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Sollers, ultime et… en suspens

OLJ / Par Josyane Savigneau, le 06 juin 2024

D 6 juin 2024     A par Albert Gauvin - C 2 messages Version imprimable de cet article Version imprimable    ................... PARTAGER . facebook



Philippe Sollers en 1983.
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Philippe Sollers est mort il y a un an, le 5 mai 2023. Il avait commencé ce livre, La Deuxième Vie, désormais inachevé, en 2021, plusieurs mois avant d’être malade – en juillet 2022. Comme toujours, il n’avait pas révélé le titre – donc on ne saura pas si c’était celui-ci –, mais il disait travailler sur «  les corps glorieux  », dont il se plaisait à rappeler les qualités  : «  impassibilité, clarté, agilité, subtilité  ».

Avant même la maladie, Sollers disait ne plus avoir la force de taper son texte, écrit à la main, sur sa vieille machine qu’il aimait tant et dont il a toujours refusé de se séparer. Il le dictait donc, puis le corrigeait. En lisant La Deuxième Vie, on voit bien qu’il n’a pas eu le temps de le faire pour tout le texte, et qu’il reste une partie de «  premier jet  ». Mais on entend partout sa voix, si vivante, sa «  main claire  », comme le dit Yannick Haenel dans la quatrième de couverture. On retrouve son humour, la critique sociale qui l’a toujours animé, et sa manière de procéder, parfois par aphorismes ou citations cachées, comme cet hommage à Rimbaud, dont la lecture l’a accompagné toute sa vie. «  Le caractère le plus inattendu de l’éternité est donc la vivacité. C’est d’un mouvement vif que la mer se mêle au soleil.  »

La Deuxième Vie est la suite logique de Désir (2020), Légende (2021), Graal (2022), des textes brefs – comme le sont les derniers Philip Roth –, petits traités de résistance à l’air du temps, derniers témoins d’une œuvre liée, d’une certaine manière, au combat spirituel – ce qui ne signifie pas religieux. Ce n’est «  pas une lubie de vieillard sous morphine  », écrit Sollers  ; ce n’est «  pas une résurrection, ni même une postérité  »  ; cela «  n’a rien à voir avec la religion  ».

Le texte se déploie désormais entre deux phrases. La première  : «  J’aime les insomnies de trois heures du matin, les plus dures, les plus inquiétantes, les plus éclairantes. C’est tout de suite, en sursaut, le choix entre la vie et la mort.  » La dernière  : «  Si le néant est là, il est là, en train de voir le monde éclairé par un soleil noir.  » La plupart de ceux qui ont écrit sur ce texte semblent y voir une conclusion. C’est oublier que seule la mort a fait de cette phrase une fin. On peut aujourd’hui y voir un symbole, bien sûr, mais toute l’œuvre de Sollers est là pour affirmer que la phrase ultime n’aurait pas été celle-ci. Car il ne faut pas oublier l’épigraphe, de Sade, choisie par Sollers  : «  Le passé m’encourage, le présent m’électrise, je crains peu l’avenir.  »

Comme le précise encore Yannick Haenel en présentant le livre  : «  Il médite sur la mort, mais son cœur s’élance avec une ivresse calme, avec drôlerie aussi, vers ce qu’il appelle la Deuxième Vie.   » Au fond, elle est là, chez lui, depuis toujours, mais peut-être seulement si on est pourvu d’un corps glorieux. Cette Deuxième Vie est celle qui «  tranche, c’est tout, et seul l’avenir dira en quel sens  ». Donc, on verra. Pour l’heure, suivons plutôt quelques précieux conseils, donnés dans ces pages où tout est concentré, comme peut-être dans une longue insomnie de trois heures du matin  : «  Il poursuit donc sa mission, dont il ne saurait dire le nom, à part quelle force lui a été confiée dans une première vie orageuse, avec une ponctuation très intime.  » « Il faut vite saisir la vie malgré ses brûlures, car la mort est trop longue et désespérément ennuyeuse. La mort est une condamnation éternelle à l’ennui.  » La lecture de Sollers, de ce livre et des autres, mène toujours vers le désir de vie, de pensée et de liberté.

L’Infini poursuit l’aventure

La revue que dirigeait Philippe Sollers, L’Infini, et la collection du même nom, s’interrompent, ce qui est légitime. Mais comme Sollers le souhaitait, l’aventure continue. Et, Aventures est le nom qu’a donné Yannick Haenel à sa revue, dont le premier numéro a paru en avril chez Gallimard. Il y aura deux numéros par an. Et Yannick Haenel crée aussi une collection du même nom.

La Deuxième Vie de Philippe Sollers, Postface de Julia Kristeva, Gallimard, 2024, 280 p.

L’Orient littéraire, 6 juin 2024.

LA DEUXIÈME VIE SUR PILEFACE

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