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Les Grandes baigneuses

Le Paradis de Cézanne

D 6 octobre 2006     A par Viktor Kirtov - C 3 messages Version imprimable de cet article Version imprimable    ................... PARTAGER . facebook


« ...Regardez un Cézanne, n’importe lequel, c’est ainsi être à la recherche du réel perdu. On peut accumuler dix mille films, un million d’heures de télévision, cents millions de photographies et de journalisme, rien ne tient , bien entendu devant cette cour de ferme, ce rocher rouge, cette maison du pendu, ces joueurs de cartes, ce baigneur aux bras écartés, cette femme... »

Philippe Sollers
Le Paradis de Cézanne
Gallimard, 1995, p.66

« Dans quelle langue dire cela ? [...] »


Paul Cézanne devant Les Grandes baigneuses, 1904.
ZOOM... : Cliquez l’image.
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« Il y a les peintres. Delacroix, pour l’énergie. Ingres ? « Très fort, mais bien emmerdant. » On n’oublie pas qu’il a eu pour les baigneuses une prédilection spéciale, mais il n’y a aucune raison de couvrir le nu d’un alibi turc. Les baigneuses de Courbet ? Le scandale qu’elles ont provoqué ? Certainement, mais Courbet, grand peintre, « manque d’élévation ». Il doit y avoir un moyen d’aller plus loin vers la Terre promise et la nudité paradisiaque. Les Baigneurs, les Baigneuses sont le grand secret de Cézanne. Il se tait là-dessus, et d’ailleurs, vérifiez, tout le monde est embarrassé pour en parler. Ces figures sont trop « autre part », ni dans le passé ni dans le futur. L’expérience est-elle entièrement absorbée par Les Demoiselles d’Avignon ? La précipitation de l’évangile moderne veut le faire croire, mais rien de moins sûr. Rusé Cézanne : il égare son monde, il se faufile, rompt, se retire, veille à ce qu’on ne lui mette pas le « grappin » dessus : il repart, poursuit ses « études », revient sur le motif. Le grappin (social, financier, sexuel, psychologique) est l’exact contraire, l’ennemi acharné du motif. Mais sur ce motif-là, baigneurs, baigneuses, motus.

Les Grandes Baigneuses, finalement sont les déesses énigmatiques de Cézanne. On ne les a jamais vues. Elles n’ont aucun trait d’identité d’époque, impossible de les identifier par la toilette, le caractère, l’anecdote biographique. Leur visage sans visage n’est marqué d’aucun souci d’être soi. On ne peut pas non plus les réduire à une mythologie connue : Aphrodite, Vénus, Diane, Nymphes. Celles-là (celles de Bâle, de Londres, de Philadelphie) ne se révèlent, comme dans le poème de Parménide, qu’à celui qui se tient hors de l’égarement des mortels incapables de se décider à propos de la question cruciale de l’être et du non-être. Elles sont sur le chemin très parlant de la vraie sphère, ni cosmologique ni géométrique, celle de l’Un. Elle est « bellement circulaire », « exempte de tremblement » cette sphère, et en voici une coupe. Vous voulez dire l’Un sans l’Autre ? Chut, nous allons avoir tous les pouvoirs sur le dos, c’est-à-dire l’Éternel Féminin lui-même, l’Éternel Retour. Mieux vaut se dissimuler pour l’instant [...]

Les commentateurs sont amusants : ils croient, eux, à la « polarité » d’Éros et de Thanatos. Ils sont, bien entendu, fascinés par l’androgynat primordial. Que Cézanne se soit fait beaucoup baigneur (au pluriel) avant d’en arriver à ses buissons ardents et détachés de baigneuses, leur paraît une preuve d’inquiétude homosexuelle ou bisexuelle. Ils vous rappellent, non sans raison, l’histoire de L’Hermaphrodite endormi. Ils vous balancent tantôt animus, tantôt anima. Ils insistent, et c’est leur problème, sur le fait que Cézanne est porteur d’un traumatisme, d’une peur ; d’une répulsion ou d’un dégoût pour le corps féminin.

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En général, ils trouvent ces baigneuses laides. Elles ne correspondent à aucun canon de beauté classique ou cinématographique. Puisqu’elles ne sont tirées d’aucun modèle existant, elles doivent être forcément le résultat de fantasmes ou d’hallucinations de Cézanne. Il est très frustré, très inhibé, ce Cézanne : ne nous dites pas le contraire, sinon vous allez nous angoisser. Cézanne est un symptôme, c’est clair. Quelque part, dans le marais entre Freud et Jung (morne plaine), les symboles et les archétypes règnent. Cézanne est déjà américain, pour ne pas dire planétaire. Mais, comme d’habitude, c’est-à-dire comme Picasso et Matisse, un peintre garde pour lui son Cézanne. Ainsi de Jasper Johns, chez qui se trouve le Baigneur aux bras écartés.  »

Philippe Sollers
Le Paradis de Cézanne
Gallimard, 1995, p. 67-80

L’extrait dans son contexte (pdf)


Une autre version plus stylisée et plus dépouillée des Grandes baigneuses (1900-1906) et dans un format différent est exposée à la National Gallery.


Les Grandes baigneuses, 1900-1906, Huile sur toile, 172,2 x 196,1 cm. (détail)
ZOOM (tableau entier)... : Cliquez l’image.



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3 Messages

  • Viktor Kirtov | 28 juillet 2023 - 11:19 1

    Par Marcelin Pleynet, en réponse à des questions de Catherine Millet. Art Press n°18, mai 1978.
    Archive du site de l’auteur.

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    Cézanne contre les professeurs et les historiens

    Pas un texte sur l’art moderne qui ne démarre de Cézanne, ne renvoie à Cézanne, ne tourne autour de la « problématique cézannienne ». « Le Bon Dieu de la peinture », « le primitif d’un art nouveau »… Pourtant, il n’existe pas beaucoup d’exégètes à proprement parler, de son œuvre. Infiniment moins, par exemple, que de Picasso. Vous-même, qui avez traité très largement de la peinture moderne – notamment dans L’Enseignement de la peinture – n’avez considéré que l’après-Cézanne (Matisse, Mondrian, Malevitch). On est nombreux à attendre votre Cézanne. Il y a bien une raison à cela…

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    Quatrième de couverture
    Où en sommes-nous avec l’oeuvre de Cézanne ? Qu’en savons-nous encore, que voulons-nous encore en savoir ? Que voyons-nous aujourd’hui lorsqu’en foules nous nous trouvons devant les tableaux de celui qui déclarait : " Le goût est le meilleur juge. Il est rare. L’art ne s’adresse qu’à un nombre extrêmement restreint d’individus" ? Cézanne avait-il raison de penser que ses peintures rencontreraient un succès de " mauvais aloi" et que transformer ses tableaux en marchandises de valeur commerciale et bourgeoise, c’était préparer "un mauvais coup" ? Qu’avons-nous oublié de voir, de retenir de ce que justement nous célébrons ? Comme si la singularité de cette oeuvre s’imposait d’abord par ce que nous ne voulons pas savoir, comme si la mise à disposition de l’oeuvre, sa surexposition, avait d’abord pour fonction d’en occulter l’essentiel.

    J’ai été à plusieurs reprises amené à constater qu’en dehors d’un cercle très restreint d’artistes et encore plus restreint d’amateurs, l’intérêt pour l’œuvre de Cézanne ne dépasse pas généralement la curiosité que tout un chacun porte vaguement à toute célébrité que le temps transforme en vedette. Les foules qui se pressent aux expositions des impressionnistes ne vont pas chercher à comprendre ce que, à travers la peinture, un certain nombre d’hommes ont tenté d’exprimer et de réaliser, elles vont s’assurer que tout peut finalement rentrer dans l’ordre du lieu commun qui les anime. La chose est encore plus ambiguë en ce qui concerne l’intérêt que les artistes, les amateurs et les curieux portent à l’œuvre de Paul Cézanne ; au fond, tous n’ont rien de plus pressé que d’en faire un grand maître soigneusement casé dans l’ordre de leur culture et de leur histoire. Je dirai qu’avec le temps la haine du tempérament artistique se transforme en cette sorte d’ambivalence de sentiments dont témoigne, à travers les expositions rétrospectives et l’organisation muséologique, la culture historique. Paul Cézanne dira lui-même : « Ces gens-là voient bien, mais ils ont des yeux de professeur ». Dans un essai intitulé « L’utilité et l’inconvénient des études historiques », Nietzsche écrit à peu près ceci : « Si nous prenons l’exemple le plus simple et le plus fréquent qu’on puisse imaginer, les natures anti-artistiques ou douées d’un faible tempérament artistique, armées et équipées d’idées empruntées à l’histoire monumentale de l’art, et si l’on se demande contre qui ces natures dirigeront leurs armes, on peut constater qu’elles dirigeront d’abord leurs armes contre leurs ennemis héréditaires (il y va en effet quelque part de l’hérédité), les tempéraments artistiques fortement doués, c’est-à-dire ceux qui sont seuls capables d’apprendre quelque chose dans les événements historiques ainsi présentés, capables d’en tirer partie pour la vie et de transformer ce qu’ils ont appris en une pratique supérieure. » La transformation d’œuvres vives en curiosités historiques et muséologiques, n’a selon moi pas d’autre objectif. Puisque vous m’encouragez à parler de moi, je dirai que la réputation que l’on me fait de dissident et/ou de provocateur, est d’abord due à la façon dont est ressenti le rapport que j’entretiens avec l’art et la littérature modernes. Si je me crois constamment obligé de préciser que mon discours critique se fonde sur mon expérience du langage poétique, n’est-ce pas d’abord pour marquer que ce qui essentiellement continue à faire provocation, c’est la vie d’une activité capable de transformer les événements culturels historiques en une pratique supérieure ? Selon moi, c’est à cela et à cela seul que peut se mesurer un discours critique et/ou analytique. Les pensées et les sensibilités normatives bien entendu non seulement n’y trouveront pas leur compte (que leur importe ceux qui sont encore prisonniers dans le devenir et le vouloir) mais elles perçoivent très bien qu’un tel type d’activité ne peut que nuire au bon rendement de leurs placements et de leurs intérêts. Ces pensées et ces sensibilités normatives, ce sont effectivement les natures anti-artistiques (historiens, universitaires, muséologues) ou douées d’un faible tempérament artistique (collectionneurs, amateurs et artistes aussi bien), bref tous les spécialistes dont Nietzsche nous dit que « leur instinct leur apprend que l’on peut tuer l’art par l’art ». Je développe tout cela parce que vous me demandez comment il se fait que je n’ai toujours rien écrit sur Paul Cézanne. On ne se situe pas impunément là où je me situe. À peine avais-je publié mon essai sur Lautréamont que se levait la marée noire des intérêts universitaires et historiques, même chose pour mon approche de Matisse. Ce n’est jamais, je peux bien vous l’avouer, sans une certaine crainte que je publie le dialogue que j’entretiens avec telle ou telle œuvre qui me tient particulièrement à cœur (comme on dit). Si j’ai jusqu’à maintenant plus volontiers écrit sur l’art contemporain c’est que j’ai l’assurance dans ce domaine de ne soulever que des intérêts mercantiles qui au fond me touchent peu. Ce qui de l’œuvre de Cézanne ou de l’œuvre de Sade me permet de créer et de vivre restera encore quelque temps dans mes tiroirs. Pure et égoïste précaution pour… ma sensibilité.

    Un jour, d’une façon assez polémique, vous avez déclaré que toute la peinture moderne était encore dans l’atelier de Cézanne. Boutade ou pas boutade ? De toute façon, quel en est le sens ?Cette déclaration n’a selon moi rien de polémique. Je la reprends telle quelle : toute la peinture moderne est encore dans l’atelier de Paul Cézanne. Je ne vois d’ailleurs pas pourquoi elle devrait en sortir, elle ne trouvera nulle part ailleurs de meilleure compagnie. Mais ici encore j’ai un point de vue peut-être un peu particulier. Je suis en effet aujourd’hui tout à fait incapable de dire si c’est l’œuvre de Paul Cézanne qui m’a permis de comprendre l’art moderne et contemporain ou si c’est l’art moderne et contemporain qui m’a permis de comprendre ce qu’il en était de l’œuvre de Paul Cézanne. C’est en ce sens si vous voulez que je peux déclarer que pour moi toute la peinture moderne est dans l’atelier de Paul Cézanne. Ici encore évidemment c’est toujours de moi que je parle et cela n’intéresse pas forcément les foules. Pourtant je ne vois pas d’autre possibilité d’aborder une œuvre comme celle-là. Les résistances qu’elle a rencontrées et qu’elle rencontre encore implicitement sont liées au sens qu’elle porte. Je dirai même que la plupart des travaux, expositions et commentaires qui sont consacrés à l’œuvre de Paul Cézanne n’ont d’autre objectif que d’en oblitérer le sens. Pourtant, la peinture moderne a vécu et continue à vivre de la signification et du sens que Cézanne a donnés à la peinture. Lorsque Cézanne se défend pour qu’on ne lui mette pas « le grappin dessus », ou lorsque apprenant que ses toiles commencent à se vendre il déclare que l’on « prépare un mauvais coup », il entend bien que l’on essaie de faire passer quelque chose qui oblitérera le devenir et le vouloir dont sont œuvre est la réalisation. Pour comprendre cela, il faut se demander quelle est la place que cet artiste a voulu occuper dans l’univers. Il faut se demander cela en regardant un de ses tableaux et en ayant à l’esprit ce qu’il confie à Joachim Gasquet : « Quand je songe à ces premiers hommes qui ont gravé leurs rêves de chasse sous la voûte d’une caverne ou à ces bons chrétiens qui ont peint leur paradis à fresque sur la paroi des cimetières, qui se sont faits, qui se sont tout fait, leur métier, leur âme, leur impression. [Je voudrais] être ainsi devant un paysage. En dégager la religion… », et encore : « La délicatesse de notre atmosphère tient à la délicatesse de notre esprit. Elles sont l’un en l’autre. La couleur est le lieu où notre cerveau et l’univers se rencontrent. C’est pourquoi elle apparaît toute dramatique aux vrais peintres. » Et encore : « Il y a une logique colorée, parbleu. Le peintre ne doit obéissance qu’à elle. » Et encore : « Si je fais par le mystère de mes couleurs partager ce frisson aux autres, n’auront-ils pas un sens de l’universel plus obsédant peut-être, mais combien plus délicieux ? », et encore : « Les mots, les couleurs ont un sens. Un peintre qui sait sa grammaire et qui pousse sa phrase à l’excès, sans la rompre, qui la calque sur ce qu’il voit, qu’il le veuille ou non traduit sur sa toile ce que le cerveau le mieux informé de son temps a conçu et est en train de concevoir. » La peinture moderne est encore dans l’atelier de Cézanne et ce sans exception parce qu’elle a encore à travailler et à comprendre la logique et la place de son sens religieux (lumineux, coloré) de l’universel. Il semble que tous les commentateurs et tous les historiens aient eu quelques scrupules à aborder la question de Paul Cézanne catholique pratiquant, et que aujourd’hui encore sur ce point on traite l’artiste avec la même désinvolture condescendante que l’on a pu tout d’abord traiter sa peinture. Je l’ai déjà dit, je le répète, l’art moderne et contemporain est lié à la question de la crise religieuse à l’intérieur de laquelle se débattent les institutions. Lorsque Paul Cézanne dit que la religion est pour lui une hygiène morale, on peut aussi se demander ce qui pour la peinture moderne et contemporaine occupe aujourd’hui la place de la religion ? Mais qui répond ? C’est aussi pour cette raison, c’est pour toutes ces raisons que la peinture moderne n’est pas prête de sortir de l’atelier et de la tête de Cézanne !

    Au fait, ce clivage institutionnalisé dans l’histoire de la peinture en un avant et un après Cézanne (avant, la peinture illusionniste, après, la peinture qui dit sa vérité propre…), est-il toujours opérationnel ? Toujours aussi net à désigner ? Oui. Mais je ne vois pas pourquoi vous dites que ce clivage est institutionnalisé. Cézanne est à mon avis tout à fait justifié de dire qu’il a manqué aux impressionnistes « un maître et des idées », de trouver les paysages de Renoir « cotonneux » et Manet « pauvre en sensations colorantes ». Il faudrait bien entendu ajouter que toute œuvre véritable fait clivage dans la mesure où elle se donne la possibilité de penser et de résoudre dans sa propre réalisation la crise qui l’a produite. Alors elle fait clivage et par la même occasion, comme Nietzsche le met bien évidence, « monument », mais combien y a-t-il d’œuvres que l’on puisse dire monumentales ?

    Les effets formels. Sans doute à cause d’une prédominance structuraliste dans notre critique d’art, ce sont eux surtout que l’on a retenus. De ces effets, il y a ceux qui furent exploités par les générations suivantes, ceux qui furent même fétichisés, et puis peut-être ceux qui furent négligés. Quels sont ceux surtout auxquels votre œil s’attarde ? Je n’irai pas jusqu’à dire qu’il y a en France une critique d’art à prédominance structuraliste. La critique d’art en France reste dans son ensemble ce qu’elle a toujours été, au mieux philosophique ou sociologique. Le formalisme dans le domaine de l’histoire ou de la critique d’art que l’on peut trouver maladroitement articulé çà et là, vient des Etats-Unis et est directement pillé, sans aucune autre originalité, chez Clement Greenberg. Relisant récemment la série d’articles sur la peinture aux États-Unis que j’ai publiée il y a aujourd’hui onze ans dans Les Lettres françaises je dois bien reconnaître que j’étais moi aussi alors en partie tombé dans ce panneau-là. Je m’en suis remis assez vite. Le malentendu, le succès du malentendu formaliste qui constituera toute l’histoire de l’art moderne et contemporain, est le fait d’esprits timides et respectueux plus intéressés à établir et à borner l’histoire qu’à en questionner la vitalité. Selon un préjugé évolutionniste vulgaire, les œuvres, académiquement, doivent s’engendrer et se remplacer en se suivant. De ce point de vue, sous prétexte qu’il fait suite à Cézanne et qu’il s’en réclame, le Cubisme est censé représenter un progrès par rapport à la réalisation cézannienne. L’absence d’esprit critique juxtapose ainsi des œuvres sans s’inquiéter du rapport qu’elles entretiennent avec le sujet du procès historique qui les fonde. Le Cubisme radicalisant de façon schématique un des aspects du procès cézannien (la mise en évidence de l’ordonnance spatiale), va ainsi évacuer toute la problématique proprement métaphysique de la fonction des « sensations colorantes » et de leur « logique » dans l’œuvre de l’artiste. Et l’on peut dire que même Matisse, qui en eut pourtant le pressentiment, n’a pas donné à cet aspect fondamental de l’œuvre de Cézanne sa véritable dimension. C’est assurément aujourd’hui cet aspect de son œuvre, aussi bien que de l’œuvre des autres artistes, qui me retient. Qu’en est-il de la pensée dans sa fonction colorante ? Qu’est-ce qui donne à cette fonction sa véritable dimension ? Comment distinguer cette fonction colorante de la barbouille dont certains voudraient nous convaincre qu’elle en tient lieu ? Qu’en est-il enfin de la métaphysique en peinture ? On en apprend beaucoup sur ce point si l’on rapproche une œuvre de Cézanne de son modèle, c’est-à-dire si on cherche à en comprendre le motif. Par exemple si l’on rapproche le portrait de Madame Cézanne dans la serre (Metropolitan Museum, N. Y.) que Venturi donne pour avoir été peint aux environs de 1890, de la photo qui fut faite de la même Madame Cézanne autour de 1900. Dans un important essai consacré aux « Pommes de Cézanne », Meyer Schapiro écrit : « Il est clair que la nature morte en tant que thème pictural relève d’un champ d’intérêt extérieur à l’art, comme le paysage, la scène de genre ou le portrait. » C’est cette extériorité qui selon moi travaille l’art du peintre, extériorité lumineuse venant dans la touche de la sensation colorante, fonder par le motif (et par la motivation) l’hétérogénéité de tout modèle. Meyer Schapiro écrira encore : « En peignant des pommes il pouvait, grâce à leur couleur et leurs dispositions, exprimer un registre d’état d’âme plus étendu, depuis la sévère contemplation jusqu’à la sensualité et l’extase. » L’intelligence alors se fixe sur les raisons qui font que dans de telles œuvres, l’œil ne s’attarde que pour se perdre. Je suis aujourd’hui particulièrement intéressé à faire surgir tout ce que le rationalisme scolaire de la critique formaliste a évacué et ce, à travers ce que je nommerai la picturalité. Rien n’a été fait dans ce domaine.

    Il y a un Cézanne moins bien apprécié que le Cézanne pré-cubiste, c’est le Cézanne expressionniste. Cf. par exemple le sentiment que l’on retire de la lecture de Venturi. Pourquoi ce tri dans les différentes composantes d’une personnalité. Toute la question est là. L’historien, l’universitaire et les tenants de la pensée normative veulent que Cézanne produise des tableaux. Je dirai que c’est là une politique qui consiste à diviser pour régner, et que cette politique n’est pas le moindre des symptômes de la critique formaliste telle qu’elle nous vient des États-Unis. Ce n’est pas un hasard si cette exposition thématique de Cézanne nous vient de New York [Cézanne, les dernières années (1895-1906), New York, Houston, Paris, 1977-1978]. On peut entre parenthèses s’étonner que ce soit aux Américains que revienne l’initiative d’une exposition Cézanne… mais c’est sans doute que les conservateurs français ont la tête ailleurs… quelque part entre Paris et Moscou… je me demande pourquoi. Bref cette division thématique d’une œuvre, dont le musée Guggenheim nous a fourni un exemple aussi explicite que possible avec l’arbitraire prélèvement d’une partie de l’œuvre de Mirò, est le fait de ces universitaires et de ces professeurs qui comme le dit Cézanne ne voient qu’avec « des yeux de professeurs ». Depuis déjà pas mal de temps pour tout ce qui concerne la peinture moderne et contemporaine, on ne se contente plus de préparer les mauvais coups, on les réalise. Trancher dans l’œuvre d’un artiste ne renvoie évidemment pas à l’ordonnance signifiante de l’œuvre de cet artiste mais au schéma plus général de mise en place historique de celui ou de celle qui opère cette amputation. Pour être moins spectaculaire cette pratique peut-être objectivement comparée à celle qui consisterait à découper un tableau pour en constituer deux ou trois autres. Le débat théorique porte ici sur le fond de la problématique historique, critique et analytique. L’ordonnance thématique ou stylistique d’une œuvre supposer que de quelque façon cette œuvre soit appréhendée comme élément d’une structure générale qui la surdétermine, qu’elle participe d’une façon ou d’une autre à un code normatif où elle trouve sa finalité, bref qu’il y ait une théorie générale de l’art capable de transcender toutes les particularités artistiques. En ce qui me concerne, je pense qu’il y a autant de systèmes et de théories qu’il y a d’œuvres, et que les particularités thématiques ou stylistiques de telle ou telle œuvre ne sauraient leur sens en dehors de l’ensemble que constitue la chaîne spécifique de cette œuvre.

    Sélectionner les dernières toiles de Cézanne et exclure les premières ne peut se faire qu’au détriment de ce qui qualifie et spécifie l’œuvre de l’artiste. C’est-à-dire au bénéfice d’une conception de l’histoire, déformant les faits et les événements pour mieux les adapter à son analyse. Des toiles aussi célèbres aujourd’hui que Les Grandes Baigneuses de Londres et de Philadelphie, que le portrait de Madame Cézanne dans la serre du Metropolitan Museum de New York, que le portrait du Fils de l’artiste, Paul Cézanne de la National Gallery de Washington, que le portrait d’Ambroise Vollard, ne trouvent leur qualité et leur sens que dans une chaîne qui comprend aussi bien La Madeleine du Louvre, Le Nègre Scipion du musée de Saõ Paolo, Le Rapt, La Moderne Olympia du Louvre et l’admirable Femme étranglée (que Venturi date de 1870-1872), pour ne pas parler du portrait du peintreAchille Emperaire(que Venturi date de 1867-1868). Seul l’ensemble de la production de Cézanne peut donner sens aux parties (styles, thèmes, manières, séries, tableaux) qui constituent cet ensemble, si l’on veut comprendre ce qu’il en est du génie monumental de cet artiste, en aborder la vie active. Lorsque Cézanne dit : « Il n’y a que la force initiale id est le tempérament qui puisse porter quelqu’un au but qu’il doit atteindre », ne reconnaît-on pas la voix qui porte et traverse l’œuvre tout entière du peintre ? Le sens d’une œuvre aussi tranchante et déclarative que celle de Paul Cézanne ne saurait être qu’interne à l’œuvre, sauf à ce qu’une histoire qui n’est pas la sienne tente de lui mettre le grappin dessus.

    Réponses à des questions de Catherine Millet. Art Press n°18, mai 1978.
    Crédit : marcelinpleynet.fr


  • Viktor Kirtov | 26 mars 2023 - 11:18 2

    Après le regard de Sollers, celui d’un autre écrivain Mika Biermann, restitué par Fabien Ribéry sur son excellent blog et intitulé :
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    Paul Cézanne, seul contre tous, par Mika Biermann, écrivain
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    Paul Cézanne, Le Meurtre, 1867-1870 >
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    « Le soir, dans sa bonté, est tombé en douceur. Un violet poussiéreux a cédé la place au bleu bateau. Une fraîcheur insoupçonnée monte de la terre. La résine des pins se fige sous l’écorce, les papillons ont fait leur valise, les rongeurs sortent les couverts. Une chouette hôle. »

    Quel râleur ce Paul Cézanne, mais quel peintre surtout, intransigeant, tout pour la vision.

    Peindre sur le motif, se tacher, être dérangé par les gosses, ou les gueuses, il faut vraiment en vouloir, et même ne vouloir que ça, une surface colorée composée de traits, et de pensée.
    Le vent en revanche, c’est bien, qui fait tanguer avec les arbres la palette, et propage le feu.

    Avec Trois jours dans la vie de Paul Cézanne, l’écrivain et guide-conférencier au musée des Beaux-Arts de Marseille Mika Biermann (50% de réduction si vous montrez cet article) imagine le destin du grand homme au contact du plus minuscule, et du crime.

    On peut peindre des pommes toute sa vie, ou une montagne, ou des baigneuses, mais attention la base est le crime, le suicide, les cris de désespoir dans la maison d’un pendu.

    Le genre humain ? une crapulerie.

    L’art ? une respiration, un intervalle, un écartèlement entre deux instants viciés.

    Chez Biermann, Cézanne, sale, désagréable, infect même, est désacralisé, et pourtant toujours aussi glorieux : c’est une sorte d’intouchable mais d’une caste plus haute que tous les petits soldats du néant occupant les places à responsabilité.

    La notabilité, l’artiste connaît, dont le père était banquier.
    Jeunes gens des écoles d’art, trouvez-vous vite pour créer en toute liberté une parentèle fortunée, ou, à défaut, inventez-la.

    Les artistes sont des clébards, oui, mais peut-être comme Boudu-sauvé-des-eaux renvoyant la pièce au gommeux cherchant à le subordonner par sa générosité.

    Ecoutons-le, on pourrait ne faire que cela.

    « Le peintre – appelons-le Paul – sort de son atelier et ferme la porte à clef. C’est un vieil homme à la moustache épaissie par la morve, à la barbe raide de graisse de mouton, à la corolle de cheveux blancs s’écartant des oreilles comme les orties s’écartent du chou-fleur, aux dents gâtées par l’insouciance du fumeur, aux yeux chassieux où les images du monde ne rentrent qu’à reculons. »

    A partir de maintenant, le peintre Paul Cézanne, supposons-le tel, s’appellera Peintre Paul.

    « Le sentier grimpe vers les crêtes, de rocher en rocher. Peintre Paul sue sous les couches de grosse toile, mais il n’enlève pas sa veste. Stoïque, comme Hannibal traversant les Alpes ou Burton à la recherche des sources du Nil. Tout au plus il sort son pénis pour arroser un roc d’urine. Les fourmis, agacées, détalent. Il remballe son engin, rajuste son barda et continue son ascension. »

    Il y a chez Mika Biermann une rage virtuose dans le maniement du verbe, qui touche au vif.

    […]

    La suite sur le site de Fabien Ribéry


  • V. Kirtov | 29 septembre 2016 - 17:17 3

    Parution : 22-09-2016


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    Deux grands artistes, l’un peintre, l’autre écrivain. Deux amis de toujours et pour toujours. Leur amitié a débuté en 1853 ou 1854, au lycée d’Aix, et résistera longtemps à l’éloignement. Entre Cézanne et Zola, ce ne fut pas seulement une forte complicité de jeunesse, de proximité géographique ou de milieu, mais un même choix de sujets, de communautés d’artistes, de refus des académismes et des conventions, une même compréhension de l’époque.
    Leur correspondance, publiée jusqu’ici séparément, n’avait jamais été rassemblée ni confrontée. Pourtant, ces cent quinze lettres – malgré les pertes et les années manquantes – témoignent de leur dialogue entre 1858 et 1887 : leur sens véritable ne réside pas seulement dans leurs allusions aux événements de la vie privée ou de la vie sociale de chacun, mais dans leur existence même, et dans les autres échanges qu’elles présupposent, dont la trace s’est perdue.
    Si John Rewald, le premier éditeur de la correspondance de Zola en 1937, a pu affirmer jusqu’ici que les deux hommes s’étaient brouillés à la suite de la publication deL’Œuvre– pour le critique, le personnage de Lantier et son échec représentaient Cézanne et le sien –, une nouvelle lettre retrouvée en 2013, postérieure à celle de la « rupture », vient remettre en question toutes les thèses établies. C’est sous ce nouvel éclairage rendu possible par la recherche littéraire qu’Henri Mitterand nous guide à travers l’œuvre picturale et l’œuvre romanesque des deux artistes.

    464 pages + 8 p. hors texte, 18 ill., 140 x 225 mm
    Achevé d’imprimer : 12-09-2016

    Crédit : http://www.gallimard.fr/

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    Leur rupture relève de la légende

    Pendant longtemps, la dernière missive connue entre les deux hommes datait de 1886, alors que Cézanne remerciait fraîchement Zola de l’envoi de L’Oeuvre (« Mon cher Emile, Je viens de recevoir L’Oeuvre, que tu as bien voulu m’adresser. Je remercie l’auteur des Rougon-Macquart de ce bon message de souvenir, et je lui demande de me permettre de lui serrer la main en songeant aux anciennes années ».)

    Il n’en fallait pas plus pour que l’on imaginât que le portrait que, dans L’Oeuvre, Zola donne d’un peintre maudit, raté, et sombrant dans la folie, ait déplu à son vieil ami, qui s’y serait reconnu, et que leurs relations aient alors cessé. La lettre retrouvée de 1887 - elle n’a été retrouvée qu’en 2013 - prouve qu’il n’en est rien, et que la légende des deux amis d’enfance brouillés à la suite du portrait que l’écrivain aurait fait du peintre ne tient pas la route. Rien ne dit qu’on ne découvrira pas, dans les années qui viennent, des témoignages de rapports d’amitié ayant perduré jusque dans les dernières années des deux artistes.

    Si leur rupture relève de la légende, leur amitié a, elle, été bien réelle. Il s’agit même d’un cas assez unique, un futur peintre et un futur écrivain qui se connaissent sur les bancs d’un collège de province, partagent de communes aspirations, et finissent par être reconnus, chacun dans son domaine, comme un Maître, et comme le chef d’une école. Le destin, parfois, joue de ces tours romanesques.

    Christophe Mercier
    Crédit : http://www.les-lettres-francaises.fr/

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    1867 : Zola défend son ami Cézanne dans Le Figaro

    Par Marie-Aude Bonniel, le 20/09/2016

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    Paul Cézanne, Emile Zola

    Alors que Le film Cézanne et moi, sort sur nos écrans le 21 septembre, et retrace l’amitié entre l’écrivain Émile Zola et le peintre Paul Cézanne, Le Figaro a été témoin d’un épisode de cette complicité, en 1867 lorsque Zola répond à une critique parue dans ses colonnes, et nous ouvre ses archives :

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    1867, les tableaux de Cézanne [déjà refusés en 1866] sont de nouveau refusés. Critiqué par le journaliste duFigaro, Arnold Mortier, plaisantant sur le nom de Cézanne, Émile Zola prend sa plume pour défendre son ami. Il écrit une lettre ouverte à Francis Magnard alors rédacteur en chef du journal le 12 avril 1867. Il entend affirmer sa propre conception de l’art : « La jeune école dont l’honneur de défendre la cause, se contente des larges réalités de la nature ».

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    Lettre ouverte d’Émile Zola parue dans Le Figaro du 12 avril 1867

    Correspondance

    À M. F. Magnard, rédacteur du Figaro

    Mon cher confrère,

    Ayez l’obligeance, je vous prie, de faire insérer ces quelques lignes de rectification.

    Il s’agit d’un de mes amis d’enfance, d’un jeune peintre dont j’estime singulièrement le talent vigoureux et personnel.

    Vous avez coupé, dans l’Europe, un lambeau de prose où il est question d’un M. Sésame qui aurait exposé, en 1863, au Salon des refusés, « deux pieds de cochon en croix » et qui, cette année, se serait fait refuser une autre toile intitulée Le Grog au vin.

    Je vous avoue que j’ai eu quelque peine à reconnaître sous le masque qu’on lui a collé au visage, un de mes camarades de collège, M. Paul Cézanne, qui n’a pas le moindre pied de cochon dans son bagage artistique, jusqu’à présent du moins. Je fais cette restriction, car je ne vois pas pourquoi on ne peindrait pas des pieds de cochon comme on peint des melons et des carottes,


    « Je n’ai jamais pu comprendre cette singulière méthode de critique, qui consiste à condamner et à ridiculiser ce qu’on n’a pas même vu »
    Émile Zola

    M. Paul Cézanne a eu effectivement, en belle et nombreuse compagnie, deux toiles refusées cette année : le Grog au vin et Ivresse. Il a plu à M. Arnold Mortier de s’égayer au sujet de ces tableaux et de les décrire avec des efforts d’imagination qui lui font grand honneur. Je sais bien que tout cela est une agréable plaisanterie dont on ne doit pas se soucier. Mais, que voulez-vous ? je n’ai jamais pu comprendre cette singulière méthode de critique, qui consiste à se moquer de confiance, à condamner et à ridiculiser ce qu’on n’a pas même vu. Je tiens tout au moins à dire que les descriptions données par M. Arnold Mortier sont inexactes.

    Vous-même, mon cher confrère, vous ajoutez de bonne foi votre grain de sel vous êtes « convaincu que l’auteur peut avoir mis dans ses tableaux une idée philosophique. » Voilà de la conviction placée mal à propos. Si vous voulez trouver des artistes philosophes, adressez-vous aux Allemands, adressez-vous même à nos jolis rêveurs français ; mais croyez que les peintres analystes, que la jeune école dont j’ai l’honneur de défendre la cause, se contente des larges réalités de la nature.

    D’ailleurs, il ne tient qu’à M. de Nieuwerkerke* que le Grog au vin et Ivresse soient exposés. Vous devez savoir qu’un grand nombre de peintres viennent de signer une pétition demandant le rétablissement du Salon des refusés. Peut-être M. Arnold Mortier verra-t-il un jour les toiles qu’il a si lestement jugées et décrites. Il arrive des choses si étranges.

    Il est vrai que M. Paul Cézanne ne s’appellera jamais M. Sésame, et que, quoi qu’il arrive, il ne sera jamais l’auteur de « deux pieds de cochon en croix. »

    Votre dévoué confrère,

    Emile Zola.

    * Emilien de Nieuwerkerke (1811-1892) est surintendant des Beaux-Arts à partir de 1863. Il joua un rôle capital dans la politique culturelle sous Napoléon III.

    Crédit : http://www.lefigaro.fr/histoire/archives/

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    CÉZANNE ET MOI – LE FILM

    Simultanément avec la publication des Lettres croisées, Danièle Thompson sort un film Cézanne et Moi, le 21 septembre 2016 - (1h 54min) sur l’histoire d’amitié entre Zola (Guillaume Canet) et Cézanne (Guillaume Gallienne). La critique est plutôt réservée sur la réalisation de Danièle Thompson et les performances des acteurs. Malgré ces jugements, partagés aussi par la critique Stéphanie Gatignol, elle poursuit : « Le lien ambigu de ces meilleurs ennemis reste, malgré tout, un sujet assez fort pour nous garder captifs […]. Quant à l’émotion, elle fonctionne parce que Thompson ne prend qu’un seul parti, celui des artistes dont elle nous rappelle l’immense fragilité,quelque égotiques et provocateurs soient-ils. »

    Bande annonce ICI

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