La Tribune libre accueille aujourd’hui Laurent Margantin, familier de pileface pour ses travaux de traduction et édition critique de Kafka, son grand œuvre, dont nous avons plaisir à relayer la progression comme aussi ses nouvelles incursions en littérature, ici avec ses « Carnets du nouveau jour »
Les Carnets du nouveau jour
Vient de paraître aux éditons Oeuvres ouvertes
"Alors qu’il est beaucoup question d’un « nouveau monde » - qui sera semble-t-il pire que l’ancien - j’essaye d’entrer chaque matin dans le nouveau jour par l’écriture du carnet. Entre décembre 2019 et juin 2020, il y a eu deux carnets : le premier s’ouvre sur un voyage en Australie, le second, celui d’un sédentaire, m’a servi comme le premier à noter des observations diverses sur le monde qui m’entoure ainsi que des passages de livres d’auteurs allemands que je traduis en les lisant. On pourra en effet entendre dans ces pages d’autres voix : celles d’auteurs comme Peter Handke ou Franz Kafka, mais aussi celles de « simples passants ». L’écriture du carnet ouvrant peut-être à ce qui sans lui serait resté non-vu, inentendu." (quatrième de couverture)
Extrait
[…] Les lumières de La Possession puis de Saint Denis depuis l’avion de nuit qui longeait la côte nord de l’île – comme un pays où j’arrivais pour la première fois.
Le plus souvent, regarder ne suffit pas, il faut aussi sentir, toucher (écorce, feuille, pierre, peau).
Une table et, de l’autre côté du mur, entre deux fenêtres ensoleillées, le vacarme de la circulation, le vacarme de toute une vie.
(Les passants sur le trottoir silencieux et invisibles.)
Et les nombreuses sirènes du boulevard tout au long de la journée (pompiers, policiers, ambulanciers) – présence sonore des blessés et des malades (eux aussi invisibles).
Nietzsche cité par Handke : « Des formules aux formes ».
Un chant d’oiseau quand le bruit est moins fort.
« Notre défi invisible, ce sont ces carnets écrits presque au jour le jour, des notes, des bouts de phrases, des dessins sur papier, admirateurs zélés de la vie qui passe, meurt, naît, ressuscite, s’efface, rejaillit, tremblante, démoniaque, heureuse. » (Joël Vernet, Carnets du lent chemin)
Le moteur au feu rouge – un bruit saccadé, frénétique. L’homme qui, devant la boulangerie, parle dans son portable – a le même rythme que le moteur.
La « réalité augmentée » : celle de tes cinq sens.
Installé sur le trottoir, un groupe de jeunes du quartier, l’un d’entre eux torse nu – attendant tranquillement la fin du monde (et la prochaine averse).
Traduire : compagnonnage ? Je ne peux arrêter de traduire K – d’avancer avec lui, dans le langage.
Époque des fins du monde : hier la guerre atomique totale, aujourd’hui le réchauffement climatique. Handke en 1983 (dans son journal de Salzbourg) : « Il me semble que c’est seulement maintenant, face à la menace de la fin du monde, que nous sommes si libres de parler la langue du monde, du soleil, des fleurs, des oiseaux, de l’air (ceci est littérature)
« Es geht weiter » : littéralement, « ça va plus loin » = « on continue ».
EXTRAIT COMPLET ICI avec lien pour commander
Le Verdict de Kafka
Bonjour,
Ma nouvelle traduction du Verdict est en ligne (Kafka a écrit ce récit dans le sixième carnet du Journal que je suis en train de traduire et de commenter) :
https://journalkafka.com/2020/06/12/journal-de-kafka-vi-61/
Une édition papier est maintenant disponible aux éditions Oeuvres ouvertes, comprenant deux autres récits du Journal ainsi qu’une introduction.
Le Verdict (Das Urteil) est un récit que Kafka a écrit en une seule nuit, celle du 22 au 23 septembre 1912, dans le carnet dont il se servait également pour l’écriture de sonJournal. Un jour plus tard, il évoquera cette expérience en ces termes : « J’ai écrit ce récit –Le Verdict– d’une seule traite, de dix heures du soir à six heures du matin, dans la nuit du 22 au 23. Je suis resté si longtemps assis que c’est à peine si je pus retirer de dessous le bureau mes jambes ankylosées. Ma terrible fatigue et ma joie, comment l’histoire se déroulait sous mes yeux, j’avançais en fendant les eaux ».
Cette histoire, c’est celle d’un jeune homme, Georg Bendemann, que son père va condamner à mort. En quelques pages d’un dialogue d’une violence inouïe, le sort du jeune homme est scellé.
En respectant les caractéristiques formelles du manuscrit, nous avons essayé de rendre la rapidité et l’intensité de cette expérience littéraire tout à fait nouvelle pour Kafka, lui ouvrant les portes d’une série d’autres récits, deLa MétamorphoseauProcès, écrits pendant les deux années qui suivront.
Deux autres récits également extraits du Journal permettent de comprendre l’évolution littéraire de Kafka jusqu’à ce tournant que représente la "nuit du Verdict".
Nouvelle traduction et présentation de Laurent Margantin.
Il est possible de la commander ici :
http://oeuvresouvertes.net/spip.php?article4190
Bien cordialement,
Laurent Margantin
Une édition critique du Journal de Kafka (2013-2023),
Abonnement Kafka 2020
Je propose aussi de recevoir les 3 nouvelles publications chez Oeuvres ouvertes : Le Verdict, les carnets 5 et 6 du Journal de Kafka
http://oeuvresouvertes.net/spip.php?article4189
VOIR AUSSI :
8 Messages
Bonjour,
On continue la publication en ligne du huitième carnet du Journal de Kafka avec ce passage sur l’oncle de Madrid :
https://journalkafka.com/2021/04/10/journal-de-kafka-viii66/
Les mises en ligne du Journal de Kafka auront désormais principalement lieu les week-ends.
Bonne lecture,
L.M.
www.journalkafka.com
Je me permets de vous signaler une nouvelle mise en ligne sur www.journalkafka.com.
Un court récit de juin 1914 dans le septième carnet du Journal que je suis en train de traduire, court récit que je trouve particulièrement magnifique et que je vous invite à lire en ce début d’année 2021 :
Bien cordialement,
L.M.
Mise en ligne d’un passage du Journal de Kafka assez particulier, avec l’évocation du dessinateur Alfred Kubin, du collectionneur Anton Max Pachinger et du poète Karl Wolfskehl.
Cordialement,
L.M.
J’ai réalisé une présentation des six premiers carnets du Journal de Kafka traduits par mes soins sur une seule page - présentation à la fois chronologique et thématique :
Avec ces six carnets, ce sont 500 pages de l’édition allemande originale qui sont d’ores et déjà traduites, auxquelles s’ajoutent une centaine de pages d’appareil critique. (prix promotionnel jusqu’au 31/12/2020)
En vous souhaitant dès maintenant de bonnes fêtes de fin d’année !
Cordialement,
L. M.
Bonjour,
Le sixième carnet du Journal de Kafka vient de paraître en livre papier.
Le sixième carnet s’ouvre sur ces mots : « pour la première fois depuis quelques temps échec complet quand j’écris. Le sentiment d’un homme mis à l’épreuve. » En mai 1912, Kafka travaille à une première version de son roman Amérique, mais c’est un échec, il détruira le manuscrit. Pendant plusieurs semaines, il se plaint régulièrement de ne pouvoir écrire et se montre insatisfait d’anciens textes qu’il rassemble sous la pression de Max Brod pour en faire un mince volume (Contemplation) qui paraîtra aux éditions Kurt Wolff. Jusqu’à cette nuit du 22 au 23 septembre lors de laquelle il écrit le récit Le Verdict qui peut être considéré comme le véritable acte de naissance de l’écrivain – dans le septième carnet, il écrira en effet : « L’histoire est sortie de moi comme une véritable naissance couverte de saleté et de mucus ». Kafka enchaînera avec l’écriture du premier chapitre d’Amérique, « Le Chauffeur », également dans ce sixième carnet. On voit que le Journal de Kafka est bien plus qu’un journal intime, c’est un laboratoire littéraire où l’œuvre s’écrit sous nos yeux.
On peut commander ce sixième carnet ici : http://oeuvresouvertes.net/spip.php?article4198 (les adhérents de l’Association des lecteurs du Journal de Kafka bénéficient d’une remise de 30%).
Rappelons qu’il est possible de recevoir les trois dernières traductions de Kafka aux éditions Oeuvres ouvertes sous la forme d’un abonnement (à un prix particulièrement avantageux pour les adhérents de l’Association des lecteurs du Journal de Kafka).
Bien cordialement et à bientôt,
L. M.