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orgasme - Rodin érotique

D 12 juin 2007     A par Viktor Kirtov - C 10 messages Version imprimable de cet article Version imprimable    ................... PARTAGER . facebook


Droit au logement, droit à l’orgasme, après avoir été ignoré ou tabou, le droit devient devoir, la nouvelle liberté devient asservissement pour se conformer aux nouveaux modèles tels que la ligne, la forme, l’orgasme, la jeunesse prolongée ...la vieillesse et la mort banies.

Au moment où les idées de Mai 68 sont remises en cause : « Ne travaillez jamais » (Debord), remplacé par « Travaillez plus pour gagner plus » le « Faîtes l’amour... » reste encore épargné. Domaine privé.

Mais, le privé n’en est pas moins en crise jusqu’au mal-être dont Houellebecq a fait son fond de commerce. « Le sexe a longtemps été tabou, il est aujourd’hui obsessionnel » nous dit, aussi, Fabienne Casta-Rosaz dans son Histoire de la sexualité en Occident.
En arrière plan du désarroi exprimé, c’est toujours la même quête existentielle, celle de l’identité et du sens de la vie qui continue à être posée. Depuis que l’homme a commencé d’ interroger le ciel et formuler ses interrogations.

Et qu’en dit un artiste comme Rodin dans ses dessins érotiques ? Quel est son secret ?


LE BONHEUR DANS L’INSTANT

Philippe Sollers, rattache le mot "orgasme" au sous-thème de l’instant : « Le mot "orgasme" (du grec orgân, "bouillonner d’ardeur"), a d’abord désigné les accès de colère, note l’auteur. Transposé à la sexualité, il est sensé indiquer "le plus haut point du plaisir sexuel". Bien entendu, le modèle de définition reste officiellement le moment de l’éjaculation masculine (seule vérifiable). Tardivement, le dictionnaire admet qu’une femme peut avoir deux sortes d’orgasmes, un vaginal, un clitoridien, et qu’elle "peut éprouver plusieurs orgasmes successifs au cours du même coït"’.

" Tout cela reste mécanique et assez confus (c’est le moins qu’on puisse dire). Car, après tout, l’homme peut avoir des orgasmes sans grande jouissance, comme il peut aussi éprouver un vif plaisir prolongé sans orgasme. L’orgasme est-il obligatoire ? - Quelle bonne question...[rires] - D’un point de vue reproductif, oui, mais on sait que cette nécessité a du plomb dans l’aile. Quant aux orgasmes féminins, leur observation "de l’extérieur" reste pour le moins hypothétique. Chacun et chacune est ici renvoyé à son intimité la plus intime. L’assimilation, enfin, de l’orgasme à une "petite mort" est plus révélatrice qu’il n’y paraît. Il y aurait ainsi, tabou suprême, du plaisir à mourir ? Possible. »

D’après : Philippe. SOLLERS, " L’instant - L’orgasme ", Nouvel Observateur, Hors-série - Le bonheur : mode d’emploi, N° 36, 1999.
Transcrition de l’émission « Par 4 Chemins », Radio Canada du 20 mai 1999

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UN ORGASME ?

« Ces révélations, par exemple. Tout à coup, dans un demi-sommeil, l’action fulgurante d’un big-bang, explosion, projection à une vitesse folle, chaos, cosmos, terre, existence, fusée tirée d’on ne sait où vers on ne sait où. Vitesse du son ? Non, bien plus. De la lumière ? Non, trop lente. C’est une propulsion instantanée à travers la matière, atomes et cellules, un coup de canon dans le vide, coup de semonce, coup de semence, avec pour seul résultat d’être là. Là, mais où ? Plus de où. Trouée dans le où. Et voilà une grande certitude sans rien ni personne. C’est là, c’est peut-être moi. Je reprends mon crâne et ma forme habituelle et, en effet, c’est moi. »


Philippe Sollers

Une Vie divine
, p. 256.

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UN ORGASME DE TEMPS

« Le siècle des lumières, c’est à la fois Bach, Mozart, Sade, Casa. Ces gens ont un TEMPS FOU, une durée à n’en plus finir. Ils se répètent, ils fuguent, ils varient, ils accumulent, ils sautent, ils sont dans ce que Heidegger, dans une magnifique formule, appelle " l’inépuisable au-delà de tout effort ". Comme les fleuves, comme la nature, à l’instant. Ils jettent l’argent ou le génie par les fenêtres, le "fluide corporel" aussi. [...] On a l’impression qu’au moins quinze siècles antérieurs ont soudain voulu s’épancher. On assiste à un orgasme de Temps, qui se manifeste logiquement par le triomphe de l’individuation, le rayonnement d’une intense minorité plurielle.
Nietzsche a vu cela dans la fête française de l’époque : un splendide lever de soleil POUR RIEN, le retour et même le dépassement du miracle grec »

Philippe Sollers
Casanova l’admirable, pp. 158-159.

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FAIRE ENTENDRE SA VOIX

« Il y a une sorte de morale qui consiste à déclarer qu’il faut qu’un orgasme se produise et que cet orgasme ne se produit que par l’espèce d’aveu et de proclamation que je ne suis que ce que je suis, qu’il y a une sorte de tautologie. [...] eh bien ! quand la parole passe à travers la complexion de quelqu’un qui est à la fois désireux, violemment, parfaitement furieux de désir, et conscient, et sans illusions quant à ce qu’il peut produire, eh bien ! la parole rougit et éclaire, du fait qu’elle ne fait que se dire elle-même. »


Entretiens de Francis Ponge avec Philippe Sollers
, pp. 191-192.

« ...cette perle, dans l’explication de sa brouille avec Derrida : « Le brouillage passionnel qui a lieu dans sa région femmes. » Région femmes : qui en est le préfet ? À la sortie du film de Marguerite Duras, Détruire, Sollers en fait l’éloge dans le Nouvel Observateur du 5 janvier 1970 en ces termes : « Film très sexuel aussi avec ce très beau final où le défoncement qui arrive très soudainement, le bruit et la musique qui indiquent comme une sorte d’orgasme terminal , une sorte de décharge finale. »
En 1988, paraît Carnet de nuit : « Duras, pauvre femme. » Qui parle de vulgarité et de goût ? »

cité par Catherine Clément dans Sollers, La Fronde

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SAUF SIMULATION

Romain Gary, dans les années 60, se demandait pourquoi on avait valorisé à ce point l’orgasme en Occident. Il suggérait cette réponse : dans une société du doute, c’est la seule chose sûre. « Quand elle crie, pense l’homme, je suis sûr d’avoir atteint mon but. » Certes, sauf simulation...

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SI ON CHERCHE A EXCITER L’AUTRE, ON EST FOUTU

« Toutes les misères sexuelles sont dues à l’effort de simulation et de jouissance. Si on cherche à exciter l’autre, on est foutu. Les créatrices d’ambiances sexuelles sont les moins sexy : c’est la grosse farce, la cavalerie comique de grosse salope déguisée. Il ne faut penser qu’à soi, si on veut rentrer dedans quelqu’un, vraiment, pour toujours. Physiquement, ça ne veut rien dire de passer par les autres pour se faire plaisir à soi. On n’excite l’autre que si on montre qu’on veut jouir seul. Ce sont celles qui ont peur de ne pas jouir qui réveillent tout l’immeuble. »

Marc-Edouard Nabe
Au régal des vermines

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ENIGMATIQUE

« C’est dans le sexe féminin que l’orgasme nous reste le plus énigmatique,
le plus fermé peut-être jusqu’ici, dans sa dernière essence, jamais authentiquement situé »

Jacques Lacan
L’angoisse

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EROS ET THANATOS

De la mythologie grecque aux années sida, Eros et Thanatos hantent la littérature, l’art et la musique contemporaine.

Baudelaire dans Les Fleurs du mal

« Et pourtant vous serez semblable à cette ordure,

A cette horrible infection,
Étoile de mes yeux, soleil de ma nature,
Vous mon ange et ma passion ! »

Eros et Thanatos aussi chez Bukowski dans Les nouveaux contes de la folie ordinaire
(contre-indiqué aux déprimés, déprimants


« A quoi bon des poètes dans un temps de détresse ?" demandait Hölderlin ; La réponse est dans Bukowski, dans une prose qui est l’une des plus dénonciatrices-accusatrices de ce temps. Et sans aucune issue proposée : le constat d’enfer nu, organique et brutal. Les "caprices" de Goya, en pleines phrases.[...) »

Philippe Sollers, Le Nouvel Observateur

« [...] L’orgasme et la folie sont la nouvelle frontière des libérateurs de l’amour où Bukowski monte la garde. »
Jacques Cabau, Le Point

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LES LARMES D’EROS

Georges Bataille écrit Les Larmes d’Éros en 1959. L’ouvrage paraît en 1961. Bataille a plus de soixante ans, il vieillit, il est malade. Il se lance pourtant dans une oeuvre pleine de santé jubilatoire, ces Larmes d’Éros, une histoire de la peinture sous le patronage d’Éros et de Thanatos, l’amour et la mort, liés depuis les temps originels, depuis les peintures rupestres jusqu’aux introspections surréalistes. Bataille dévoile une autre histoire de la peinture. Chaque civilisation, chaque courant artistique essaie de surmonter la contradiction du jouir et du mourir, l’idée que la décharge amoureuse est cousine de la mort. Chez les primitifs, les Grecs, dans le maniérisme renaissant, le classicisme, le romantisme, et encore chez les modernes - Picasso, Masson, Delvaux, Balthus - l’obsession de l’amour et de la mort est là, présente au coeur même de l’homme. Bataille invite à regarder ces tableaux pour ce qu’ils sont : des réflexions abruptes et nettes sur l’essence de l’homme qui, mieux que les mots, dévoilent notre grandeur et notre tragique. Avec Les Larmes d’Éros, Bataille professe, au seuil de sa mort, un magistral cours d’histoire de l’art, animé d’un souffle poétique et d’une densité philosophique incomparables.

Georges Bataille
Les Larmes d’Éros, Pauvert, 198

Nota : La « petite mort », Georges Bataille désigne ainsi l’orgasme dans son roman "Madame Edwarda" . L’orgasme, en même temps que sentiment de plénitude et de satisfaction, provoque aussi un effondrement du moi, une suspension du manque et du désir, comme la mort qui abolit toutes les tensions de la vie. Aujourd’hui, chez les spécialistes de toxicomanie, l’expression la « petite mort » désigne aussi l’état d’exaltation du toxicomane.

La parenté entre l’érotisme et le meurtre, l’orgasme et la mort.

Dans les deux cas, les corps accueillent une forme de violence (amoureuse ou meurtrière). Dans les deux cas aussi, il y a« effraction », pénétration ; dans le meurtre ou le viol, le corps est fracturé ; dans le désir, l’isolement de l’être s’effondre, il y a, selon G Bataille, une déchirure de l’intériorité.

Dans la violence de l’étreinte, le corps obéit à une sorte de rage dans laquelle on ne reconnaît plus la personnalité ordinaire de l’individu.

Quant à l’orgasme, il est effraction, sortie hors de soi, et en tout cas, abandon d’identité. L’orgasme provoque aussi un effondrement du moi. Dans l’épuisement, le corps s’abandonne au flux des courants qui le traversent, il régresse au mode végétatif, c’est ce que le langage populaire appelle « la petite mort », Valery préfère évoquer « la jeune Parque ».

G.Bataille s’étonne de cette dilapidation extraordinaire d’énergie dans la reproduction sexuelle. Elle fait signe vers tous les excès de violence vitale. Mais, quand l’homme en prend conscience, il est fasciné autant qu’il a peur.

Crédit : http://www.philophil.com

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LIVRE-TOI JULIETTE

« Livre-toi Juliette, livre-toi sans crainte à l’impétuosité de tes goûts, à la savante irrégularité de tes caprices, à la fougue ardente de tes désirs ; échauffe-moi de leurs écarts, enivre-moi de tes plaisirs ; n’ai jamais qu’eux seuls pour guide et pour lois, que ta voluptueuse imagination varie nos désordres ; ce n’est qu’en les multipliant que nous atteidrons le bonheur, [...] Ne vois-tu pas l’astre qui nous éclaire déssécher et vivifier tour à tour ? Imite-le dans tes écarts, comme tu le peins dans tes beaux yeux. »

Donatien-Alphonse-François, Marquis de Sade (1740-1814)
_Histoire de Juliette ou les Prospérités du vice

Cité par Ph. Sollers in RODIN, Dessins érotiques p.13-14.

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A QUOI PENSE LE PENSEUR ?

Le secret de Rodin

« On en parlait, on savait qu’ils étaient là, quelque part, on en avait vu cert ains, ici ou là, mais il était difficile d’imaginer qu’ils étaient groupés en masse offensive, harmonique, formant une percée sans équivalent dans la représentation des corps.
Les voici donc, ces dessins [...] A quoi pense le Penseur ? A ça. Que contemple, enfermé en lui-même et rejeté en arrière, le Balzac ? Ca. Sur quoi ouvre la Porte de l’Enfer ? Sur ça. A quoi rêve Hugo sans pouvoir le dire ? A ça. D’où sortent tant de bustes, de mains, de jambes et de gestes, de visages tendus, de couples musculeux, de demi-dieux ou déesses emportées ? De ça. De ces femmes uniques, au pluriel nu, en situation extrême. Découvrant en mouvement leur sexe, le désignant et le profilant, l’imposant de face, Méduse enfin affrontée et vaincue par au moins un explorateur ou criminel de fond, encore un Français comme par hasard, concentré, obstiné, au milieu de la régression générale, atelier réservé, convenances dehors, en pleine action dedans, on ne pourra évidemment montrer le résultat que beaucoup plus tard.

[...]

Une bacchante, une courtisane, une coquille, une araignée, une constellation, une Danaé, - et puis Satan, le Diable en personne. Avec sa vibration et son fouet. Il y a un tremblement, un tressautement, des étincelles, un courant de possession furieux et pourtant serein. Assises, allongées, emboîtées, elles tournent. Rodin, jupitérien sous forme d’une pluie d’ondes, les pénètre de toutes parts, ces mortelles ou demi-mortelles, il se situe exactement à l’intersection de leur jouissance et du trait. [...]
S’il fallait en choisir une, ce serait le numéro 6187.
En regardant, jécoute L’Enlèvement au sérail, de Mozart. »

Philippe Sollers (avec Alain Kirili)
Rodin, dessins érotique
, Gallimard, 1987

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L’AUTRE VENISE

Et cet étonnant éloge de Venise dans Venise éternelle, les voyageurs photographes au siècle dernier par Philippe Sollers , éditions Jean-Claude Lattès, 1993

« Je me revois, à l’automne 1963, arrivant pour la première fois, de nuit, à Venise. Je viens de Florence, me voici tout à coup sur la place Saint-Marc. La précision de la scène est étonnante : debout, sous les arcades, regardant la basilique à peine éclairée, je laisse tomber mon sac de voyage, ou plutôt il me tombe de la main droite, tant je suis pétrifié et pris. J’entends encore le bruit sourd qu’il fait sur les dalles. Je sais, d’emblée, que je vais passer ma vie à tenter de coïncider avec cet espace ouvert, là, devant moi. J’ai ressenti une émotion du même genre, mais moins forte, en pénétrant, à Pékin, dans la Cité Interdite et, surtout, en allant aux environs visiter le temple du Ciel au toit bleu. C’est un mouvement bref de tout le corps violemment rejeté en arrière, comme s’il venait de mourir sur place et, en vérité, de rentrer chez soi. Etre dehors est peut-être une illusion permanente : il n’y aurait que du dedans et nous nous acharnerions à ne pas le savoir. La nuit (il était très tard, il n’y avait personne ni sur la place, ni dans les ruelles) favorisait ce choc semblable à celui qu’on ressent dans l’épaule en tirant un coup de fusil. Détonation silencieuse, vide, plein, vide ; évidence intime.
[...]
Casanova (Mémoires) : « Je me suis déterminé à solliciter ma grâce auprès des inquisiteurs d’Etat vénitiens [...] je l’ai obtenue. Ce fut le 14 septembre 1774. Mon entrée à Venise, au bout de dix-neuf ans, me fit jouir du plus beau moment de ma vie. »

Philippe Sollers
Venise éternelle, les voyageurs photographes au siècle dernier éditions Jean-Claude Lattès, 1993, p.34 39.

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L’ORGASME ET L’OCCIDENT

L’orgasme et l’Occident ]
Histoire du plaisir du XVIe siècle à nos jours
de Robert Muchembled
Seuil, 2005, 396 pages

Présentation de l’éditeur
L’orgasme est-il soluble dans l’histoire ? Emotion individuelle quasi incommunicable mais aussi réalité culturelle, il appartient et tout à la fois échappe à l’expérience collective. L’histoire de l’orgasme est celle du corps caché, des désirs interdits, de la chair corsetée par les tabous et les morales. Enfouis dans les tréfonds des archives et des bibliothèques. les documents concernant cette vie physique, parfois libertine, n’en sont pas moins extraordinairement abondants et d’une surprenante force d’évocation. Le livre de Robert Muchembled exhume des sources fascinantes qui invitent à regarder d’un oeil neuf un passé souvent figé par de vertueuses sélections, pour découvrir " l’envers du décor " et réaliser que la sublimation des pulsions érotiques, bien au-delà du simple ascétisme religieux, a sans doute été le moteur caché du dynamisme de l’Occident jusqu’aux années 1960. En matière de volupté, Angleterre et France ont suivi des chemins parallèles et les Etats-Unis conservent la profonde empreinte de ce modèle répressif commun, récemment abandonné par l’Europe hédoniste au profit d’une sexualité plastique dont les femmes sont les principales bénéficiaires. Libérées par la pilule des dangers et des angoisses liées aux obligations de reproduction, elles peuvent désormais réclamer l’égalité avec les hommes et rechercher sans complexe ce plaisir qu’on dit charnel...

Biographie de l’auteur
Professeur à l’université de Paris-Nord, ancien membre de l’Institute for Advanced Study of Princeton, Robert Muchembled a écrit plus de vingt ouvrages traduits en quinze langues. Il a notamment publié, chez le même éditeur, Une histoire du diable (2000) et Passions de femmes (2003).

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L’HORMONE DU BIEN-ETRE

Par Guy MASSAT, Psychanalyste

Extrait de l’intervention de Guy Massat au Café le « Lounge Bar » (1, bd de la Bastille), le jeudi 23 février 2006.

La souffrance d’origine psychique produit celle du corps et celle de l’esprit. La psychanalyse est la méthode qui permet à chacun de faire parler et de débloquer sa parole inconsciente, de devenir ce que l’on est et d’accoucher rapidement de soi-même en parlant. Tout peut se guérir par la parole et l’interprétation des rêves. Pourquoi j’en suis si sûr ? Le psychanalyste est naturellement autre chose qu’un savant, bien qu’il soit immanquablement aussi un savant, même si c’est à son insu.

Ma preuve objective c’est que les savants ont découvert qu’en parlant on produit de l’ocytocine. L’ocytocine est une hormone connue depuis longtemps pour favoriser les contractions des parturientes, mais la science vient de découvrir qu’elle est produite par la parole. On savait déjà que la parole produisait des décharges d’adrénaline, la molécule des systèmes nerveux. [...] L’ocytocine, quant à elle, favorise la confiance en soi et la sexualité. Ce serait un puissant antidépresseur, qu’on qualifie maintenant d’hormone du bien-être. L’ocytocine se libère pendant l’amour, elle est sécrétée pendant l’orgasme et... c’est scientifique : par la parole. Voici donc la preuve biologique, matérielle et savante de l’importance de la psychanalyse comme guérison par la parole. Antiphon de Corinthe avait donc raison quand il prétendait guérir les maladies par la parole et l’interprétation des rêves.

Antiphon (480-411 av. J.C). Plutarque écrit qu’Antiphon avait à Corinthe, près de l’Agora, une maison avec une enseigne, qui annonçait qu’il avait le pouvoir de guérir les maladies par le pouvoir des mots. Un précurseur de la pub, en somme, et de la psychanalyse avant l’heure, Il encourageait le patient à parler de ses souffrances et ensuite, l’aidait en utilisant une rhétorique qui reprenait à la fois et le style et le contenu des propos du malade. Ocytonine et/ou recadrage en langage moderne issu de la Programmation Neuro-Linguistique (P.N.L), Antiphon réussissait à modifier l’image pathogène du monde qu’avait le patient.




LE DESIR

Et voici, maintenant, en final de ce petit florilège - que vous êtes invités à compléter - un texte de Philippe Sollers, intitulé « Le désir », extrait de La Guerre du Goût :

«  Quelqu’un qui, aux deux questions suivantes : Qu’espérez-vous ? Que désirez-vous ? répondrait, « rien », commettrait un délit grave ou passerait pour fou. Le désir ou la dépression, il faut choisir. Désirez ! Délirez ! Voilà l’ordre. « C’est bien ainsi que se présente désormais la vulgarité de la planète spectaculaire. » (Debord.)

Le narrateur de La Fête à Venise dit à moment : « Pour que les esclaves modernes, acceptent, et même revendiquent, leur condition, il faut les droguer d’images et de racontars en permanence ... Ça ne jouit plus, ou le moins possible : trop dangereux pour l’installation irradiée. Sans cesse excité, sans fin déprimé, tel sera le spectateur du spectacle. Il, ou elle, est une reproduction. Il, ou elle, sera utilisé comme reproduction de reproduction. »

Cette automatisation anonyme et programmée du désir, lequel est, par définition, toujours désir d’autre chose (d’une autre marchandise plus convaincante, plus comblante), fait étrangement de Pavlov le penseur le plus actuel. Stimulus ? Réponse ! L’originalité, ici, sera bannie, de même que l’invention atypique, tordue, vicieuse, joueuse. Tout devant être socialisé à l’extrême, et à chaque instant, la moindre trace de distance, de réflexion, d’incrédulité, d’ironie sera sévèrement jugée. D’interdit, le sexe devient obligatoire, ce qui revient à l’empêcher bien plus efficacement qu’en l’assimilant à l’enfer. Si tout le monde touche à la sexualité, la sexualité se dissout. Si chacun est homosexuel, plus personne ne l’est. Si l’on désire à la fois la loi et la transgression, il n’y a plus ni loi, ni transgression. Si la perversion est la norme, plus de perversion. On entre dans ce que j’ai appelé une perversation généralisée (comme on dit malversation). Ce qui touche au désir devient une valeur d’échange, l’usage est immédiatement rabattu sur l’échange, le désir manifesté ici ou là est donc, tout au plus, une information. Les retardataires du désir doivent le savoir : ils campent sur des positions minées d’avance. Non, il n’y aura pas de retour à la morale, à la religion, à la famille, à l’identité, à l’ordre musclé. Ce qui n’empêche pas qu’il faut toujours les faire craindre, pour accélérer la mise en place du dispositif nouveau. Attention, fascisme ! (Pêle-mêle : le pape, les intégrismes, les nationalismes, les racismes, etc.) La vérité est, d’ailleurs, que les anciennes figures du refoulement peuvent très bien s’accommoder de la surexposition du désir-marchandise, et même encourager ce dernier en en tirant les plus grands profits. Une seule règle : montrer sans relâche à quel point le désir est élémentaire, tout-puissant, naturel. épanouissant, partagé, constant. Cette pseudo-démocratie du désir le rend bête et laid ? Eh oui, sans doute, mais c’est. bien la preuve d’un problème en voie de résolu tion (la pornographie doit être la plus moche et la plus idiote possible, il n’est pas question qu’elle s’exerce aux frontières de la conscience de soi : le sexe n’a pas à rendre intelligent ou à renseigne sur la beauté, il vous rappelle simplement queli vous êtes comme les autres). Un magazine brani ché publiait récemment ma définition : « S., écrivain érotomane. » Ce qui veut dire : on vous pardonne d’être écrivain parce que vous êtes érotomane (et surtout restez-le, on vous a à l’oeil). Le contrôle des stéréotypies sexuelles est un impératif du marché des choses comme des corps. Ne vous a-t-on pas déjà dit, autrefois, que vous étiez. des machines désirantes » ? Eh bien, ce que la machine veut, la Technique le peut. Non seulement pour vous, mais pour tous, et dans tous les sens.

[...] Pour qui vous prenez-vous pour affirmer une singularité dans cette grande unanimité ? Vous êtes bien dans la classe des ceci, des cela Vous êtes bien un homme ? Ou une femme ? 0u un peu des deux ? Nous avons les réponses à vos questions, d’ailleurs inutiles. Soyez ce que vou voudrez mais pas vous. L’anesthésie du désir est prévue par son simulacre de satisfaction (les sondages ne sauraient porter sur les variations de jouissance, cela demanderait une élaboration verbaIe, et c’est l’aphasie qui est recherchée). Là encore, les attardés du vieux monde auront tort de parler de « décadence » (mollesse, désordre, ignorance, affaissement des valeurs). La décadence est depuis longtemps passée, nous vivons au contraire la construction énergique, inlassable, percutante, d’une nouvelle Tyrannie d’ensemble. Son but, qu’il ne faut pas une oreille bien fine pour entendre, est de populariser le désir de mort. Que reste-t-il à vouloir, pour un être humain convaincu de n’être qu’une reproduction de reproduction, sinon s’effacer ? Pour lui en donner le goût et la détermination, il conviendra de le maintenir en état constant d’énervement et de frustration. Comme le drogué, on lui révélera son désir pour le transformer en besoin, le tout finissant dans la plus banale des disparitions acceptées comme un soulagement nécessaire. Il y aura donc les Maîtres et les Esclaves, et c’est sans doute la raison pour laquelle on n’a jamais tant parlé de démocratie. D’un côté, la maîtrise des reproductions artificielles ; de l’autre, les numéros artificiellement reproduits.
[...]
Le désir est un projet de contre-société permanent. Ils sont peut-être en cours d’organisation, les nouveaux acteurs de ce terrible blasphème : rien pour la Société, tout pour nous. Ils passeront entre eux des contrats bizarres. Ils auront leurs signes de reconnaissance, leurs crétions, leurs fausses indiscrétions. Des romans les décrivent peut-être déjà, qui échappent, comme par magie, à la police du Spectacle. sont plus proches de la logique impeccable :1’ l’amour courtois que des clichés indéfiniment ressassés [...]. Ils se désirent parce qu’ils se parlent tout en se touchant, dans une langue incompréhensible ou qui ferait dresser les cheveux la tête des fonctionnaires de l’illusion. Ils ne sont pas achetables, pas récupérables. De telles sociétés de plaisir ont, paraît-il, existé au dix-huitième siècle : l’Empire les pourchassa sans trêve, on n’a sur elles que peu de renseignements. Il semble qu’en ce temps-là les femmes n’hésitaient pas exister pour elles-mêmes, avant de devenir la population privilégiée de la grande manipulation économique de masse. L’une de ces sociétés mystérieusement antisociales s’appelait : Société duMoment. C’est la grâce que je me souhaite.
 »

Philippe Sollers
La Guerre du Goût,
Gallimard, Folio, pp. 236-242

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10 Messages

  • Daniel | 10 janvier 2009 - 11:34 1

    LES HOMMES PREISTORIQUES - LE SEXE

    http://www.arterupestre-c.com/1000.htm

    On se la pète avec nos sextoys, le Kamasutra, le tantrisme et tout ce qui fait de la sexualité une chose raffinée, dont on peut parler entre amis tout en évitant les détails scabreux. On parle de sexe parce que le sexe, c’est cool. On dédramatise parce qu’il n’y a, finalement, rien de bien dramatique. Le sexe, on peut en parler sans passer pour un pervers ou une cochonne.
    N’empêche, on a toujours quelques petits problèmes. Le porno, l’homosexualité, les délires fétichistes : il y aura toujours ceux qui seront mal à l’aise avec ce qui est "tabou", ou qui préfèrent penser que ça n’existe pas. Ces gens-là, ils sont pas cools.

    Et les hommes préhistoriques, eux ils étaient vraiment cools. Ils représentaient la sexualité sur les murs des grottes sans aucun problème, alors qu’archéologues et passionnés de peintures rupestres ont toujours du mal à partager de telles représentations avec le public. Les hommes préhistoriques, ils n’avaient pas peur de montrer clairement des coïts, des femmesDanniel Verdejo - Barcelona Spain obèses avec des fesses énormes, gorgées de fertilité. Ils n’avaient pas peur de représenter des choses aussi osées que ma peur de vous en parler. Les hommes préhistoriques, ils avaient peur des catastrophes naturelles, mais pas du sexe. En ça, ils étaient vraiment cools.

    Voir en ligne : LES HOMMES PREISTORIQUES - LE SEXE


  • Marie-Gabrielle Montant | 24 février 2008 - 14:47 2

    Je me heurte si la lecture est cette roche au pied foulé :

    « C’est dans le sexe féminin que l’orgasme nous reste le plus énigmatique,
    le plus fermé peut-être jusqu’ici, dans sa dernière essence, jamais authentiquement situé »
    Jacques Lacan
    L’angoisse

    Et par opposition ? un espace vierge de masturbation dans l’en-deçà d’une planète où sexe et tout venant vont étouffer ?

    Sembleront ici se confondre la verticale orientation dans l’horizon de la droite et d’un point - demeurant l’inconnue, pour un plus grand dommage...


  • Livia | 13 juin 2007 - 18:42 3

    Le bonheur dans l’instant

    Le mot "orgasme" (du grec orgân, "bouillonner d’ardeur"), a d’abord désigné les accès de colère. Transposé à la sexualité, il est censé indiquer "le plus haut point du plaisir sexuel". Bien entendu, le modèle de définition reste officiellement le moment de l’éjaculation masculine (seule vérifiable). Tardivement, le dictionnaire admet qu’une femme peut avoir deux sortes d’orgasmes, un vaginal, un clitoridien, et qu’elle "peut éprouver plusieurs orgasmes successifs au cours du même coït".
    Tout cela, n’est-ce pas, reste mécanique et assez confus (c’est le moins qu’on puisse dire). Car, après tout, l’homme peut avoir des orgasmes sans grande jouissance, comme il peut aussi éprouver un vif plaisir prolongé sans orgasme.
    L’orgasme est-il obligatoire ? D’un point de vue reproductif, oui, mais on sait que cette nécessité a du plomb dans l’aile. Quant aux orgasmes féminins, leur observation "de l’extérieur" reste pour le moins hypothétique. Chacun et chacune est ici renvoyé à son intimité la plus intime. L’assimilation, enfin, de l’orgasme à une "petite mort" est plus révélatrice qu’il n’y paraît. Il y aurait ainsi, tabou suprême, du plaisir à mourir ? Possible.

    Philippe Sollers dans un numéro hors-série du Nouvel Obs sur le bonheur.

    ps : excusez la coquille du message précédent...


  • anonyme | 13 juin 2007 - 14:26 4

    Sollers avait écrit un petit fragment sur l’orgasme dans un numéro hors-série du Nouvel Obs sur le Bonheur en 1998. Je le mettrai en ligne bientôt...


  • A.R. | 13 juin 2007 - 08:03 5

    ... Symphytie, c’est-à-dire, si mes souvenirs de grec sont bons, quelque chose comme : de la même nature, de la même plante, pourquoi pas du même cep... Ainsi l’être en Christ, selon saint Paul... Tout le monde vous renvoie dans les cordes (de "ça", la littérature érotique, par exemple) ? Qui a l’instinct du combat comme de l’amour sous toutes ses formes (Mohammed Ali contre Foreman, par exemple), sait : "Dans ton combat contre le monde, seconde le monde", dit Franz Kafka.


  • A.R. | 12 juin 2007 - 23:14 6

    Alina vous salue bien, Viktor comme Victoire ! Vous voyez, même de là-haut, elle a toujours envie de répondre, quand Sollers parle de plaisir... Quelque chose en nous de l’esprit du vin, sans doute.
    Mon mot préféré : symphytie, même s’il n’existe pas en français.


  • V.K. | 12 juin 2007 - 22:42 7

    Alina Reyes, authentique écrivain/écrivaine, exploratrice de la littérature érotique - dans une autre vie - l’auteur de Satisfaction
    , et du Carnet de Rrose, parmi ses derniers titres, un temps blogeuse, a quelquefois flâné sur ce site. Puis, elle s’est retirée de la microsphère du blog pour explorer un univers beaucoup plus inouï, jugez-vous-même !


    « Pour cet ultime r.v. quotidien, ton visage disparaît, je me couche nue sur le dos, les mains croisées sur la poitrine - elles font ça d’elles-mêmes, ce n’est pas moi, c’est mon corps qui de lui_même s’arrange comme ça - Dans le noir mon voyage commence vers la lumière J’appelle ça prier. Je ne récite aucune prière, je n’en connais pas, je ne demande rien non plus -, je n’aspire pas à un Ciel habité d’une sorte de Père Noël duquel je pourrais espérer tel ou tel bienfait, encore moins telle ou telle satisfaction. J’aspire simplement à gagner le Ciel, ici même en cette vie, jour après jour, nuit après nuit après nuit. A le gagner et à le perdre, pour le gagner de nouveau, le perdre encore et le retrouver toujours, le feu à l’âme. Mon âme en flammes m’allume le feu au ventre, je sais que j’atteins la prière réelle où je pourrais crier et me tordre de joie, même si je reste muette et immobile comme une morte j’aspire à être seule dans un dialogue qui est tour à tour de paix et de violence j’aspire à la question de l’amour qui est tour à tour gifle et joie, j’aspire à la gifle qui réveille reçue ou envoyée, et à la joie qui transporte et transfigure je n’aspire pas l’ataraxie mais au combat et à la jouissance, aux assauts toujours renouvelés. Je suis virile de ma relation à Dieu autant que féminine, je suis au-delà de l’homme et de la femme mais rien moins qu’asexuée avec Dieu, je suis toute sexe, de là où le sexe est si pur et absolu qu’il rejoint l’Amour, Eros uni à Agapè ds la même brûlure. Et je vénère Dieu de me permettre de repousser ainsi sans cesse les limites de ma liberté, avec Lui et par conséquence avec les hommes. Comment est-il possible de jouir autant ? A aller aussi loin, svt je ne sais plus que faire de moi-même et comment je tiens encore ds mon corps, comment je n’en meurs pas d’épuisement et de plénitude.
    Je combats avec l’ange, Lui et moi à tt instant combattant derrière le rideau, et cette Lutte tjrs renouvelée poursuit le but de vous livrer à toi, lecteur, lectrice, entremêlés et indécents comme nous sommes, ouvrir le rideau sur notre noble tragique et heureuse obscénité.
    Je t’aime mon ange. »

    La suite de la photocopie du message est tronquée.
    Ce message est le dernier laissé, par Alina Reyes sur son blog avant de le fermer.
    Message manuscrit à l’encre, couleur du sang de la vie : bleu.
    Consultez-le dans sa version manuscrite, avec ses abréviations et ses corrections, tel qu’A.R. a voulu le livrer. Sa façon à elle de rendre grâce à ses lecteurs et lectrices.

    Merci A.R. de nous parler aussi d’Amour ( ...A.R. comme AmouR ! )

    www.alinareyes.com/

    Alina Reyes sur pileface -juste quelques mots d’avant.


  • D.B. | 12 juin 2007 - 22:02 8

    Chère A.R.

    Voilà que l’orgasme fait parler...

    Il suscite pour moi une série de questions :

    Vous incarnez ou êtes habitée ?

    Pourquoi faudrait-il mourir pour user d’un autre nom, même confidentiel, en substitution ?

    Le donner "en pâture aux cochons" ? Mais pourquoi ne pas plutôt s’appeler "Porc" et connaître par coeur le texte de Claudel comme on déclinerait son identité ? Le point de vue est tout autre...

    Qu’attendez-vous "en attendant..." ?

    En quoi le fait "d’être morte" serait " très pratique" ?

    N’est-il pas préférable d’être bien vivant et goûter la "petite" mort ?

    Bien cordialement

    D.B.


  • A.R. | 12 juin 2007 - 20:50 9

    ... Je précise : je signe A.R. car Alina Reyes, que j’incarnais, est morte. Un autre auteur m’habite désormais, mais celui-ci ne donne pas son nom en pâture aux cochons (je ne parle évidemment de personne ici !)
    En attendant, c’est très pratique, d’être morte, pour venir tirer les pieds à ceux qui dorment...


  • A.R. | 12 juin 2007 - 20:02 10

    Le plaisir en société, fût-elle secrète, ne donne que le goût de la mort, et l’envie de vomir.
    Je suis bien d’accord avec Sollers quand il critique le fait que, dans l’opinion commune, "le sexe n’a pas à rendre intelligent ou à renseigner sur la beauté". Il le dit, mais il se contente de le dire. Où est la beauté du sexe dans ses livres ? Il s’agit bien de "ça", comme il dit, comme on dit dans les familles bien élevées - "ça", comme on dit chez Freud - "ça", "la chose", bien méprisable n’est-ce pas, comme il est flagrant dans ses livres, malgré ses discours.
    Alina Reyes a écrit bien des livres où "le sexe" est chair, pensée, beauté, combat, spiritualité - dans un mépris général de l’intelligentsia, y compris de Sollers qui fut pourtant son éditeur (pour des livres "sages") mais qui a toujours préféré soutenir publiquement ceux que l’opinion commune a déjà adoubés, quitte à porter aux nues la littérature de commère d’une Angot ou les opérations publicitaires d’un Beigbeder, qui font absolument le jeu de ce qu’il dénonce.
    Enfin, pour revenir au désir, au plaisir et à l’orgasme, le plus interdit en littérature est bien de les lier à l’amour et à l’innocence.