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Philippe Forest : "Philippe Sollers, romancier, critique, essayiste, est mort"

Série Témoignages

D 12 mai 2023     A par Viktor Kirtov - C 1 messages Version imprimable de cet article Version imprimable    ................... PARTAGER . facebook


Philippe Forest est un fin connaisseur de l’univers sollersien. Il avait commencé par écrire une thèse sur la revue Tel Quel et l’avant-garde que représentait Philippe Sollers
Un document de référence par le meilleur exégète de Sollers
Aussi, un guide de lecture de son oeuvre.
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Philippe Sollers, romancier, critique, essayiste, est mort
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L’écrivain, auteur de « Paradis », « Femmes » et « La Guerre du goût », fondateur des revues « Tel Quel » et « L’Infini », longtemps collaborateur du « Monde des livres » , est mort le 5 mai à Paris, à l’âge de 86 ans.

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Par Philippe Forest, écrivain
Le Monde, 06/05/2023


Philippe Sollers, à Paris, le 15 janvier 2011. JEAN-LUC BERTINI / PASCO
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Philippe Sollers aimait à le raconter : lorsqu’il fit, en1960, la connaissance d’André Breton, celui-ci lui offrit un exemplaire de Manifestes du surréalisme qu’ornait la dédicace suivante : « A Philippe Sollers, aimé des fées. » Sollers s’amusait volontiers de ceux qui, usant d’une image semblable et, comme je le fais à mon tour au lendemain de sa mort, se plaisaient à rappeler que les fées s’étaient autrefois penchées sur son berceau. On se dit désormais que c’était pourtant vrai, que cette « fatalité de bonheur » dont parle Arthur Rimbaud dans Une saison en enfer, maintenant qu’elle est finie, semble avoir décidé de sa vie.

Philippe Sollers (Joyaux, de son vrai nom) est mort le 5 mai, à Paris, à l’âge de 86ans. Il sera enterré dans une stricte intimité familiale à Ars-en-Ré (Charente-Maritime). Selon sa volonté, une messe catholique sera célébrée. Il était né le 28 novembre1936, à Talence (Gironde), près de Bordeaux, ville qui constitua pour lui, avec Venise, l’autre capitale de cette grande civilisation du Sud en laquelle il reconnaissait sa seule vraie patrie, celle de Friedrich Hölderlin et de Casanova.

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Il a relaté, principalement dans Portrait du joueur (Gallimard, 1985), son enfance de fils de la bourgeoisie aisée et la légende familiale de ses origines. Etudiant en sciences économiques – parce qu’on le destine à la direction de l’usine paternelle –, il prend dès que possible la tangente sous l’effet de ses premières lectures, avec le soutien et sous l’influence de son premier mentor, le poète Francis Ponge.

A 22 ans, Sollers est déjà un écrivain célèbre. En 1957, il publie dans la revue Ecrire, créée aux éditions du Seuil par Jean Cayrol afin d’y accueillir les jeunes talents, une nouvelle, « Le Défi », à laquelle va le prix Fénéon. Comme il est encore mineur, il lui faut user d’un pseudonyme qu’il tire de son dictionnaire de latin : « sollers », c’est-à-dire « tout entier art ».

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L’année suivante, toujours au Seuil, paraît son premier roman, Une curieuse solitude. Autant « Le Défi » est une œuvre adolescente et qui ne mérite guère de passer à la postérité, autant Une curieuse solitude impressionne par sa maîtrise et sa maturité, la réflexion proprement littéraire proposée sous le signe précoce de Proust. Mauriac dans L’Express, puis Aragon dans Les Lettres françaises saluent semblablement la naissance d’un authentique écrivain en la personne du jeune auteur. Ce qui faisait dire à Sollers que, ainsi célébré par un écrivain catholique et par un écrivain communiste, son baptême littéraire, il l’avait reçu à la fois du Vatican et du Kremlin.

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Reconnaissance immédiate

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C’est l’époque où, peu après le phénoménal succès de Françoise Sagan, un vent de jeunesse semble souffler sur la vieille littérature française. A ce titre, Philippe Sollers apparaît aussitôt comme un des meilleurs espoirs de la « nouvelle vague » sur laquelle misent alors les éditeurs. Fort de la reconnaissance immédiate dont il jouit, avec quelques écrivains de son âge, parmi lesquels Jean-Edern Hallier et Jean-René Huguenin, il crée au Seuil, en1960, la revue trimestrielle Tel Quel. L’année suivante, pour son deuxième roman, Le Parc (Seuil), il obtient le prix Médicis. Mais le livre crée la surprise et suscite parfois la déception. On l’interprète comme le signe du ralliement de son auteur aux funestes théories du Nouveau Roman alors défendues par Alain Robbe-Grillet. Véritable poème romanesque, Le Parc constitue un témoignage sur la guerre d’Algérie où l’un des meilleurs amis de Sollers vient de perdre la vie. Mobilisé à son tour, et afin d’échapper au sort qui le menace, le romancier simule la folie et ne doit d’être finalement réformé qu’à l’intervention personnelle d’André Malraux.


Comité des intellectuels pour l’Europe des libertés. De gauche à droite : Philippe Sollers, Alain Ravennes, Eugène Ionesco et Raymond Aron, à Paris, le 23 juin 1978.. SOPHIE BASSOULS/SYGMA /GETTY
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A la tête de Tel Quel, revue dont des poètes comme Marcelin Pleynet, Denis Roche ou Jacqueline Risset rejoignent le comité de rédaction, Sollers s’affirme vite comme l’une des principales figures de l’avant-garde littéraire des années 1960.

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Avec des livres comme Drame et Nombres (Seuil, 1965 et 1968) s’invente alors l’« écriture textuelle » par laquelle le roman se prend lui-même pour objet, se transformant en une exploration toujours reprise des sources dont il naît. Cette entreprise expérimentale dans laquelle s’engage Sollers – et qui doit moins au Nouveau Roman qu’au surréalisme et à la phénoménologie – suscite l’attention soutenue de quelques penseurs de premier plan : ainsi Michel Foucault, lecteur du Parc, mais surtout Roland Barthes (qui consacrera à l’auteur de Drame l’un de ses derniers livres : Sollers écrivain, Seuil, 1979) et Jacques Derrida (dont La Dissémination – Seuil, 1972 – procède d’une lecture de Nombres). A ces noms on doit ajouter celui de Julia Kristeva, jeune étudiante bulgare nouvellement arrivée en France, y faisant aussitôt forte impression, elle-même linguiste, psychanalyste et écrivain – elle est destinée à devenir l’une des plus éminentes représentantes de ce que l’on nomme, de l’autre côté de l’Atlantique, la « French Theory » –, que Sollers épouse en1967 et à laquelle il restera uni jusqu’à la fin de sa vie.

Tel Quel apparaît comme le principal laboratoire d’une avant-garde littéraire engagée dans un dialogue avec toutes les formes nouvelles d’une pensée théorique, souvent stigmatisée par ses adversaires en raison de son « terrorisme », qui connaît son apogée sous le signe du structuralisme et trouve son expression dans Théorie d’ensemble (Seuil, 1968), un recueil collectif rassemblant les contributions les plus significatives parues dans les pages de la revue. Sur un modèle qui fut celui des surréalistes – mais avec Antonin Artaud et Georges Bataille plutôt qu’André Breton et Louis Aragon comme figures tutélaires –, l’idée est de conjuguer révolutions poétique, théorique et politique.

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La langue chamboulée

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Dans l’euphorie et la confusion qui entourent les événements de Mai-68, après un bref mais compromettant compagnonnage avec le Parti communiste français, Sollers et ses amis de Tel Quel s’enflamment pour la cause exotique et douteuse de la Révolution culturelle. Au printemps 1974, la revue dépêche une délégation au pays de Mao. Sur cet engagement, Sollers s’est toujours refusé à se livrer à la franche autocritique que certains exigeaient de lui : expliquant avoir alors choisi le camp chinois pour mieux rompre avec le néo-stalinisme du communisme officiel, soviétique ou français, et par goût d’une civilisation dont tous ses livres témoignent en effet de la fascination qu’elle a exercée sur lui et dont on retrouve d’insistants échos – particulièrement à la poésie et à la pensée chinoises –, jusque dans les plus récents.

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Avec Lois (Seuil, 1972), la manière romanesque de Sollers change de façon spectaculaire. A l’épure de parole poétique que proposaient ses livres précédents se substitue une écriture qui, inspirée du Finnegans Wake, de James Joyce, et des Cantos, d’Ezra Pound – deux autres des références essentielles de Tel Quel –, chamboule la langue et assume sa dimension lyrique et épique.

La voie est ouverte qui conduira à Paradis (publié en feuilleton dans Tel Quel à partir de 1974 ; Seuil, 1981), certainement l’un des sommets de l’œuvre de Sollers et peut-être, tout simplement, l’un des plus grands livres de la littérature française de la seconde moitié du siècle passé : texte total déroulant le long ruban d’une écriture sans ponctuation, proposant de notre présent une vision à la fois poétique et prophétique d’une singulière puissance.

A l’époque, certains ont pu rester aveugles à une telle littérature qu’ils ont déclarée « illisible », mais – à condition de ne pas ajouter au handicap de la cécité celui de la surdité – les lectures à haute voix de Paradis par leur auteur, dont la mémorable « performance » fut filmée par Jean-Paul Fargier (Sollers au Paradis, 1983), auraient dû suffire à convaincre les lecteurs les plus réfractaires.

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Fin des avant-gardes

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Dès 1977, soit quelques années avant qu’une telle idée ne devienne un lieu commun, lors d’une conférence prononcée au Centre Pompidou et publiée d’abord dans les pages amies du magazine Art Press, Sollers prend acte de la fin des avant-gardes et de la nécessité d’un dépassement de celles-ci. Un pareil projet détermine le virage que négocie l’auteur au début de la décennie suivante. Avec Femmes (Gallimard, 1983), dans une écriture d’une lisibilité retrouvée, il livre un roman à clés, où, revenant sur son propre parcours personnel et littéraire, Sollers propose une fresque de l’histoire intellectuelle récente avec pour personnages principaux Roland Barthes, Louis Althusser, Jacques Lacan et quelques autres.

Lire notre archive (1983) Article réservé à nos abonnés « Femmes », de Philippe Sollers : chronique rusée d’un libertin catholique

Le roman rencontre un réel succès et défraye la chronique. Il paraît aux éditions Gallimard, qui, après un bref passage dans leur filiale Denoël (1983-1987), vont également accueillir la nouvelle revue de l’écrivain, L’Infini, qui succède à Tel Quel (avec le même secrétaire de rédaction, le poète Marcelin Pleynet), et la collection qui l’accompagne, avec, parmi les premiers titres au catalogue, Vivre, de Pierre Guyotat (Denoël, 1984), ou Le XIXe Siècle à travers les âges, de Philippe Muray (Denoël, 1984). Sollers rejoint ainsi ce qu’il nomme la « banque centrale » de la littérature française, dont, avec le soutien d’Antoine Gallimard, il devient un des écrivains et des éditeurs les plus emblématiques.

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Éditeur ‏ : ‎ SEUIL (1992)
‎ 352 pages

Une telle métamorphose modifie substantiellement l’image de Sollers. Les derniers partisans de l’avant-garde avec laquelle il a rompu le traitent en renégat. Sauf exceptions (dont la thèse qu’en1991 je lui consacre en Sorbonne, Philippe Sollers, Seuil, 1992), l’Université l’ignore, qui lui préfère des auteurs moins flamboyants et mieux conformes à l’idée qu’elle se fait de la littérature. La critique n’est pas toujours bien disposée à l’égard de ses romans. Mais la personnalité et la pensée de Sollers attirent à lui de nombreux écrivains, plus ou moins durablement ses interlocuteurs, alliés ou complices (après Barthes et Derrida, Bernard-Henri Lévy ou Milan Kundera, par exemple), certains appartenant à sa génération, d’autres plus jeunes.

Sans constituer autour de lui un groupe ou un mouvement, ils se reconnaissent à des titres divers dans l’idée de la littérature qu’il incarne, donnant leurs textes dans sa revue ou dans sa collection. Ainsi, parmi les auteurs publiés dans Tel Quel ou dans L’Infini (et pour me limiter aux seuls noms que

Sollers a lui-même mis en avant dans l’une des pages de ses Mémoires, Un vrai roman, Plon, 2007) : Pierre Guyotat, Jacques Henric, Frédéric Berthet, Jean-Jacques Schuhl, Yannick Haenel et François Meyronnis, ou encore moi-même – qui puis témoigner de l’éclat dont brillait la figure de Sollers dans les années 1980 et 1990.

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Brillant et caustique

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Alors que se met en place la contemporaine « société du spectacle » qu’il dénonce pour la nouvelle forme de tyrannie dont elle est solidaire, Sollers apparaît comme l’un des rares authentiques écrivains dont la notoriété dépasse le cercle de plus en plus restreint des amateurs de vraie littérature. Il intervient à la télévision ou dans la presse, soucieux de faire résonner la contradiction partout où cela est possible, comme dans son retentissant article « La France moisie », publié dans Le Monde en1999, où il s’en prend, à propos de récentes déclarations de Jean-Pierre Chevénement, alors ministre de l’intérieur, à la France qui « a toujours détesté, pêle-mêle, les Allemands, les Anglais, les Juifs, les Arabes, les étrangers en général, l’art moderne, les intellectuels coupeurs de cheveux en quatre, les femmes trop indépendantes ou qui pensent, les ouvriers non encadrés, et, finalement, la liberté sous toutes ses formes ». Ces interventions révèlent un observateur brillant et un causeur caustique, parfois mordant, souvent virtuose dans l’art du paradoxe et le maniement de l’ironie. Au risque, peut-être, d’être vu et entendu davantage que réellement lu – ou même compris.


Philippe Sollers et Julia Kristeva, à Cassis (Bouches-du-Rhône), en avril 1998. PATRICK BOX / GAMMA-RAPHO / GETTY IMAGES
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En 1987, à l’initiative de François Bott et de Josyane Savigneau, Sollers entame une longue collaboration avec « Le Monde des livres ». Il y publiera près de 200 articles jusqu’en2005 – date à partir de laquelle il commencera à écrire régulièrement dans Le Nouvel Observateur, tout en continuant à collaborer au Journal du dimanche –, à un rythme soutenu, jusqu’à une dizaine de papiers par an au début des années 1990. Des articles souvent consacrés aux classiques d’hier et d’avant-hier, aux peintres et aux écrivains, de Dante à Henry Miller, en passant par Montaigne, Voltaire, Casanova, Sade, Nietzsche, Kierkegaard, Flaubert, Proust, Céline, Genet ou Debord, qui l’imposent comme un des grands passeurs de la littérature.

Ils composent, pour reprendre l’un de ses titres, une « théorie des exceptions » à l’intérieur de laquelle se déploie, malgré la diversité des œuvres évoquées, une pensée très cohérente et conséquente de l’art et de la littérature, lui fournissant la matière de plusieurs recueils qui montrent que ce travail critique occupe une place centrale dans son œuvre – La Guerre du goût, Eloge de l’infini, Discours parfait et Fugues (Gallimard, 1994, 2001, 2010 et 2012) – mais également dans

de nombreuses monographies, consacrées à des artistes comme Watteau et Fragonard, Cézanne et Picasso, de Kooning et Bacon.

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Lire notre archive (2002) Article réservé à nos abonnés Le mystère français, par Philippe Sollers

Cependant, l’évidence des talents de Sollers comme critique, comme essayiste, ont parfois fait oublier le fait qu’il fut d’abord romancier. Et j’ajouterai, pour ma part, l’un des tout premiers de la littérature présente. Il est vrai que sa conception du roman ne s’accordait guère avec celle qui, le plus souvent, triomphe désormais. Dans ses livres, si l’intrigue brille, c’est par son absence. Dans Portrait du joueur, il contestait le règne de la « story » à laquelle ses propres livres ne se soumettent pas : « Le roman, expliquait-il, doit d’abord être une “histoire”, a story… Personnages typés. Enquête plus ou moins policière. Dévoilement d’une cause, d’un ressort, d’un motif, autrement dit d’une culpabilité. Surmontée ou pas, peu importe. Sois coupable et raconte. Pas de culpabilité, pas de story, ou à peine. Pas, ou peu, de story, rien du reste ! »

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Un pas de côté enchanté

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Tel que Sollers le revendiquait et le pratiquait, l’art du roman le conduisait, loin des conventions ordinaires du genre, à enchaîner les livres comme autant d’épisodes d’un seul et même feuilleton spéculatif et poétique au fil duquel tenir la « chronique » – au sens de Céline – de sa vie et celle de son temps. Au sein d’une sorte de long roman autobiographique, un narrateur, sans cesse semblable et toujours différent, tient en direct le journal perpétuellement repris de sa propre existence, évoquant notamment son enfance et sa jeunesse, sa longue liaison amoureuse, qui durera de 1958 à la mort de la romancière, avec Dominique Rolin (1913-2012) – quatre volumes de leur correspondance ont été publiés chez Gallimard, de 2017 à 2020 –, discrètement la présence à ses côtés du fils qu’il eut en1975 de Julia Kristeva, et plus généralement le pas de côté enchanté depuis lequel il considère le monde.

Lire aussi (2019) : Article réservé à nos abonnés « Lettres à Dominique Rolin (1981-2008) », de Philippe Sollers : le désir et la poursuite du tout

Car, si elle se renouvelle avec chaque titre, la formule des romans de Sollers est fixée dès les années 1980 et ne variera plus : dans la solitude d’un refuge choisi (Paris, Ré ou Venise), à l’écart de la servitude sociale dont il observe les ravages, dans la compagnie des femmes (qui sont les personnages principaux de ses livres)

et dans celle des œuvres dont il s’entoure (Mozart, Manet, Stendhal et bien d’autres), fidèle à un idéal de félicité devenu intempestif, un homme cultive clandestinement l’art dissident et méditatif d’être heureux. Comme le disait Ducasse (Lautréamont) – dont Sollers entreprit de réécrire les Poésies dans ses romans : « L’homme ne doit pas créer le malheur dans ses livres… »

Jusqu’au bout, Sollers n’a jamais cessé d’écrire. La liste est longue des romans qu’il a signés. Ils restent à lire.

Parmi les meilleurs, on peut citer :

Les Voyageurs du temps,
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L’Eclaircie,
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Mouvement,
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Le dernier en date s’intitule Graal (Gallimard, 2022). Il évoque cette Atlantide disparue dont l’île de Ré constitue le dernier vestige. Y brille encore, de ses derniers feux peut-être, cette lumière dont parlait Rimbaud ; l’éternité, la mer mêlée au soleil, cette vérité dont seule la littérature, ce qui en reste, peut porter encore témoignage.

Lire aussi notre archive : Philippe Sollers : « La connerie se porte bien »

Quelle épitaphe pour un tel écrivain ? Au début de La Fête à Venise (1991), le narrateur contemple une inscription latine sur une tombe : « Non fui. Fui. Non sum. Non curo. » C’est-à-dire : « Je n’ai pas été, j’ai été, je ne suis pas, je ne m’en soucie pas. » Maxime où s’exprime toute la sagesse du matérialisme antique mais que complète chez Sollers la conviction, au fond très chrétienne, que le dernier mot n’appartient jamais à la mort. Car, comme le dit la citation de l’Evangile (apocryphe) selon son patron Philippe et placée en épigraphe des Voyageurs du temps (2009) : « Celui qui est a été et sera. » Ici n’est pas le lieu de dire autrement pourquoi. Mais nous sommes quelques-uns à qui, et pour longtemps, la disparition de Philippe Sollers ne saurait être une nouvelle indifférente.

[Homme de lettres qui excellait dans l’art de la critique littéraire, Philippe Sollers a été l’une des grandes plumes de l’histoire du « Monde des livres ». Le Monde présente ses plus sincères condoléances à sa famille, à ses proches, et à toutes celles et ceux qui l’ont connu et apprécié. J.Fe.]

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Philippe Sollers en quelques dates

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28 novembre 1936 Naissance à Talence (Gironde)

1958 « Une curieuse solitude » (Seuil), premier roman

1960 Crée au Seuil la revue « Tel quel » avec Jean-Edern Hallier, Jean-René Huguenin et Renaud Matignon

1961 « Le Parc » (Seuil), prix Médicis

1981 « Paradis » (Seuil)

1983 Quitte le Seuil pour Gallimard, publie « Femmes », crée la revue « L’Infini »

1994 « La Guerre du goût », essai

2000 « Passion fixe » (Gallimard)

2007 « Un vrai roman. Mémoires »(Plon)

2009« Les Voyageurs du temps » (Gallimard)

2017 « Lettres à Dominique Rolin », premier volume

2021 « Légende »

2021 « Agent secret » (Mercure de France)

5 mai 2023 Mort à Paris

lemonde.fr/


A propos de l’auteur

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Philippe Forest, © Catherine Hélie

Philippe Forest né le 18 juin 1962 est un écrivain et essayiste français.

Diplômé de l’Institut d’études politiques de Paris en 1983 et docteur en lettres de l’université Paris IV en 1991, Philippe Forest enseigne durant sept années dans des universités britanniques : Heriot-Watt (Édimbourg), St John’s College (Cambridge), St Andrews, Birkbeck College (université de Londres).

Depuis 1995, il enseigne à l’université de Nantes où il est professeur de littérature. Il est l’auteur de nombreux essais consacrés à la littérature et à l’histoire des courants d’avant-garde (notamment Histoire de Tel Quel et sur Philippe Sollers), et de sept romans.

Lauréat de la Villa Kujoyama, il a effectué en 1999 un long voyage au Japon. Dans "Sarinagara" (2004), Prix Décembre 2004, il évoque ce thème à travers la culture de trois artistes japonais, dont Soseki.

Son écriture est marquée par le thème de la disparition de l’enfant. Sa fille, Pauline, est morte d’un cancer à l’âge de quatre ans, en 1996, ce qui constitue le sujet de ses premiers romans, "L’Enfant éternel" (1997), Prix Femina du premier roman, et "Toute la Nuit" (1999), ainsi que d’un essai, "Tous les enfants sauf un" (2007).

Collaborateur régulier des pages littéraires de la revue Art Press, et de façon occasionnelle dans diverses revues et journaux comme Le Monde des Livres, Le Magazine littéraire ou le magazine Transfuge. Depuis 2011, il est, avec Stéphane Audeguy, corédacteur de "La Nouvelle Revue française" des éditions Gallimard.

Philippe Forest est lauréat du prix Goncourt de la biographie 2016 pour son ouvrage "Aragon".

Source : Wikipédia

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