Courrier International, 16/07/2022




ISS.
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Les États-Unis et la Russie ont annoncé la reprise de leurs vols conjoints vers la Station spatiale internationale (ISS), en dépit des tensions entre les deux pays depuis la guerre en Ukraine. Moscou a par ailleurs démis de ses fonctions le patron de l’agence spatiale russe, habitué ces derniers mois des déclarations belliqueuses.
Le secteur spatial semble être le dernier où Russes et Américains sont encore capables de s’entendre. Après quelques mois de valse-hésitation, la Nasa et Roscosmos ont annoncé vendredi que deux astronautes américains voleraient prochainement à bord de fusées russes Soyouz, tandis que deux cosmonautes russes rejoindraientl’ISS à bord de fusées SpaceX.
“Les Russes et les Américains ont maintenu leur étroite coopération en orbite, malgré la rupture entre les deux pays après l’invasion de l’Ukraine par la Russie en février dernier”, remarque le New York Times. Cependant, l’incertitude régnait sur les prochains vols conjoints entre les deux pays, prévus de longue date, mais que la Russie tardait à valider.
Mais les vols vont bel et bien reprendre : le 21septembre, l’astronaute américain Frank Rubio s’envolera vers l’ISS à bord d’une fusée Soyouz, tandis que le même mois – à une date encore indéterminée –, Anna Kikina, la seule femme cosmonaute en activité, rejoindra la station avec une fusée de SpaceX, l’une des entreprises d’Elon Musk. Deux autres vols conjoints suivront en 2023.
Le New York Times souligne que la coopération russo-américaine avait même survécu aux“déclarations belliqueuses répétées” du patron de Roscosmos, Dmitri Rogozine. Ce dernier avait notamment réclamé en avril dernier“la levée des sanctions contre la Russie, et avait exhorté le gouvernement russe à quitter la Station spatiale”, rappelle le quotidien new-yorkais.
M.Rogozine a été appelé vendredi à d’autres fonctions, et sera remplacé par Iouri Borissov, 65ans, qui avait jusqu’alors le portefeuille de vice-Premier ministre chargé du complexe militaro-industriel russe. Le Kremlin a assuré que le départ de M. Rogozine n’était lié à aucun“problème”particulier.
La Russie a perdu le monopole sur les envois d’astronautes vers l’ISS en 2020, quand les États-Unis ont mis en service les fusées de SpaceX.
Notons que le 4 juillet encore, la propagande russe contre l’Ukraine dans l’ISS irritait la Nasa, qui la « condamnait fermement »

© Fournis par Numerama
Roscosmos Telegram, 4 juillet

L’espace, un environnement de coopération internationale et d’expression des intentions pacifiques des nations ? Pas toujours : c’est aussi le lieu où peuvent se manifester nationalisme, rivalité stratégique et communication politique. La preuve : dernièrement, c’est la Russie qui a été accusée de se servir de la Station spatiale internationale (ISS) pour de la propagande.
À l’origine du problème, la publication sur le compte Telegram de Roscosmos — l’agence spatiale russe — de deux photographies montrant les cosmonautes Denis Matveïev, Oleg Artemiev et Sergueï Korsakov tenant des drapeaux ressemblant au drapeau russe. Sauf qu’il s’agit des couleurs des deux régions séparatistes d’Ukraine, Lougansk et Donetsk.
Les Républiques populaires de Lougansk et Donetsk ont annoncé faire sécession de l’Ukraine en 2014. Sur le plan international, pratiquement aucun pays ne reconnaît leur souveraineté, hormis la Russie. […]. Ce soutien du Kremlin est perçu comme un prélude à une annexion.
Les photos sont accompagnées d’un texte en russe dont la teneur générale est une célébration de la « libération » de l’ensemble du territoire de Lougansk, avec le retrait des forces ukrainiennes de la ville clé de Lyssytchansk. Les trois cosmonautes et Roscomos disent adresser leurs félicitations aux sécessionnistes, en rupture avec Kiev depuis huit ans maintenant.
V.K.
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La Russie va arrêter de participer à la Station spatiale internationale (ISS) « après 2024 », a annoncé mardi le nouveau patron de l’Agence spatiale russe (Roscosmos), Iouri Borissov.
la Station spatiale internationale (ISS) au dessus de la Terrre PHOTO AFP
« Nous allons sans doute remplir toutes nos obligations à l’égard de nos partenaires » de l’ISS, a déclaré M. Borissov lors d’une rencontre télévisée avec le président russe Vladimir Poutine, « mais la décision de quitter cette station après 2024 a été prise ».
« Je pense que d’ici là, nous commencerons à créer la station orbitale russe », qui sera « la principale priorité » du programme spatial national, a-t-il ajouté.
« L’avenir des vols habités russes doit se baser avant tout sur un programme scientifique systémique et équilibré pour que chaque vol nous enrichisse en connaissances dans le domaine spatial », a-t-il précisé.
Nommé à la tête de Roscosmos à la mi-juillet, Iouri Borissov a remplacé Dmitri Rogozine, connu pour son style abrasif et son nationalisme outrancier.
Jusqu’à cette nomination, M. Borissov, 65 ans, avait le portefeuille de vice-Premier ministre chargé du complexe militaro-industriel russe, qui inclut aussi le domaine spatial.
Space X, la guerre et les sanctions
« C’est un grande honneur pour moi, mais aussi des obligations supplémentaires », a déclaré M. Borissov devant M. Poutine.
« Le domaine spatial est dans une situation difficile, et je pense que ma tâche principale (...) est de ne pas faire tomber la barre, mais de la placer plus haut, en fournissant avant tout les services spatiaux nécessaires pour l’économie russe », a-t-il souligné, en citant notamment la navigation, la communication et la transmission des données.
En 2020, la Russie avait perdu le monopole des envois dans l’espace (avec ses lanceurs et vaisseaux Soyouz vieillissants mais fiables) avec l’arrivée sur scène de SpaceX du milliardaire Elon Musk.
La coopération russo-occidentale dans le domaine spatial a aussi été plombée par l’offensive lancée par la Russie depuis le 24 février contre son voisin ukrainien. Les sanctions occidentales prises contre la Russie en raison de cette offensive touchent en partie l’industrie aérospatiale russe et risquent d’avoir des effets sur l’ISS, dont certains ravitaillements pourraient être perturbés.
Enfin, le secteur spatial russe est gangréné depuis des années par la corruption et le manque d’innovations.
AFP, Le Point, La Voix du Nord