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La Divine comédie : De l’enfer au paradis

D 11 janvier 2022     A par Albert Gauvin - C 4 messages Version imprimable de cet article Version imprimable    ................... PARTAGER . facebook


En octobre 2017, sur France Culture, Adèle Van Reeth consacrait une série de quatre émissions des « Chemins de la philosophie » à La divine comédie de Dante.
Les intervenants sont : Didier Ottaviani, Bruno Pinchard, Manuele Gragnolati et Carlo Ossola, coordinateur de la nouvelle édition bilingue de La Divine Comédie en Pléiade dans la traduction de Jacqueline Risset (2021 [1]).

Épisode 1 : De l’enfer au paradis

Êtes-vous prêts pour le plus effroyable des voyages ? A rencontrer le diable après avoir traversé les neuf cercles de l’enfer ?


Représentation symbolique de La Divine comédie de Dante par Domenico di Michelino (1417-1491).
Crédits : Immagina/Leemage - AFP. ZOOM : cliquer sur l’image.
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La Divine comédie est l’œuvre de Dante la plus célèbre et l’un des plus importants témoignages de la civilisation médiévale. Cette oeuvre est considérée comme l’un des chefs-d’oeuvre de la littérature.

Peut-on atteindre le bonheur en cette vie, à l’épreuve de la plus radicale déperdition de soi ? Vous ne le saurez qu’après une longue descente aux Enfers, et une non moins éprouvante ascension du Purgatoire — mais le chemin sera riche en enseignements, et vous fera peut-être entrevoir l’ordre secret de la création…là où vous vous attendiez le moins à le trouver. Didier Ottaviani nous en dit davantage dans ce premier volet du cycle consacré à la Divine Comédie.

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Le texte du jour

« Au milieu du chemin de notre vie,
je me retrouvai par une forêt obscure
car la voie droite était perdue.
Ah dire ce qu’elle était est chose dure
cette forêt féroce et âpre et forte
qui ranime la peur dans la pensée !
Elle est si amère que mort l’est à peine plus ;
mais pour parler du bien que j’y trouvai,
je dirai des autres choses que j’y ai vues.
Je ne sais pas bien redire comment j’y entrai,
tant j’étais plein de sommeil en ce point
où j’abandonnai la voie vraie.
Mais quand je fus venu au pied d’une colline
où finissait cette vallée
qui m’avait pénétré le cœur de peur,
Je regardai en haut et je vis ses épaules
vêtues déjà par les rayons de la planète
qui mène chacun droit par tous sentiers.
Alors la peur se tint un peu tranquille,
qui dans le lac du cœur m’avait duré
la nuit que je passai si plein de peine.
Et comme celui qui hors d’haleine,
sorti de la mer au rivage,
se retourne vers l’eau périlleuse et regarde,
Ainsi mon âme, qui fuyait encore,
se retourna pour regarder le pas
qui ne laissa jamais personne en vie. »

Dante, La Divine comédie « L’enfer » chant I vers 1-27
(Flammarion, 1985) Trad. Jacqueline Risset. Pléiade, 2021, p. 5.

Lectures

Dante, La Divine comédie « L’enfer » chant I vers 1-27 (Flammarion, 1985) Trad. Jacqueline Risset
Dante, La Divine comédie « Purgatoire » XVII 18-33 trad. Didier Ottaviani dans L’esprit Pèlerin (Points, 2016)

Lectures cette semaine : Georges Claisse [2].

Extraits

Archive : Giogio Agamben (France Culture, émission « A voix nue » 13/01/1998)
Archive : Jacqueline Risset (France Culture, émission « Hors-champs » 29/03/2010)

Références musicales

Rossini, Faro come colui che piange e dice
The Divine comedy, The dog and the Horses
Liszt, Eine symphonie zu Dantes
Liszt, Etude d’exécution transcendente : vision
Liszt, Csardas macabre
Liszt, Totentanz
Liszt, Années de pèlerinage : les jeux d’eau à la villa d’Este
Liszt, Les préludes

VOIR AUSSI : L’Ulysse de Dante
Retour vers le Moyen Age : La Divine Comédie de Dante

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Épisode 2 : Mauvaises rencontres en enfer

A quoi ressemble l’Enfer ?


Dante et Virgile aux enfers.
Crédits : Eugène Delacroix. ZOOM : cliquer sur l’image.
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Si j’avais les rimes âpres et rauques comme il conviendrait à ce lugubre trou sur lequel s’appuient tous les autres rocs, j’exprimerais le suc de ma pensée plus pleinement ; mais je ne les ai point, et non sans frayeur je m’apprête à parler." (L’Enfer, XXXII).

A quelles rencontres Dante et Virgile se préparent-ils en traversant l’Achéron ? A quoi ressemble l’Enfer qui les attend de l’autre côté ? L’Enfer, chez Dante, est plus qu’un espace onirique, mais une véritable forêt de symboles, de rimes venues d’un autre monde, qui restent difficile à pénétrer sans l’aide d’un bon guide. C’est pourquoi Bruno Pinchard, l’un des fondateurs de la Société Dantesque de France, a accepté de venir nous en parler.

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Le texte du jour

Le lieu où nous parvînmes, pour descendre la berge,
était abrupt, et un tel monstre s’y tenait
que tout regard s’en serait détourné.
Tel est cet éboulis qui a frappé l’Adige
droit dans le flanc, au-dessous de Trente, à cause
d’un tremblement de terre, ou d’un appui manquant,
si bien que de la cime d’où elle tomba
jusqu’à la plaine, la roche s’est ainsi écroulée
qu’elle forme un chemin pour qui serait en haut :
telle était la pente de ce ravin ;
Et sur le bord de la roche effondrée,
l’infamie de Crète était vautrée,
celui qui fut conçu dans la fausse vache ;
Quand il nous vit, il se mordit lui-même,
comme quelqu’un qui est rongé par la colère.
Mon sage lui cria : « Tu crois peut-être
qu’ici se trouve le roi d’Athènes,
qui te donna la mort sur terre ?
Va-t’en, bête, celui-ci ne vient pas
avec les leçons de ta sœur,
mais il s’en va pour voir vos peines. »
Tel le taureau qui rompt ses liens quand [alors qu’] [3]
il a déjà reçu le coup mortel,
et ne sait plus marcher, mais sautille çà et là,
ainsi [tel] [4] je vis sauter le Minotaure ;
et mon maître avisé cria : « Cours à la brèche ;
pendant qu’il rage, il est bon de descendre. »
Ainsi nous descendîmes par cet amas de pierres
qui souvent remuaient sous mes pieds
par l’effet de la charge inhabituelle.
J’avançais tout pensif ; il dit : « Tu penses
peut-être à l’éboulis, qui est gardé
par la colère bestiale que je viens de calmer [d’éteindre]. [5]
(…) O cupidité aveugle et colère folle,
qui nous éperonne dans la courte vie,
pour nous baigner si mal dans l’éternelle !

Dante, L’Enfer, Chant XII, v.1-51.
Jacqueline Risset trad., Flammarion, 1985, p.117-119. Pléiade, 2021, p. 89-91.

Extraits

Cinématique du jeu Dante’s Inferno sur Playstation 3, Electronic Arts, 2010
Dante, L’Enfer, Chant XXXIV, Dramatique, France Culture, 26/05/2004

Références musicales

ACDC, Hells Bells
Liszt, Consolation en mi majeur
Liszt, Eine symphonie zu Dantes
Liszt, Les morts
Liszt, Deux épisodes du Faust de Lenau
The Rolling Stones, Sympathy for the Devil
Latraverse, La descente aux Enfers

LIRE AUSSI : Les âges de Dante par Bruno Pinchard

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Épisode 3 : Entre l’âme et le corps, le purgatoire

Quel est le statut du corps dans la Divine Comédie ?


Représentation du Purgatoire d’après la Divine Comédie.
Crédits : Costa/ Leemage - AFP. ZOOM : cliquer sur l’image.
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Ce matin, notre guide au Purgatoire est Manuele Gragnolati qui répond à toutes nos questions sur le statut du corps dans la Divine Comédie : Pourquoi, au seuil du Purgatoire, Dante ne peut-il étreindre son vieil ami Casella ? Qu’est-ce que ce corps fait de l’air de l’au-delà qui permet aux âmes séparées d’éprouver toutes les souffrances auxquelles elles ont été condamnées ? Que penser de l’incomplétude des âmes bienheureuses du Paradis dont les jouissances augmenteront avec le retour de leur corps de chair à la fin des Temps ?

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Le texte du jour

Les âmes, qui s’étaient aperçues,
à me voir respirer, que je vivais encore,
devinrent toutes pâles d’étonnement.
Et comme un messager qui porte l’olivier
attire la foule curieuse de nouvelles
sans que nul n’ait souci de la cohue,
ainsi ces âmes fortunées
s’attachèrent toutes à mon visage,
comme oubliant d’aller se rendre belles.
Je vis l’une d’elles se jeter en avant
pour m’embrasser, avec tant de tendresse
qu’elle me poussa à faire comme elle.
Oh ombres vaines, sauf en leur apparence !
Trois fois j’étendis mes bras autour d’elle,
trois fois je les ramenai sur ma poitrine.
La stupeur, je crois, se peignit sur ma face ;
car l’ombre sourit et se retira,
et moi, je m’avançai en suivant ses pas.
Elle me dit doucement de m’arrêter ;
je la reconnus alors, et la priai
de rester un peu à me parler.
Elle répondit : « Comme je t’aimai
dans mon corps mortel, ainsi je t’aime déliée :
aussi je m’arrête ; mais toi, pourquoi vas-tu ? »

« Mon Casella », lui dis-je, « c’est pour revenir
là où je suis, que je fais ce voyage »,
« mais toi, pourquoi as-tu mis tout ce temps ? »

Et lui : « Je n’ai subi aucune offense,
si celui qui emmène qui et quand il lui plaît
m’a refusé plusieurs fois le passage,
car son vouloir vient d’un vouloir juste :
et vraiment il a pris, depuis trois mois,
en toute paix, tous ceux qui ont voulu monter.
Et moi, qui tournais alors mes pas vers la plage
où l’eau du Tibre devient salée,
je fus reçu bénignement par lui.
Il dresse à présent ses ailes vers l’embouchure,
car c’est toujours là qu’il recueille
ceux qui ne descendent pas vers l’Achéron.

Dante, Le Purgatoire, Chant II, v. 67-105.
Jacqueline Risset trad., Flammarion, 1985. Pléiade, 2021, p. 285-287.

Lectures

Dante, L’Enfer, Chant V, v.1-15 &amp ;amp ; 25-49, Jacqueline Risset trad., Flammarion, 1985.
Dante, Le Purgatoire, Chant II, v. 67-105, Jacqueline Risset trad., Flammarion, 1985.
Dante, Le Paradis, Chant XIV, v. 43-66 &amp ;amp ; 130-139, Jacqueline Risset trad., Flammarion, 1985.
Dante, L’Enfer, Chant XXXIV, v.118-139 , Jacqueline Risset trad., Flammarion, 1985

Extraits

Film « Warm Bodies » ou « Zombie malgré lui » de Jonathan Levine, 2013,
Archive : Jacques Le Goff « émission Les Chemins de la Connaissance, « Les Corniches du Purgatoire », 31/10/1995.
Fiction radiophonique sur l’Odyssée, 13/08/2000

Références musicales

Liszt,Totentanz S126, pour piano et orchestre
Lizst, Eine Symphonie zu Dantes divina comedia, Purgatorio, S109

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Épisode 4 : La naissance de l’humanisme

Gagnons le septième ciel, le paradis, pour comprendre comment Dante remet l’homme au centre de la création.


Représentation du Paradis d’après la Divine Comédie.
ZOOM : cliquer sur l’image.
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Ô comme le dire est faible et qu’il est court à ma pensée ! si court devant ce que j’écris, que dire "peu" ne suffit pas. (Paradis, XXXIII, v121-123)

Des visions enflammées, un ciel à perte de vue et les étoiles, au loin, brillant dans l’infini ! Comment décrire les beautés de l’espace quand on n’a que des mots ?Quelles réalités se cachent derrière le langage éthéré du poète ? Car Dante est aussi un humaniste, un homme qui promet l’éternité à ceux qui recherchent la connaissance avec honnêteté.

Carlo Ossola, professeur au Collège de France, auteur d’une belle Introduction à la Divine Comédie aux éditions Le Félin (2016) nous guide à travers les étoiles.

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Le texte du jour

O vous qui êtes en une petite barque,
désireux d’entendre, ayant suivi
mon navire qui vogue en chantant,
retournez revoir vos rivages,
ne gagnez pas le large, car peut-être
en me perdant vous seriez égarés.
L’eau que je prends n’a jamais été parcourue,
Minerve souffle, Apollon me conduit,
et neuf Muses me montrent les Ourses.
Vous autres, peu nombreux, qui avez levé
à temps le col au pain des anges, dont ici
on vit, mais dont on n’est jamais rassasié,
vous pouvez mettre en haute mer
votre bateau, en suivant mon sillage,
avant que l’eau ne redevienne égale.
Ces glorieux qui allèrent à Colchos
ne s’étonnèrent pas autant que vous ferez,
lorsqu’ils virent Jason devenir laboureur.
La soif innée et perpétuelle
du règne déiforme nous emportait,
rapides presqu’autant que vous voyez les cieux.
Béatrice regardait en moi, et moi en elle ;
et dans le temps peut-être qu’une flèche
s’arrête, vole, et quitte l’arc,
je me vis arrivé là où une merveille
attira mes yeux ; et alors celle
de qui ma pensée ne pouvait se cacher,
tourné vers moi, joyeuse autant que belle :
« Dresse ton esprit reconnaissant vers Dieu »,
dit-elle, « qui nous a joint à la première étoile ».
Il me semblait qu’un nuage nous couvrait,
brillant, épais, dense et poli,
comme un diamant frappé par le soleil.
A l’intérieur de soi cette perle éternelle
nous reçut, comme l’eau reçoit
un rayon de lumière en restant close.

Dante, Le Paradis, Chant II, v. 1-36.
Jacqueline Risset trad., Flammarion, 1985, p.140. Pléiade, 2021, p. 551-553.

Lectures

Dante, Le Paradis, Chant XXXIII, Jacqueline Risset trad., Flammarion, 1985, p.313-315

Extraits

Dante, Le Paradis, Chant 23, trad. Risset, v.58-93, p.291, (source fiction radiophonique La Divine comédie 16/05/2004)
Dante, Le Paradis, Chant 25, p.235 interprété par Claude Aufaure, France Culture, émission « Poésie sur parole »
Dante, Le Paradis, XVIII, v.1-39, p.263 , trad. Jacqueline Risset, p.257-259 (lecture Adèle Van Reeth)

Références musicales

Tony Benett, Stranger in Paradise
Liszt, Elsas Brautzug zum Münster S 445 n°2
Liszt, Ballade n°2 en si mineur
Liszt, 2 épisodes du Faust de Lenau
Liszt, Hamlet
Liszt, Saint François de Paule marchand sur les eaux

Crédit : France Culture

VOIR AUSSI : Une histoire des enfers

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[1Danièle Robert m’informe par ailleurs qu’Adèle Van Reeth consacrera une nouvelle série des « Chemins » à l’Enfer de Dante du 17 au 20 janvier 2022. Danièle Robert interviendra le 18. J’en reparlerai.

[2Georges Claisse est mort le 15 novembre 2021, à l’âge de 80 ans.

[3Correction de l’édition en Pléiade. A.G.

[4Idem.

[5Idem.

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