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L’Eternité retrouvée ? Nouvelle vente de manuscrits de Rimbaud

Vente le 8 décembre

D 16 novembre 2023     A par Albert Gauvin - C 1 messages Version imprimable de cet article Version imprimable    ................... PARTAGER . facebook


Toute la presse régionale du Grand Est en parle, relayée bientôt par les médias nationaux. Disparu, nous dit-on, depuis 1919, le manuscrit de la poésie « bien connue » de Rimbaud L’Éternité, réapparaît mystérieusement et sera mis en vente le 8 décembre par la maison Piasa à Paris. On ne l’avait jamais vu ! Le scoop !

On comprend la joie d’avoir entre ses mains expertes le manuscrit original. Sauf que... le dit manuscrit est connu et son fac-simile figure déjà, entre autres, dans « l’intégrale » de Claude Jeancolas Les manuscrits de Rimbaud que j’ai sous les yeux (textuel, 2012, p. 397). Mais ce n’est pas le plus important.
Car, par ailleurs, les experts (je ne parle pas des journalistes qui ont autre chose à faire) semblent tous penser que cette version de L’Éternité est celle publiée par Rimbaud dans Une saison en enfer. C’est, hélas pour eux, faux. Rappelons donc — ce que tout le monde sait ou devrait savoir — qu’il existe trois versions de L’Éternité. La première, la plus connue, la plus citée, date de mai 1872 (c’est la version manuscrite qui sera mise en vente le 8 décembre). La deuxième a été publiée dans La Vogue en 1886 (on n’en connaît pas le manuscrit ni la date de rédaction). La troisième version est celle que Rimbaud a expressément et significativement corrigée pour « Alchimie du Verbe » dans Une saison en enfer. Le manuscrit en est également inconnu. Le retrouver serait une vraie découverte car seul le titre — Éternité — figure dans le manuscrit d’Une saison (cf. Jeancolas, op. cit., p. 449 ; Patty Smith, Gallimard, 2023, p. 35 ; Poésie/Gallimard, 2023, p. 13, préface de Yannick Haenel) . Sur la différence entre les deux premières versions et celle finalement retenue par Rimbaud pour son édition d’Une saison en enfer (Alliance typographique (M.-J. Poot et compagnie), 37, rue aux Choux, Bruxelles), je me permets de renvoyer à l’analyse très fine du « resserrement de l’expérience » que fait Philippe Sollers dans La divine comédie (Desclée de Brouwer, 2000) sous le titre L’éternité retrouvée et que j’ai mise en ligne le 16 octobre dernier [1].

Cela précisé, s’il y a « événement », c’est que le manuscrit est mis aux enchères. Qui le possédait ? Qui en sera l’acheteur ? Le saura-on un jour ? Quel en sera le prix ? Est-ce si important ? Pour le marché sans doute. Il y a 150 ans, Rimbaud faisait imprimer à compte d’auteur Une saison en enfer. Prix : un franc [2].

En tout cas, voici l’article de France Bleu Champagne-Ardenne qui nous révèle l’existence d’autres manuscrits mis en vente (trois lettres de Rimbaud à sa mère et à sa soeur et un manuscrit de Baudelaire, entre autres).

Le manuscrit d’un poème de Rimbaud bientôt vendu aux enchères

Charleville-Mézières

De Alexandre Blanc

Mardi 14 novembre 2023 à 15:55

Le manuscrit original du poème "L’Éternité" d’Arthur Rimbaud est la pièce-maîtresse de la vente du fonds d’un bibliophile anonyme, organisée par la maison Piasa, le 8 décembre à Paris. Estimé 2 à 300 000 euros, le document refait surface après un siècle dans le secret de collections privées.

"C’est un peu comme si on redécouvrait la Joconde, mais en littérature, c’est assez exceptionnel !", s’enthousiasme Thibaud Cardera, commissaire-priseur de la vente "Collection d’un amateur : poésies du 19e siècle" organisée le 8 décembre prochain par Piasa, à Paris et en ligne.

Sur les 202 éditions originales, lettres autographes et poèmes manuscrits de Charles Baudelaire, Paul Verlaine, Victor Hugo et autres grandes figures au catalogue, figure en effet le seul manuscrit connu à ce jour du poème "L’Eternité", d’Arthur Rimbaud. Les organisateurs de la vente sont venus le présenter ce mardi à Charleville-Mézières.

Le manuscrit réapparaît un siècle après

Depuis sa première publication par Rimbaud dans "Une Saison en enfer" en octobre 1873, le manuscrit n’a ressurgi qu’une fois. "Il a été vu et imprimé en 1919 et, depuis plus d’un siècle, c’est la première fois qu’on le voit", explique le libraire Jean-Baptiste de Proyart, expert de cette vente. En 1919, l’original était encore entre les mains du poète Jean Richepin, à qui Arthur Rimbaud l’avait donné. À la mort de celui-ci, il est resté dans le secret de collections privées.

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Manuscrit du poème "L’Eternité", d’Arthur Rimbaud
Stéphane Briolant / Piasa

On ne connaîtra pas non plus le nom de son dernier détenteur puisque la famille du bibliophile et collectionneur dont le fonds est mis en vente souhaite préserver l’anonymat.

Estimé 200 000 à 300 000 euros

La page de 21 centimètres sur 15, écrite à l’encre brune, datée de mai 1872, est estimée 200 à 300 000 euros. "Il n’y a pas d’équivalent en terme de prix : Rimbaud est plus cher qu’Edgar Poe, plus cher que les grands poètes américains", souligne Jean-Baptiste de Proyart.

À titre de comparaison, au catalogue de cette vente, le manuscrit sur trois pages du poème "Fantômes parisiens", agrémenté d’un dessin de la main de Charles Baudelaire, est estimé 120 000 à 160 000 euros.

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Lettre manuscrite d’Arthur Rimbaud à sa soeur,
envoyée depuis son lit d’hôpital à Marseille.
Stéphane Briolant / Piasa

Seront également mis aux enchères lors de cette vente trois lettres envoyées par Rimbaud à sa mère et à sa soeur. Celle du 23 juin 1891 a été adressée depuis son lit d’hôpital à Marseille où il vient d’être amputé d’une jambe. "Enfin notre vie est une misère, une misère sans fin ! Pourquoi donc existons-nous ?", peut-on lire sur le document estimé 60 000 à 80 000 euros. Arthur Rimbaud mourra quelques mois plus tard, le 10 novembre 1891.

Alexandre Blanc
France Bleu Champagne-Ardenne


Baudelaire, Fantômes parisiens.
Zoom : cliquez sur l’image.

Baudelaire, Fantômes parisiens.
Zoom : cliquez sur l’image.

[1On peut aussi se reporter à l’analyse des trois versions qui a été mise en ligne en 2008 sur ce site. Le manuscrit de la version de mai 1872 mis en vente y figurait déjà.


Les trois versions de L’Éternité.
ZOOM : cliquer sur l’image.

[2Le Monde du 19 novembre 1998 :

« La version manuscrite d’Une saison en enfer d’Arthur Rimbaud, adjugée 2,9 millions de francs lors d’une vente aux enchères mardi 17 novembre, a été préemptée par la Bibliothèque nationale. L’édition originale des Chants de Maldoror, de Lautréamont, datée de 1868, est montée à 480 000 francs. Au total, la vente de la collection a rapporté 12,08 millions de francs (frais compris). »

Le 19 novembre 2019, Une Saison en enfer [Bruxelles, Alliance typographique, 1873. In-12 (18,3 x 12,4 cm), veau glacé noir, dos à nerfs, doublure de maroquin blanc, garde de soie noire, tranches dorées, couverture et dos conservés, étui bordé (Huser)] a été vendu 12 638 € par Artcurial.

1 Messages

  • Albert Gauvin | 10 décembre 2023 - 14:47 1

    France Bleu Champagne-Ardenne, 8 décembre 2023.

    Adjugé deux fois sa valeur estimée. Le manuscrit original du poème "l’Éternité" du poète natif de Charleville-Mézières Arthur Rimbaud s’est vendu 540.000 euros ce vendredi 8 décembre, lors d’une vente aux enchères à Paris. Écrit en 1872, il a été publié l’année suivante dans le recueil "Une saison en enfer". Le nom de l’acheteur n’est pas connu.

    L’original du texte était considéré comme la pièce maîtresse de la vente du fonds d’un collectionneur anonyme, organisée par la société Piasa et en ligne. Il était estimé au départ entre 200.000 et 300.000 euros. Au total, 202 lots dont des lettres et poèmes manuscrits de Charles Baudelaire, Paul Verlaine et Victor Hugo ont aussi été mis en vente.