Entretien Patricia Boyer de Latour - Dominique Rlolin
P.B.L. : Au début de <Passion fixe de Philippe Sollers, il y a une évocation splendide et très lumineuse du rire de Dora
et, là, on ne peut pas s’empêcher de penser à vous, même s’il s’agit bien sûr d’un personnage de roman :
« Son rire commence à se distinguer pour moi de tous les autres, je n’ai jamais entendu quelqu’un rire comme ça, d’une seule coulée, cascade de gorge venant de derrière la tête, un rire de dos, retourné, de profil, du bas et du haut, un vrai rire de joie sans raison, un rire pour être présente, simplement, et que tout le reste s’en aille [1] ? »
Et dans votre Journal amoureux, vous parlez du « sexe du rire », cette disposition joyeuse à communiquer ses émotions d’une manière à la fois enfantine et libre, lorsqu’on est heureux dans l’amour.
D.R. : Ah oui ! Sans gaieté, il n’y a pas d’amour. [...]
P.B.L. : Il y aurait donc quelque chose de l’enfance à préserver dans l’amour par le rire.
D.R. : C’est probablement ça, le secret. (Sourire.) Que c’est bon de rire ! Je n’ai jamais analysé cela, mais on se sent tout à coup en accord avec le monde entier. Il n’y a plus de haine autour de soi... On se sent en situation de bonté. Un rire échangé avec quelqu’un, c’est comme une sorte de baiser à distance.
Picasso
Nu dans un jardin (détail)
Succession Picasso
Sollers qui a déstructuré, un temps, ses textes, comme Picasso, ses tableaux,
Sollers qui reste un admirateur de Picasso, et en illustre régulièrement ses couvertures de la collection Folio, le dos de sa revue l’Infini, aussi. Passion fixe !
[1] Editions Gallimard, 2000, p. 39.
1 Messages
> Le "sexe du rire", eya | 28 avril 2007 - 08:42 1
ce roman est une révélation, on assiste à un enivrement jubilatoire qui exploite les mots afin de mettre en avant la force du désir sexué, je pense que les pages ne sont plus un espace mais au contraire un magma !