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Dé-coïncider d’avec François Jullien ?

par Daniel Bougnoux

D 7 décembre 2023     A par Albert Gauvin - C 0 messages Version imprimable de cet article Version imprimable    ................... PARTAGER . facebook


Dé-coïncider d’avec François Jullien ?

Publié le 6 décembre 2023 à 16h32

Je lis depuis plus de trente ans les livres de François Jullien, j’ai défendu avec chaleur la plupart d’entre eux dans des colloques ou sur ce blog : François m’a décidément orienté, et sa pensée aura recadré et stimulé la mienne. J’ai coutume de le présenter comme le meilleur philosophe français de notre époque, par sa façon, décisive, d’avoir fait le détour ou l’écart par la Chine, qui nous désenlise de nos routines intellectuelles, qui remet notre culture en perspective… Et puis, sa langue sans jargon excessif (mais sans tomber non plus dans la facilité) lui procure un très large public, en français comme dans les très nombreuses traductions de ses quelque quarante ouvrages.

Et puis encore, à la tête du Collège de philosophie, puis des cycles de conférence à la BNF, puis aujourd’hui de l’association Dé-coïncidences, par son goût du débat qu’il ne cesse d’animer, de provoquer ; cette pensée généreuse, toujours en mouvement, cherche la nôtre et nous convoque.

Une prochaine rencontre avec lui se tiendra mardi 12 décembre prochain, au centre Jules-Vallès de Paris (72 avenue Félix-Faure, 75015), à 19 h. Je m’y rendrais si je n’étais retenu, comme trop souvent, dans ma lointaine province.

En voici le résumé d’introduction diffusé par l’Association :

« Il est une menace dont tout le monde s’émeut – à juste titre – parce qu’elle est spectaculaire : la Terre se réchauffe et la vie pourrait s’y tarir. Mais il en est une autre qu’on évite de remarquer. Cela parce qu’elle touche à l’invisible et nous implique peut-être encore davantage – d’ailleurs comment la nommer ?

Ses effets cependant sont des moins contestables : « d’un clic », on croit que tout est à portée, qu’il n’y a plus à accéder. Ou l’on fait du Livre un « produit » comme un autre. L’écran fait écran et l’événement de la présence est perdu. Et, d’abord, les médias distillent leur coïncidence idéologique à notre insu.

Ne sommes-nous pas en train de devenir des sujets inertes sans plus d’élan – d’essor – qui nous mobilise ?

J’ai choisi de nommer de l’« esprit » cette autre perte qui nous menace. Et donc, à l’encontre de la vie qui ne vit pas, de la non-vie menaçant nos vies, d’appeler à la défense et l’illustration de l’« esprit », une fois celui-ci décapé de tout spiritualisme.

Dans le monde de la Connexion généralisée, de la Communication et de la Consommation gérées par le numérique, où font loi la Commodité et le Marché, quel écart et quel espacement reste-t-il encore où de l’esprit puisse se déployer ?

Or rien ne sert de dénoncer cet état de fait et le renverser est impossible.

Mais j’appelle à en dé-coïncider : en fissurant la chape invisible sous laquelle nos vies se laissent enfermer. » FJ

Cet argument résume le contenu d’un livre paru en septembre dernier aux éditions de l’Observatoire, Raviver de l’esprit, Un diagnostic du contemporain, que je suis en train de lire, et de relire. Non sans humeurs ni élans intimes de protestation. Il faut donc pour de bon débattre ou, comme on lit chez Racine, « Voici le temps enfin qu’il faut que je m’explique » !

En marge de ce qui arrive à la diversité biologique, et de la dégradation de notre Terre, François Jullien pointe donc une autre perte, plus insidieuse ou moins facile à cerner, qu’il appelle très justement « de l’esprit », en laissant flotter à dessein tout ce que ce mot peut rassembler de précieux, de fragile, tout ce qu’il évoque de ressources dont, en effet, nous pouvons ressentir le manque, ou la progressive déperdition.

N’hésitant pas à recourir aux exhortations du militant, l’auteur s’engage et nous presse de mieux comprendre comment, au nom du progrès lui-même, et grâce aux facilités nées de la communication numérique, nous mettons notre propre culture dans un danger peut-être fatal. Connexion, Consommation, Communication, les majuscules dans le texte que je viens de citer désignent assez ce qu’il s’agit de combattre, et comment réagir. Ces grands mots nous endorment, nous enlisent, contre eux Jullien voudrait redonner de l’élan – à l’esprit !

À ce niveau de généralité, on ne peut qu’être d’accord. Et nous avons tous l’expérience d’un spectacle, d’un livre, d’un talk-show télévisé…, qui au nom de l’audience, du profit, du marché, massacraient les chances même d’émergence, ou de survie – de l’esprit. J’en citerai pour ma part un indice récent, la reprise en novembre dernier, à la Seine musicale de Boulogne-Billancourt, de l’opéra-rock Starmania. Je ne connaissais pas cette œuvre, à laquelle Odile voulait absolument que nous assistions, elle m’en fredonnait quelques airs, elle en connait l’intrigue et plusieurs passages par cœur… Et en effet, Michel Berger et son complice québécois ont, dans les années soixante-dix, concocté une partition au lyrisme doux-amer, teintée d’un romantisme qu’il fait bon se murmurer à l’oreille. Ses personnages sont émouvants, ils ont encore aujourd’hui des choses à nous dire…

Las, à l’échelle de la gigantesque salle faite pour accueillir peut-être douze-mille spectateurs (et pleine à craquer ce dimanche), la mise en scène de Thomas Jolly (que j’ai connu pour ses représentations des pièces historiques de Shakespeare, et dont en 2016 j’avais défendu ici même le Richard III), le fringant Thomas Jolly donc nous assénait un show tonitruant, où le visuel autant que l’audio recherchaient avant tout le choc : explosions des lasers balayant la scène et la salle, bombardement des enceintes à nous fracasser les tympans (étions-nous mal placés ?), hystérie générale des costumes, des mouvements, bref une expérience éprouvante d’où tout esprit, à mon avis, avait fui – mais l’accueil enthousiaste du public, au moins dans sa partie jeune qui n’avait pas connaissance de l’œuvre originale, démentira évidemment mon jugement, en me classant parmi les vieux cons…

J’endosse ce reproche, je veux bien qu’on me trouve grincheux, quand je ne fais qu’attirer l’attention sur ce que, par excès de moyens techniques ou par une fausse idée de la richesse, nous perdons. Car less is more ; tandis que more is gore

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Publié le 8 décembre 2023 à 12h11

J’ai dit à quel point le dernier livre de notre ami me paraissait important : il l’ouvre en y mettant en parallèle deux pertes, également dûes aux mauvais usages (ou à la démesure) de nos outils techniques, les dégâts infligés à la biodiversité et le réchauffement climatique d’une part, et d’autre part cette transformation elle aussi d’abord silencieuse, l’érosion ou la liquidation insidieuse entre nous de l’esprit.

Dans les deux cas, un gain apparent, de confort ou de commodité technique, s’est retourné en perte. Or les deux phénomènes sont étroitement corrélés, car cette menace (ou cette évidence) d’une dégradation de la vie sur Terre s’applique justement à cette notion floue mais si cruciale d’esprit ; que vaudrait en effet une vie humaine qui ne serait pas d’abord ou également une « vie de l’esprit » ?

Parmi les soutiens ou les piliers de cette vie, François Jullien isole dès son chapitre 2, et à raison, le Livre (mettons-lui sa majuscule), indispensable ferment et vecteur de notre culture. Mais je ne peux lire ce chapitre sans y découvrir, au-delà d’un premier et large à accord (oui, la vie du Livre entre nous décline), plusieurs points de divergence.

FJ déplore à juste titre, et ce constat est devenu lieu commun, l’érosion de ce que nous appelons autour de Régis Debray la graphoshère. Brutalement dit, le remplacement des écrits par les écrans. Il suffit de traverser un wagon de TGV pour voir la plupart des passagers plongés non dans un livre (c’est le cas en général des têtes blanches), mais dans (ou devant) un écran, tablette, smartphone ou ordinateur. Notre époque ne vérifie donc pas le vœu de Mallarmé, cité page 32 et dont j’ai fait moi-même grand usage dans mes cours, déclarant que « le monde est fait pour aboutir à un beau livre ».

Mais qu’est-ce qu’un beau, ou un grand, un « vrai livre » ? À l’opposé de tous ces non-livres, confessions de footballeurs, de vedettes du show-biz ou de recettes du bien-être, cette encombrante littérature du développement personnel (DP) qui dans les mauvaises librairies prolifèrent en vitrine, reléguant les livres qui comptent aux dernières places ? Car le mal est profond, au point que FJ se demande si des pavés exigeants comme L’Être et le néant de Sartre, ou la Phénoménologie de la perception de Merleau-Ponty, trouveraient seulement aujourd’hui un éditeur ? J’ai posé la même question touchant le roman d’Aragon La Semaine sainte, classé lors de sa parution (en 1958) parmi les dix meilleurs romans du XX° siècle dans notre langue. Avons-nous parmi nous tellement de lecteurs à la hauteur de pareils monuments ?

Non, et nous ne pouvons que nous accorder sur ce constat : un « livre exigeant » (comme on disait par pléonasme dans un ordre désormais ancien), un livre qui nous affronte au non-dit, voire à l’indicible, à l’infini, est devenu une fâcheuse contradiction dans les termes. Un livre aujourd’hui doit se vendre vite, et pour cela épouser la vulgate, la rumeur ou l’air du temps. Un journaliste n’aimera pas faire l’effort de lire au-delà de vingt pages un livre qui exige quelque concentration, ou dé-coïncidence dans la pensée, il fuira spontanément ce qui excède ou bouscule sa « zone de confort ». Et il est donc malheureusement vrai que la plupart des livres (sans majuscule) ne sont que des opérateurs de lissage, de reconnaissance narcissique ou de divertissement, ils flattent en nous la meute ou la doxa, ils ne nous font en rien dé-coïncider. Dont acte, l’affaire est entendue, et nous lisions déjà ce requiem dans Le Pouvoir intellectuel en France de Régis Debray (1978).

Quels seraient les contre-feux ou les freins appliqués à cet irrésistible déclin ? La « longue traîne » comme disent quelques libraires ; les bibliothèques aussi, qui devraient combattre le marché en mettant en valeur ce qui se vend mal. Hélas, FJ relève avec raison l’avis de ces bibliothécaires qui, dans leurs « désherbages », suivent les tendances de l’économie au lieu de s’y opposer : il leur paraît naturel d’éliminer les titres peu consultés, alors qu’il conviendrait au contraire de les trier et d’en promouvoir certains, de corriger la paresse dominante au lieu de l’épouser…

Qualifier d’exigeant un livre passe pour un reproche ; chez un éditeur, on demandera à l’auteur impétrant de ne pas snober son lecteur, de se remettre à son niveau. Vieille querelle ! Mais dépassons cette critique usée pour en venir à l’essentiel : FJ incrimine les écrans qui dégraderaient sans retour l’écrit, jouer avec nos clics (si commodes) annulerait la profondeur, le différé, l’attention studieuse ou nos capacités d’attente. Plus généralement, nos écrans seraient des facteurs, nuisibles, de dépolarisation de l’attention, de dispersion, de frivolité. Alors que la lecture nous impose de suivre un fil, la sarabande des pixels et le Niagara des offres de textes, d’images, de musiques mêlées briserait ce qu’il s’agit de préserver pour édifier notre culture…

J’ai pratiqué durant plus de vingt ans les études d’information et de communication, ou aux côtés de Régis ce que nous appelions la médiologie, pour m’écarter de ces constats ou de ces actes de décès trop sommaires. Non, l’écran n’a pas tué l’écrit, ni évidemment LA culture ! On y fait des rencontres tout aussi saisissantes que dans la bibliothèque ; le développement des « humanités numériques » a nourri un nombre désormais incalculable de colloques, de livres (parmi lesquels ceux de Dominique Cardon, qu’il conviendrait ici d’examiner), et l’exigence intellectuelle n’est pas moindre du côté d’une culture des écrans, pourquoi ainsi les endiabler, les vouer aux gémonies alors qu’ils sont au cœur de nos pratiques, et nous rendent tant de services ?

Une critique sommaire de la numérosphère ralliera sans peine tous ceux que la fracture numérique inquiète, et qui n’ont pas pris le tournant. Le livre et les conférences de FJ, par conséquent, rencontreront de ce côté du public une approbation facile – mais que je ne soutiendrai pas. Je ne prendrai qu’un exemple, la difficulté aujourd’hui d’éditer un livre : je m’efforce depuis plus de douze ans de contourner cet obstacle bien réel par le recours à ce blog, qui n’est pas je l’espère tout-à-fait vide d’esprit, et qui constitue à mon avis une bonne réponse au déclin ou aux embarras de la graphosphère. Sur mon blog je redeviens libre d’éditer, je choisis au gré des circonstances les thèmes de mes billets, je pouvais même (avant que La Croix ne me l’interdise pour cause de droits) assez plaisamment les illustrer… Et surtout le lecteur peut à tout moment y intervenir, une certaine interactivité (moins évidente dans le cas du livre) semble permise. En bref, l’écriture numérique et les pages-écrans, bien différentes en effet des pages-papier, ne précipitent pas la fin de la culture, au contraire !

Cette relève (du papier par le tournant numérique) continue de faire l’objet de trop d’études pour que je m’y attarde ici ; mais il y a de l’esprit du côté des NTIC (Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication) et je ne voudrais pas avec Finkielkraut, assez souvent Debray et aujourd’hui Jullien aggraver cette déploration.

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Je m’avise, écrivant sous ce titre, d’un amusant paradoxe : si je décoïncide d’avec (et non avec, nuance de taille) François Jullien, je me conforme au maître-mot de ses derniers ouvrages, et donc je le rejoins ; mais si je le rejoins, il me faut derechef m’écarter de lui… Nous tournons dans le cercle d’Epiménide le Crétois !

Ou plus simplement posé : il n’est pas aisé de critiquer ce dernier livre, et je ne suis pas sûr qu’une discussion avec l’auteur viderait notre querelle. J’argumente ici contre une méconnaissance trop flagrante des ressources (autre maître-mot de notre philosophe) nées du « tournant numérique » ; des tonnes de publications depuis quelques décennies ont examiné celui-ci sous bien des angles (techniques, médiatiques, psycho-sociologiques, culturels, anthropologiques…), avec le souci d’en traiter moins en termes de remplacement (« Ceci tuera cela », l’écran remplace l’écrit du livre ou de l’imprimé) qu’en termes de co-existence, d’hybridation ou de compromis. De même les diatribes adressées au virtuel ratent leur cible, si l’on ne commence pas par poser que le virtuel n’est pas le contraire du réel, mais plutôt du factuel ou de l’actuel. À partir de quoi une riche typologie s’ouvre des degrés ou des effets de présence, quand en général celle-ci compose avec le préfixe télé (télé-travail, télé-présence, distanciel, différé, etc.).

Il serait fastidieux de redresser chapitre par chapitre les affirmations de ce livre ; le troisième, « La perte de la présence », suffira à borner ici notre discussion.

La notion de présence est en effet remaniée, ou retravaillée, par les nouvelles technologies comme elle l’était séculairement déjà par le théâtre, la peinture, la photographie, le téléphone ou le cinéma…, chaque innovation technique créant un saut médiologique qui élargit notre expérience de l’espace et du temps. « C’est la vie même ! » ont pu s’écrier les spectateurs d’un portrait peint par Rembrandt, ou Titien, admiration redoublée devant ceux produits par la photographie ; mais que dire du cinéma qui reconstitue sous nos yeux le mouvement, au point que devant le « Train entrant en gare de la Ciotat », l’une des premières bobines des Frères Lumières projetée au Café de la Paix, le public se couchait de terreur sous les tables ?

« La présence est la seule déesse que j’adore », déclarait Goethe cité page 67, et ce mot magnifique fait écho pour moi à l’exclamation prêtée par Aragon à Aurélien, à propos de ses rencontres avec Bérénice, « Quelle chose extraordinaire que la présence ! ». Cette expérience de la présence est très subjective, puisqu’un délirant croira à ses hallucinations, un persécuté à la proximité dans son dos de ses poursuivants… Un catholique parle de même de présence réelle pour celle du corps du Christ dans l’hostie ; et que dire de la présence des morts, qui hante la conscience de l’endeuillé (et adoucit sa peine) longtemps après la disparition ? De même, la lecture d’un bon roman peut nous absorber au point de nous rendre la vie de ses personnages plus intime ou désirable que celle des habitants de notre toit… Etc.

En bref, nous ne nous contentons jamais d’habiter ici et maintenant ; si bien qu’il n’est pas vrai d’écrire (page 56) que l’être en réseau a défait « l’être au monde », nous dirons plutôt qu’il l’a ramifié, et complexifié. Par les ruses du rêve, de l’imagination, ou de mille et un artifices techniques nous ne cessons d’élargir cette expérience, c’est-à-dire d’ex-sister, soit de nous rendre présents sur plusieurs champs simultanés d’opération, ou éveillés et disponibles à divers degrés de présence.

À la question que François Jullien tranche négativement, page 59, « Et surtout, si l’on peut télé-travailler, pourra-t-on télé-vivre ? Et si l’on peut télé-consommer, peut-on télé-éduquer, et télé-aimer ? », j’avancerais des réponses beaucoup plus nuancées : le télé-enseignement n’est pas à négliger, et surtout les amoureux contrariés ou empêchés de s’unir physiquement connaissent les ressources de la correspondance, du téléphone ou des flux vidéo…

Jullien a raison, décortiquant l’expérience de la présence, de souligner qu’elle implique une surprise, voire un heurt ou un choc. Une présence advient, elle constitue un événement. Les trois exemples qu’il prend de nos façons de nous en protéger sont en effet parlants : les couples amoureux qu’on voit, à la table du restaurant ou dans la voiture, fuir la présence de l’autre pour s’isoler dans la lecture de leurs mails ; les touristes pressés qui, descendus du car au « point Kodak », photographient docilement le paysage au lieu de le contempler, ou d’en faire un plus longuement la connaissance, la riche expérience ; les étudiants qui préfèrent enregistrer votre cours ou votre conférence plutôt que de la prendre en notes…, toutes façons de contourner un face-à-face dans ce qu’il peut avoir d’exigeant, d’astreignant, de le différer ou de le remettre à plus tard. Façons de ruser avec l’altérité, d’en éviter les rigueurs.

C’est évidemment le rôle majeur des médias d’enregistrer et de remettre à plus tard, ou de télé-transmettre en direct mais toujours à bonne distance, de manière à nous épargner le choc ou le traumatisme des événements tels qu’ils arrivent sur le terrain. Le concept de différance, forgé par Derrida, s’appliquerait bien à tout ceci, et il faudrait le confronter avec celui de décoïncidence. Dans Echographies de la télévision, Derrida généralisait son propos en déclarant (à Bernard Stiegler et bien avant l’essor et les développements de notre tournant numérique) que notre époque allait devenir de plus en plus spectrale – sans en tire la conclusion négative d’une perte de la présence, ou pire de l’esprit. Au fait et si ce dernier mot désigne, aussi, le spectre, nous apprendrons selon Derrida à nous mouvoir de mieux en mieux parmi les esprits.

Il semble clair que Derrida et Jullien ne disent pas la même chose.

Le randonneur

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