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Sollers en son jardin

D 21 décembre 2006     A par Viktor Kirtov - C 0 messages Version imprimable de cet article Version imprimable    ................... PARTAGER . facebook


Proust : « Une heure n’est pas qu’une heure, c’est un vase rempli de parfums, de sons, de projets et de climats. ». Avec Sollers, une fleur n’est pas qu’une fleur... et la critique d’Antony Palou (Le Figaro Magazine du 9 décembre 2006) en rend bien compte.

IL Y A TOUJOURS eu des fleurs dans les romans de Sollers. A ceux qui critiquent son opportunisme, question fleurs, c’est une véritable passion fixe. Le début de Paradis : « Voix fleurs lumière écho des lumières ...  » Souvenons-nous de son roman Le Lys d’or. Sans parler de ses constantes références à la glycine, aux canas de son île de Ré. Même son QG a un nom floral : La Closerie des Lilas. Offrir du lilas dans le langage des fleurs du XIX· siècle était, paraît-il, un signe d’amitié. Comme toujours chez Sollers, le sexe n’est jamais loin. Voici un livre érotique, en fait un dictionnaire amoureux des fleurs. Avec des entrées comme : Beckett, Le Roman de la rose, Ronsard, La Bruyère, Shakespeare, Rousseau, Rimbaud, ou encore Dante, Proust, Chine, Angelus Silesius qui écrivit ces mots d’une beauté poétique parfaite : «  La rose est sans pourquoi.  »Sollers est ici dans son jardin. Il butine sa culture. Il donne à voir, il donne à lire. Le livre ne se referme jamais puisque les dernières phrases sont en fait les premières. Clin d’ ?il à Joyce. Le tout est illustré de vingt-six magnifiques planches en couleurs signées Gérard Van Spaendonck (1746-1822), un célèbre botaniste aujourd’hui oublié. C’est un livre reposant. Un peu de paix dans un monde secoué ne se refuse pas. Mais pas de Sollers sans une citation de Nietzsche. On la trouve, extraite du Gai Savoir , dès la page 15. Lire aussi, à ce propos, ses entretiens, L’Evangile de Nietzsche . Très bon à l’oral, comme d’habitude. Cette étrange manie qu’il a toujours eue de commenter son ?uvre à l’infini. Un ouvrage pour les amateurs éclairés .

Anthony Palou



La citation du Gai Savoir dans son contexte

«  La conception, chez les fleurs, a beaucoup occupé les esprits. L’Immaculée Conception, l’Incarnation, l’Assomption rôdent dans les parages. Amour sous toutes ses formes, bien sûr.

Convoquons ici, en toute justice, Iris, messagère des dieux, et son écharpe : l’arc-en-ciel. Rodin, on s’en souvient, n’a pas craint d’en faire une danseuse d’espace à écartement bondissant de jambes. Le rhizome (racine) de l’iris est utilisé en parfumerie. On connaît le trouble qu’a produit cette odeur chez le jeune Proust. Au passage, notons que le parfum entêtant de la tubéreuse vient du Mexique. Et ainsi de suite. Je fais jouer maintenant le nouveau « sens historien » dont Nietzsche écrit dans Le Gai Savoir  : « Que l’on accorde à ce germe encore quelques siècles de plus, et il se pourrait qu’il finisse par produire une plante merveilleuse d’une non moins merveilleuse odeur, propre à rendre la terre plus agréable à habiter qu’elle ne le fut jusqu’alors. » Après des dévastations inouïes, nous trouverons peut-être cette science des siècles dont le florilège s’annonce à l’observateur attentif. »

Tulipes

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Peinture de Michaël Nooij

Dominique Rolin m’écrit : « J’ai le souvenir encore étincelant d’une fête annuelle organisée à Gand sur les fleurs du Nord, en particulier les tulipes en provenance de Hollande, de toutes les couleurs, violentes, brutales même, fleurs de conquête, d’amour et de guerre à mort. J’étais trop jeune à l’époque pour comprendre quoi que ce soit à ce très mystérieux festin annuel. La foule de visiteurs était incroyable, il devait y avoir une atmosphère de folie mystique, sacrée ou franchement pornographique, dans le sens religieux du terme. Les couleurs, les odeurs, le maintien superbe de ces champs de fleurs dans le plus bel épanouissement, cela s’appelait les Floralies gantoises. »
Tulipe
est un mot turc. [...], toutes couleurs, déclaration d’amour.

Nombres


Hier soir, sur Arte, un documentaire : Fascinant chiffre 7. Les fleurs aiment aussi les nombres. Les lys ont 3 pétales, les boutons d’or en ont 5, les marguerites ont souvent 34 ou 55 pétales, etc. Et, lorsqu’on observe le coeur des tournesols on remarque deux séries de courbes, une enroulée dans un sens et une dans l’autre ; le nombre de spirales n’étant pas le même dans chaque sens. Pourquoi le nombre de spirales est-il en général soit 21 et 34, soit 34 et 55 ?

L’auteur de « Nombres » n’a pas relevé cette particularité des fleurs, de l’effeuillage de la marguerite : du « je t’aime, un peu, beaucoup, passionnément, à la folie, pas du tout ». Cycle à base 6. Avec des marguerites à 34 ou 55 pétales, aucune chance de tomber sur « pas du tout » ! Un effeuillage, somme toute, toujours gagnant...

Distribution de nombres au hasard ? Non, un modèle mathématique en rend compte, tous ces nombres appartiennent à la suite de Fibonacci, par ailleurs reliée au nombre d’or. Tiens, donc, mais pourquoi les fleurs et plus généralement la nature aiment ces nombres ? Il n’y a que peu de temps que l’on a compris que ceci était une conséquence du processus de croissance des plantes, une compétition pour la lumière... Les feuilles poussent autour de la tige les unes après les autres en suivant une hélice pour prendre leur part de lumière sans être gênée par la précédente, Les botanistes ont aussi observé les graines de tournesol au centre de la fleur, ; elles ne se développent pas simultanément, mais l’une après l’autre, chacune se trouvant une place optimale par rapport à la précédente... et ces processus de croissance suivent des modèles mathématiques, comme l’ont montré dans les années 1990, les chercheurs Couder et Douary. Et le nombre d’or y joue, bel et bien, sa partition...

C’est un peu plus compliqué, mais le résultat, qu’il s’agisse de courbes, motifs, etc. est esthétiquement beau. Einstein avait déjà remarqué que lorsqu’il hésitait entre plusieurs solutions mathématiques, c’était « la plus élégante » qui finissait par s’imposer..

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