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Le journal du mois de décembre 2007

D 31 décembre 2007     A par Viktor Kirtov - C 3 messages Version imprimable de cet article Version imprimable    ................... PARTAGER . facebook


Sarkogénie


Décidément, Sarkozy m’inspire, sa vie est un roman fabuleux, la mienne aussi,
mais en sens contraire. Plus il s’étend à l’extérieur, plus je plonge à
l’intérieur, et c’est pourquoi je le devine mieux que personne. Tout ce que je
lis sur lui me semble faux, vieilli, superficiel, à côté de la plaque,
sourdement jaloux, fasciné à l’envers. Il faut le dire une bonne fois : Sarkozy
est le génie de notre époque, celle du spectaculaire intégral. Parler à son
sujet de « coups médiatiques », c’est ne rien comprendre au nouveau réel dans
lequel nous sommes entrés. J’entends murmurer qu’il serait vulgaire : oui, sans
doute, et alors ? L’ère planétaire est vulgaire, et la dominer nerveusement
n’est pas à la portée de n’importe qui. Sarkozy plus fort que tous les autres
guignols du spectacle ? C’est l’évidence, et tout patriote français devrait en
être fier. Les pauvres Américains, à travers Time, se dévoilent en parlant de la
mort de la culture française. Elle est pourtant là, ultravivante sous leurs
yeux, et ils ne voient rien. La preuve : le même Time proclame le triste Poutine
« homme de l’année ». Quelle misère ! Autre affirmation dérisoire : il n’y aurait
pas, aujourd’hui, en France, un seul écrivain qui ait une global significance.
Quel aveuglement ! Je suis là, pourtant, je suis global, et ma significance est
aussi variée que profonde. D’accord, on ne le sait pas assez, mais ça viendra.
Pour l’instant, imaginez seulement qu’au lieu du couple idéal Sarkozy-Bruni,
nous ayons aux commandes l’attelage poussif et provincial Ségo-Bayrou ! A quoi
n’avons nous pas échappé ! Vive la France !

Toujours plus fort

Il y a eu le voyage en Chine, et Sarko, très à l’aise au milieu de l’armée en terre cuite rassemblée pour lui ; sa mère, surtout, à qui le président chinois, ému, a offert un châle. Cette présence maternelle n’a pas été assez commentée, d’autant plus qu’une autre mère, celle de Carla Bruni, est arrivée par la suite. Les mères, les enfants, voilà qui est admirablement joué. La Chine ? Bientôt les
jeux Olympiques, et n’oublions pas que l’Opéra de Pékin est de construction française. Il y a eu ensuite Sarko en Algérie, les ruines de Tipasa, et le surgissement d’Albert Camus dans le discours présidentiel. Camus, c’est du solide, suivez mon regard, vers une union méditerranéenne et humaniste future.
Il y a eu l’ébouriffante mise en scène de la visite de Kadhafi à Paris, sa tente, ses amazones, sa virée au Louvre et à Versailles, sa chasse à Rambouillet, son allure de seigneur hirsute
et abrupt, ses déclarations de roi du désert, les indignations programmées
qu’il fallait, les affaires. Quel film !
Il y a eu, il y a toujours, l’attente fiévreuse d’Ingrid Betancourt et la
sollicitude permanente du président sauveur d’otages. Il y a eu le rapt de Carla
à Disneyland, nouvelle percée à gauche, sabre dans le caviar, la mode, la
chanson, les réseaux d’amants, la branchitude, Libération, Les Inrockuptibles,
les fantasmes poussés à bout, la fuite en Egypte, les mystères de Louxor,
l’annonce d’un mariage inouï et, pourquoi pas, d’un heureux événement (les mères
sont là), bref, un modèle de campagne à l’intérieur des lignes ennemies, avec,
en plus, promotion sociale du côté d’une très bonne famille italienne (aucune
française n’aurait fait le poids). Franchement, avez-vous vu mieux depuis
Bonaparte ? Du haut des pyramides, quarante siècles contemplent cet exploit. Le
Président est là, il jouit, il médite. Carla, le soir, lui chante doucement une
berceuse, et Hollywood se convulse d’envie. Vous persistez à me parler du
pouvoir d’achat, de l’augmentation des salaires et des sans domicile dans la
rue ? Quelle mesquinerie ! Et le penseur mondial de la gauche radicale, Badiou,
qui compare Sarko à Pétain ! Quelle ringardise ! Vous ne voyez donc pas ce soleil
nouveau de la République se lever sur le Nil ?

Encore plus fort


Là, le vieil anticléricalisme français en reste baba : Sarkozy chanoine, reçu par
le pape, et vantant les « racines chrétiennes » de la France. Déjà la conversion
tardive de Tony Blair au catholicisme avait de quoi inquiéter. Mais avec le
chanoine Sarko béni par Benoît XVI en même temps que le sansculotte Bigard, on
atteint des sommets révolutionnaires. Les vieux cathos sont épouvantés, les
anticathos stupéfaits : toujours l’attaque simultanée sur deux ailes, aucun
doute, le génie militaire est là. Le Président cite, pêle-mêle, Pascal, Bossuet,
Péguy, Claudel, Bernanos, Mauriac, Maritain, Mounier, René Girard, des
théologiens comme Lubac et Congar. Il offre à Sa Sainteté son livre
extraordinaire sur les religions et deux éditions originales de Bernanos, et
s’attire une remarque courtoise du pape, à savoir qu’il a déjà lu cet auteur
dans la Pléiade. Je vais proposer aux éditions Gallimard une publicité : « Le
pape lit la Pléiade. » Pas celle de Sade, assurément, mais sait-on jamais.
L’avenir nous dira si, par autorisation spéciale, le mariage de Sarko et Bruni
pourra être célébré à Notre-Dame de Paris. Avouez-le : ce serait grandiose, et je
ne manquerais pas de vous faire part de mes réflexions. Pour l’instant, juste un
peu d’eau froide : puisque le Président s’est mêlé de citer Pascal, une pincée
des Pensées ne lui fera pas de mal. « Qu’une chose aussi visible qu’est la
vanité du monde soit si peu connue, que ce soit une chose étrange et surprenante
de dire que c’est une sottise de chercher les grandeurs, cela est admirable. »
Quant à nos amis-ennemis américains qui nous voient culturellement morts,
rappelons-leur tout de même qu’à ce jour, chez eux, 124 condamnés à mort ont été
innocentés, dont 15 grâce aux tests ADN. Et soyons précis : dans plusieurs
Etats, dont la Californie, où les prisons comptent plus de 600 détenus en
attente d’être exécutés, des études ont mis en évidence le coût financier de la
peine capitale (jusqu’à 70 % de plus que pour une incarcération à perpétuité).

Littérature et politique


Poutine est donc, pour Time, « l’homme de l’année », et on voit à quel point cet
homme à poigne joue mieux aux échecs réels que Kasparov. Il peut truquer les
élections comme bon lui semble, on le félicite, et c’est normal. Les rapports
entre les pouvoirs et l’art (les échecs sont un art) n’ont jamais été aussi
parlants. On ne doit évidemment pas s’attendre à ce que Carla Bruni fasse
découvrir à Sarko la musique du grand Stockhausen, qui vient de mourir. Le
Président, nous venons de le constater, a augmenté ses références littéraires,
qui, jusque-là, se limitaient bizarrement à Voyage au bout de la nuit, de
Céline, et à Belle du Seigneur, d’Albert Cohen, deux livres entre lesquels,
pourtant, le goût le plus élémentaire exige de choisir. Mais Ségo ? Quels sont
ses auteurs préférés ? Elle les a cités : Rabelais, Flaubert, Camus, Erik
Orsenna, Nina Bouraoui, Marie N’Diaye, Fred Vargas. Liste surprenante, pour ne
pas dire en chute libre à partir de Camus, lequel se retrouve, in extremis, chez
Sarkozy. Camus est donc un auteur d’union nationale. L’unanimité, en
littérature, n’est jamais très bon signe (sauf si on saute un ou deux siècles),
et c’est pourquoi, aujourd’hui, l’excellent Modiano devrait se méfier. Il arrive
pourtant qu’un écrivain suscite un véritable accord, sorte d’hommage du vice à
la vertu, sacre d’ailleurs plus moral qu’esthétique. C’était le cas de
Julien Gracq, le patriarche de Saint-Florent-le-Vieil, que ses admirateurs allaient
visiter en pèlerinage. Il vient de mourir, à 97 ans, et il serait étonnant que
Time lui consacre une couverture. Il est l’un des quelques auteurs français à
être entré de son vivant dans la Pléiade. Le Président a loué, comme de juste,
son retrait et sa discrétion. C’est un très bon écrivain, que je me rappelle
avoir plutôt aimé à l’âge de 14 ou 15 ans, et j’ai été touché que, dans l’une de
ses dernières interviews, il ait déclaré lire avec plaisir mon Dictionnaire
amoureux de Venise. Grand paysagiste, grand lecteur, aussi peu spectaculaire que
possible (ce que le spectacle apprécie, avec toute l’hypocrisie dont il est
capable), et d’une honnêteté scrupuleuse. Professeur de géographie, membre du
Parti communiste dans sa jeunesse, admirateur de Breton, Jules Verne, Stendhal
et Chateaubriand, il va rester comme un éveilleur important et mineur. Son grand
fait d’armes aura été, en 1951, d’avoir refusé le prix Goncourt. Par la suite,
en douce, il a eu le prix Goncourt tous les jours. Comme Sartre, en somme, qu’il
détestait, et qui, refusant le prix Nobel, se le voit décerner chaque année.
Sartre est le grand vaincu des temps modernes, et on ne relira jamais assez La
Nausée
. Mais place, maintenant, au centenaire de Simone de Beauvoir, dont, à
juste titre, vous allez entendre beaucoup parler. Allons, allons,
bonne année !

Philippe Sollers
Journal du Dimanche, 30 décembre 2007

—oOo—




A propos ...de travers
Un nouveau mot sarkozien, dans sa guerre des mots :"Renaissance", au sens historique, appelée des voeux sarkoziens pour 2008, l’année 120 nietzschéo-sollersienne, ou l’année chinoise du rat ...alors que je découvrais cette information chinoise qui mérite méditation :
"en même temps qu’apparaissent de nouvelles fortunes en Chine,réapparaissent les concubines selon la bonne tradition impériale..." pas que des petits rats de l’Opéra !

...Pour une nouvelle "Renaissance" à l’échelle mondiale, ce n’est pas Carla Bruni que Nicolas sarkozi aurait dû pressentir comme nouvelle concubine, mais une authentique chinoise. L’union de la vieille Europe déclinante et de la Chine millénaire, ce nouvel astre montant (qui vient de passer, à Noël, au niveau N°3 des puissances économiques mondiales, devant l’Allemagne,... pied de nez à St Nicolas !), voila qui aurait eu de la gueule ! En poussant Carla dans les bras de Sarkozi, Ségala a manqué de flair - signe de vieillissement - et Sarko d’ambition - signe d’essoufflement. Quelle occasion de spectacle planétaire manquée ! Et sûr, que dans son journal de décembre 121, Ph. Sollers aurait pu rendre compte du choix du Time célébrant Sarko, comme homme de l’année détrônant, l’anticharismatique et froid serpent Poutine... A moins qu’américanisme aidant, le Time n’ait élu comme homme de l’année, une femme, Hilary Clinton.

Belle année en perspective, la Chine triomphante et l’Amérique à la une ! Le combat des nouveaux gladiateurs pour la suprématie sur la nouvelle Rome planétaire. Le XXème siècle avait commencé en 1914 à Sarayevo, le XXIème commence en 2007 à Pékin.

PS : Dans son prochain remaniement ministériel, Sarkozy devrait sérieusement songer à s’adjoindre un conseiller chinois et transférer la Villa Médicis à Pékin. Une réforme hautement symbolique de rupture et redistribution de notre présence culturelle selon la nouvelle cartographie planétaire qui n’est plus centrée sur Rome. Et l’image de "Renaissance" pour belle qu’elle soit, est aussi une image centro-européenne... Difficile de se débarasser de nos vieux démons... quand il faudrait les transmuter en jeunes dragons. Plus que jamais, Sarko, qui ne pense qu’ouverture sur les terres socialistes, autre vieille lune du début du XXème siècle (pardon aux vrais socialistes) devrait envisager l’ouverture chinoise... Il lui manque vraiment un conseiller chinois..., ou mieux, une conseillère. Une jolie face de lune, à côté de Rama Yade. Et Carla, au milieu. Trois madones des temps modernes, Raphaël, au secours ! Et j’entends, en ce moment, que le Canard enchaîné inaugure 2008 avec une nouvelle rubrique : Le journal de Carla B.

Quelle belle année en perspective !

pileface

—oOo—
Philippe Sollers a oublié, dans son journal du mois, les deux concerts donnés au Théâtre des Champs Elysées, par son amie Cécilia Bartoli. A guichet fermé.

Cécilia Bartoli célèbre Maria

Propos recueillis par Eric MANDEL
lejdd.fr, 14 décembre 2007

Après vingt ans d’une carrière exigeante couronnée par des ventes d’albums sans équivalent dans la musique classique (son Vivaldi s’est écoulé à 600 000 exemplaires), Cécilia Bartoli signe son retour avec Maria. Un hommage à la diva Maria Malibran (1808-1836). Dans la foulée, la mezzo soprano italienne investit le Théâtre des Champs-Elysées pour deux récitals (vendredi 14 et dimanche 16 décembre 2007).

Pourquoi avoir choisi de célébrer aujourd’hui le répertoire de Maria Malibran avec votre album Maria ?
Ce disque permet de redécouvrir la musique préromantique. Peu de personnes ont pris l’initiative de jouer cette musique, le bel canto, avec des instruments d’époque. Sauf John Edward Gardiner et son orchestre révolutionnaire romantique. Le bel canto joué par les instruments anciens, ça donne une nouvelle dimension, un vrai dialogue entre la voix et l’orchestre. Et puis je voulais rendre hommage à Maria Malibran, la diva des divas...

Qu’est-ce qui vous a tant séduit chez elle ?
Elle était la première et la plus grande artiste pop du 19eme siècle ! Et je pèse mes mots quand j’emploie le mot "pop". On peut comparer sa popularité avec celle d’artistes comme Madonna, Michael Jackson ou les Rolling Stones. Sa vie pourrait servir de trame à une grande production hollywoodienne, sans doute plus spectaculaire qu’Amadeus. Elle a mené une vie passionnante et tragique, elle est morte après une chute de cheval, à 28 ans, comme tous les mythes emportés trop jeunes, comme Janis Joplin, Hendrix ou Jim Morrison, tous disparus à 27 ans. Pour ses funérailles, plus de 50 000 personnes s’étaient rassemblés à Manchester ! Et puis, elle était une femme moderne, elle conduisait la diligence, composait, peignait, portait des pantalons, elle a lutté pour l’émancipation des femmes. Elle fut mariée à 17 ans, un mariage arrangé par son père. Mais son grand amour était le violoniste Charles de Bériot. Même mariée, elle décidera de vivre avec le violoniste et aura des enfants de lui. Un scandale à l’époque.

Comme "La Malibran", vous êtes une mezzo-soprano. Vous avez, comme elle appris la musique par vos parents, musiciens...
Oui, il existe des connexions. Nous avons commencé au même âge, avec le même rôle : Rosine dans Le Barbier. "La Malibran" était, elle, issue d’une grande dynastie de musiciens. Son père, Manuel Garcia, était un grand musicien ténor, Rossini avait écrit Le Barbier de Séville, spécialement pour lui. La troupe Garcia fut la première à jouer la musique de Mozart à New York. Son père était dur, très autoritaire, un homme qui venait de l’Andalousie, il avait une fierté mâle. Mais sans lui, "La Malibran" ne serait jamais devenue "La Malibran".

La singularité de Maria Malibran réside également dans son rapport libre, et souvent conflictuel, avec la tradition...
C’était un cas unique et révolutionnaire. "La Malibran" était loin de l’école statique des divas, elle était contre la rigueur et le protocole de l’époque, elle pouvait même improviser sur scène. Aujourd’hui, on a perdu cette liberté, un chanteur classique qui improvise, c’est rarissime.

"La pop traverse une crise d’identité"

Le 24 mars prochain, vous allez célébrer le bicentenaire de Maria Malibran à Paris de façon originale...
Je vais offrir un marathon Malibran. Trois récitals dans la même journée, le matin, l’après-midi et le soir, à la salle Pleyel. Comme du temps de la Malibran.

Et après, vous avez prévu un "aftershow" ?
Non ce sera plutôt l’ambulance (rires)... Cela dit, après ses concerts, elle donnait souvent des représentations privées, dans les cercles aristocratiques. C’était les "aftershows" de l’époque.

Parallèlement à l’enregistrement de cet album, vous avez entrepris un véritable travail d’historien autour de Maria Malibran...
En Espagne, on m’appelle "l’Indiana Jones de l’Opéra". Il y a ce côté Indiana Jones en moi. Petit à petit, j’ai amassé une collection de 80 pièces : des lettres de Malibran ou de Rossini, des partitions originales, ses bijoux, des objets à son effigie vendus à la fin de ses concerts... D’une certaine manière elle avait inventé le merchandising et le marketing direct. Et j’ai décidé de mettre cette collection dans un camion, le muséomobile, qui sera stationné à l’entrée des salles, où je donne des concerts. C’est important pour les jeunes de voir qui était la première diva, avant Christina Aguillera.

Vous vous intéressez à la musique pop ou au rock ?
J’aime écouter les Rolling Stones. Mais je suis frappé de voir tous ces vétérans revenir sous les feux de la rampe, c’est quand même incroyable. Selon moi, la pop traverse une crise d’identité. Il suffit de regarder MTV, les carrières sont limitées à un an maximum. On mise sur l’esthétique et la beauté, des filles douées pour le déhanchement de bassin, mais après c’est musicalement très pauvre. Et trois mois plus tard, on revoit une autre beauté, qui sera elle-même remplacée quelques mois plus tard. Aujourd’hui, les jeunes écoutent Shakira, ce n’est pas possible ! Certes, Beyoncé possède une belle voix, mais son chant manque cruellement de nuances et de finesse.

CD : Maria (Decca/Universal),Edition collector limitée, CD+DVD Edition spéciale

Avec "Maria", Cecilia Bartoli rend certes un hommage en miroir à Maria Malibran. La mezzo romaine signe un nouveau joyau discographique parmi les plus aboutis.
(classiquenews.com)

Cécilia Bartoli chante Maria Malibran - Ma-Tvideo France2
Cécilia Bartoli chante Maria Malibran - Ma-Tvideo France2

Le 24 mars 2008 à la Salle Pleyel.

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Pour bien finir l’année, voici quelques fleurs. Ou, plus modestement, des pétales. Des phrases extraites de quelques-uns des livres que j’ai lus en 2007. Citations, minuscules fragments, bribes. Brimborions qui interpellent, amusent, déconcertent ou séduisent.

De Vassilis Alexakis : "Un philosophe présocratique du nom de Clinias, à la question ’quand devons-nous tomber amoureux ?’ répond : ’quand nous voulons souffrir’." Ap. J.-C.

De Gilles Leroy : "On dit que ma folie nous a séparés. Je sais que c’est juste l’inverse : notre folie nous unissait. C’est la lucidité qui sépare." Alabama Song.

D’Eric Fottorino : "La veille, nous avions fait l’amour comme on fait des provisions." Baisers de cinéma.

De Pierre Assouline : "Dans certaine société, savoir s’exprimer en cinq langues, c’est aussi savoir se taire en cinq langues." Le portrait.

De Frédéric Beigbeder : "Les Américaines sont trop saines, les Françaises trop capricieuses, les Allemandes trop sportives, les Japonaises trop soumises, les Italiennes trop jalouses, les Anglaises trop saoules, les Hollandaises trop libérées, les Espagnoles trop fatiguées ! Restent les Russes." Au secours pardon.

De Gilles Lapouge : "Il existe en Europe un pays qui fut créé par ses peintres. Ce pays est la Hollande." L’encre du voyageur.

De Lydie Salvayre : "Car les pauvres sont indémodables, universels et toujours recommencés, on dirait même qu’ils ont tendance à croître et à multiplier, et que leurs réserves, contrairement à celles du pétrole, augmentent, perspective extrêmement réconfortante." Portrait de l’écrivain en animal domestique.

D’Arthur Rimbaud : "Maintenant, je m’encrapule le plus possible. Pourquoi ? Je veux être poète, et je travaille à me rendre voyant : vous ne comprenez pas du tout, et je ne saurais presque vous expliquer. Il s’agit d’arriver à l’inconnu par le dérèglement de tous les sens. Les souffrances sont énormes, mais il faut être fort, être né poète, et je me suis reconnu poète." Correspondance, lettre à son ancien professeur, Georges Izambard.

De Philippe Sollers : "On pléiadisera Roth et Kundera, Le Clézio et Modiano, mais pour moi, c’est moins sûr, attendons ma mort, qui fera, peu à peu, monter ma réputation au beau fixe." Un vrai roman.

De Vincent Delecroix : "C’est au cours de l’une de ces libres conversations que j’avais avec lui (Montaigne) trois fois par semaine (le mardi, le jeudi et le samedi) que j’ai découvert que j’allais mourir - chose qui ne m’avait pas effleuré un instant pendant plus de quarante ans [...]. Sous l’impulsion de Montaigne, j’ai aussi repeint le plafond de mon appartement." La chaussure sur le toit.
[...]

Meilleurs voeux à tous pour 2008,

Bernard Pivot

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