenticité d’un tableau attribué au Caravage.

Par Harry Bellet
Le Monde, 28 octobre

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Restauration du tableau

Sainte Marie-Madeleine a connu presque une vingtaine d’« extases ». C’est à peu près le nombre de tableaux représentant la disciple du Christ recensés et attribués au Caravage (1571-1610), sur l’authenticité desquels se déchirent les spécialistes. Le documentaire de Frédéric Wilner se penche, avec brio, sur le cas de l’un d’entre eux. Il apparaît chez un couple d’Italiens, désireux de rester anonymes, qui ont mis en œuvre de gros moyens pour identifier ce tableau retrouvé chez eux. A commencer par faire appel à Cinzia Pasquali, une restauratrice d’exception, Italienne installée à Paris depuis une trentaine d’années, à laquelle il arrive de collaborer avec le Centre de recherche et de restauration des musées de France. C’est dire le sérieux de sa démarche.

C’est aussi dire celui du film : loin de chercher les effets spectaculaires (enfin, juste ce qu’il faut), il va au fond des meilleures manières existantes aujourd’hui pour déterminer l’origine d’une œuvre d’art. Avec, certes, cette particularité de mêler, à l’enquête menée actuellement, une biographie du Caravage, qui eut une vie mouvementée. Alternent ainsi des scènes fort sérieuses où Cinzia Pasquali explique comment nettoyer proprement un vieux vernis, et d’autres un peu plus romanesques où des acteurs, filmés puis dessinés selon le procédé de la rotoscopie, qu’on n’avait pas vu depuis la version du Seigneur des anneaux (1978), de Ralph Bakshi, montrent à quel point le Caravage fut un mauvais garçon, étripant à qui mieux mieux ceux qui avaient le malheur de lui déplaire.

Enquête exemplaire

On ne résumera pas la vie du lascar – elle l’est dans le film –, mais il est bon de s’attarder sur l’enquête exemplaire menée tant par le documentariste que par une kyrielle de spécialistes pour, non pas authentifier ce tableau – Mina Gregori, considérée comme la meilleure spécialiste du peintre, le tient pour authentique, or, certains doutent, c’est de bonne guerre –, mais en retracer la provenance. Orietta Verdi, archiviste paléographe, Francesca Curti, historienne d’art spécialiste du XVIIe siècle, et quelques autres sont parties de trois petits manuscrits conservés par les propriétaires du tableau pour identifier tous leurs prédécesseurs.

Leur quête a abouti, après plusieurs années, à un certain Giovanni Andrea Canali, marchand de soie et magistrat au tribunal de Naples chargé des successions litigieuses. Dont celle du Caravage, mort on ne sait trop de quoi sur une plage non loin de là. Canali fait saisir ses bagages, que conservait la marquise Costanza Colonna (vers 1555-1626), laquelle protège le génial voyou depuis son enfance. Et, semble-t-il, détourne la « Marie-Madeleine » à son profit. Tous ses héritiers ont été identifiés par les chercheuses, et quand on voit à quel point elles savent rendre l’histoire de l’art passionnante, on a envie de s’y remettre.

Le monde dans un tableau - Le peigne du Caravage

Réalisation : Nicolas Autheman
France, 2023

Nouvel épisode de cette collection originale sur l’histoire de l’art, ce savant documentaire passe au peigne fin le tableau "Marthe et Marie Madeleine", chef-d’oeuvre du Caravage aux multiples clefs, peint à l’heure de la Contre-Réforme.

C’est un peigne en ivoire à la dent cassée, comme négligemment posé sur la table au premier plan. Dans Marthe et Marie Madeleine, Michelangelo Merisi, dit Le Caravage, a représenté un épisode des Évangiles comme un arrêt sur image : Marthe, l’une des premières disciples de Jésus, y raconte la vie du Christ à sa sœur Marie Madeleine, prostituée à la boucle de cheveux frivole, l’incitant à épouser la foi chrétienne. Arrachée aux plaisirs terrestres, celle-ci est saisie sur le vif, à l’instant même où elle est touchée par la grâce et où son monde intérieur se transforme. Symbole de sa vie passée de vanité, ce peigne constitue l’une des clefs du chef-d’œuvre. Comment cet objet intrigant est-il parvenu en 1598 dans la Ville éternelle, qui attire à l’époque tous les grands esprits et talents, mais aussi des bandits et vagabonds, et se métamorphose la nuit en capitale du désir, de la luxure, de la violence et de la démesure ? À l’heure où la Réforme menace ses dogmes et séduit les âmes perdues, l’Église utilise l’art comme une arme à la gloire de Dieu. Dans cette féroce croisade de la beauté, le maître du clair-obscur installé depuis peu à Rome, artiste bagarreur qui hante les bas-fonds et prend pour modèles courtisanes et gens de la rue, y est sollicité pour son génie.

Mystères de l’art

Décryptant les codes secrets de ce tableau nomade à l’attribution tardive, conservé à l’Institute of Arts de Detroit, Le peigne de Caravage plonge dans l’ambition artistique de la Contre-Réforme, les plaisirs transgressifs de la cité des papes et la soif d’absolu du Caravage. Il remonte aussi à la conquête par les Portugais, à partir des côtes africaines, du royaume Kongo au précieux ivoire, dont un mystérieux ambassadeur sera accueilli et inhumé avec les honneurs au Vatican... Pour éclairer cette histoire de l’art aussi savante que vivante, une série de personnages surprenants voire extravagants, la tenancière romaine d’un club libertin, un garde-forestier angolais, un duo de coiffeurs ou un ivoirier parisien, documentent l’enquête avec sagacité. À travers le détail de la toile du peintre naturaliste à l’ardente spiritualité s’ouvre ainsi, entre ombre et lumière, une vertigineuse fenêtre sur le monde.

Le Caravage sur Pileface
LIRE NOTAMMENT :
Yannick Haenel, La solitude Caravage
D’une extase à l’autre : La Madeleine du Caravage et la Thérèse du Bernin
Qui était Marie-Madeleine, la « compagne » de Jésus ?
Trois Madeleine à Madrid

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