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Portraits de Joyce par Brancusi

"Tales Told of Shem and Shaun. Three Fragments from Work in Progress" (extraits de "Finnegans Wake"}

D 21 janvier 2021     A par Viktor Kirtov - C 2 messages Version imprimable de cet article Version imprimable    ................... PARTAGER . facebook


Symbole de Joyce par Brancusi


Symbole de Joyce
Par Constantin Brancusi (1876-1957)
Paris, Centre Pompidou - Musée national d’art moderne - Centre de création industrielle
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DATE DE CREATION : (1929-1930)
TECHNIQUE : encre de Chine sur papier
DIMENSIONS : 35 x 28,2 cm
INSCRIPTIONS : Signé en bas à gauche : C. BRANCUSI. Non daté
ACQUISITION : Legs de Constantin Brancusi en 1957
SECTEUR DE COLLECTION : Centre Pompidou. Cabinet d’art graphique

Photo (C) Centre Pompidou, MNAM-CCI, Dist. RMN-Grand Palais / Adam Rzepka

Analyse

Exceptionnel dans l’œuvre graphique de Brancusi, le double traitement, successivement figuratif puis symbolique, apparaît dans la série des portraits de James Joyce. Après le refus de Picasso, auquel s’adressent d’abord de jeunes éditeurs américains, Harry et Polly « Caress » Crosby, le sculpteur accepte de faire sur commande le portrait de l’écrivain irlandais destiné au frontispice de Tales Told of Shem and Shaun. Three Fragments from Work in Progress

(extraits de Finnegans Wake ), publié en 1929 par The Black Sun Press.

En mai, Brancusi réalise d’abord six esquisses réalistes (trois de profil et trois de face), captant la physionomie de son visiteur à l’aide de notations rapides dont il est coutumier : ainsi retient-il déjà le motif circulaire des verres cerclés des lunettes. Devant la déception des commanditaires qui espéraient un dessin abstrait, Brancusi conçoit une spirale symbolique, qui sera acceptée, et qu’il intitulera plus tard, en 1954,Symbole de Joyce.

Le legs de 1957 et la dation de 2001 ont permis de réunir la série presque complète des portraits de Joyce (trois portraits réalistes sur les six recensés et trois représentations abstraites). Dans l’ensemble abstrait, cette version provenant du legs, ébauchée à l’encre et au pinceau, est étrangement la seule signée. Comme un libre jet, le dessin, au tracé à main levée discontinu et tremblé, présente une spirale ouverte vers la gauche confrontée à trois lignes verticales inégalement interrompues. Il comporte aussi de mystérieuses initiales (les premières lettres de mots tenus secrets), auxquelles font pendant les majuscules de la signature de Brancusi, et qui sont absentes dans l’épure (peut-être antérieure) conservée pour l’édition. Là, seules la spirale et ses trois lignes, impeccables, restent en suspens. Brouillon ou reprise, la version du legs a pu aussi suivre les deux visites de Joyce dans l’atelier de Brancusi de l’impasse Ronsin en 1930.

Dans les années1920, le sculpteur avait déjà traité le thème de la spirale ésotérique et des cercles concentriques dansCercles, spirale et pyramides fatales[1926-1929]. Ce même motif a aussi inspiré, entre autres, les amis de Brancusi, Francis Picabia et Marcel Duchamp. Mais ici, la spirale associe peut-être, dans l’esprit du sculpteur, le souvenir des entrelacs celtiques (ceux du manuscrit irlandais cher à l’écrivain,The Book of Kells) à l’évocation deWork in Progress(dontTales Told of Shem and Shaunlivre les premiers fragments). La ligne, éternellement déroulée et enroulée sur elle-même, renvoie à la fois au monde cyclique et au développement de l’œuvre ouverte.


Marielle Tabart

Source : Extrait du catalogueCollection art graphique - La collection du Centre Pompidou, Musée national d’art moderne, sous la direction de Agnès de la Beaumelle, Paris, Centre Pompidou, 2008

Autres études de Portraits de Joyce pour « Tales Told of Shem and Shaun »


James Joyce - Tales Told of Shem and Shaun, Three Fragments from Work in Progress (1929) (étude)
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Titre principal : Portrait de James Joyce

Date de création : [1929]

Technique : Mine graphite sur papier

Dimensions : 42 x 32 cm

Inscriptions : S.B.G. : C.BRANCUSI

Acquisition : Legs de Constantin Brancusi, 1957

Secteur de collection : Centre Pompidou. Cabinet d’art graphique

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C’est finalement cette dernière étude qui a été choisie pour figurer en frontispice de Tales Told of Shem and Shaun.


“Cette ’oreille spirale’, comme une image de l’auditif et du visuel combinés en Joyce, qui écrivit au moins autant pour l’oreille que pour l’oeil, et qui appela ’Earwicker’ le personnage de sa dernière œuvre ”

Voici l’une des hypothèses faites par David Pierce dans Reading Joyce, à propos de la spirale que Brancusi dessina en guise de portrait de James Joyce.

Une représentation abstraite et symbolique de James Joyce par le sculpteur Brancusi devant laquelle le père de Joyce se serait écrié :


"Mon fils a bien changé depuis la dernière fois que je l’ai vu".

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VOIR AUSSI L’ARTICLE : « Le symbolisme de la spirale » et le forum associé en bas de page.
Un des premiers articles du site pileface - placé sous le signe de la spirale -, publié le 19 juillet 2005 (.plus de 15 ans déjà !), que complètent naturellement ces études spiralées de Brancusi.


Tales Told of Shem and Shaun


Contes de Shem and Shaun [les deux fils de Finnegan],
Trois fragments de Work in Progress par James Joyce
(extraits de Finnegans Wake)
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Le portrait abstrait et symbolique de James Joyce par Brancusi,
en frontispice du livre.
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A propos de Finnegans Wake

Finnegans Wake (Work in Progress, 1923-1938 ; Finnegans Wake, 1939) de James Joyce, a été publié en1939, à Londres, chez Faber Faber.

Réputé comme étant un texte difficile, voire illisible et intraduisible,Finnegans Wake est néanmoins considéré comme un monument de la littérature du XXe siècle. Ce livre est dit « traduit de l’anglais » mais mêle en réalité plusieurs langues,

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Ce qu’en dit l’Encyclopédie Universalis :

« Finnegans Wake »

Joyce, en 1923, commenceWork in Progressqui devintFinnegans Wake.Après la journée d’Ulysse, la nuit – de qui ? – d’un personnage, à peine identifiable à travers ses métamorphoses, de cabaretier dublinois déjà double, celte et nordique, absorbant encore le maçon ivre Finnegan, le héros mythique Finn, le roi d’Irlande Roderick O’Connor, et devenant, selon les lois du rêve, tout ce dont il rêve. La métamorphose l’emportant constamment sur l’individuation fait passer par une multitude d’états allotropiques des personnages opposés et complémentaires, tels les deux fils, Shem et Shaun. Tout ce qui constitue une succession illimitée de rêves et de cauchemars doit participer de l’onirique par la fluidité et la confusion du langage ; en fait, c’est d’une énorme expérience de langage expressif qu’il s’agit ; les mots sont disloqués pour être truffés de lettres et de syllabes qui les rendent incertains et multiples, riches de connotations, presque au gré du lecteur. « Je suis au bout de l’anglais », devait déclarer Joyce et, en effet, on compte une trentaine de langues d’appui, y compris le breton et le birman. Les ingénieux adaptateurs (il ne saurait être question de traduction) de fragments de l’œuvre en français ont rendu « Wait till the honeying of the lune love » par « Attends moun amour que la lune s’y mielle », où moun est aussi moon tandis que miel s’ajoute à mêle. La langue est en outre « caméléonique », c’est-à-dire qu’elle prend la couleur de la réalité qu’elle traverse. C’est donc à peine si, voué à de perpétuels passages, le même mot a deux fois la même forme. […]


James Joyce
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Quelques liens

FINNEGANS WAKE, 17ème et dernier CHAPITRE. Traduction de Philippe Sollers

FINNEGANS WAKE en version folio (928 pages) sur le site Gallimard

Finnegans Wake de James Joyce : analyse, résumé, personnages, symboles et autres quarks PAR riverrun.fr (96 pages)

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2 Messages

  • Pierre Vermeersch | 3 février 2021 - 15:34 1

    Dans l’une des images, le découpage circulaire fait avec des ciseaux, du point de vue topologique, implique qu’il s’agit d’un fragment de la surface d’une sphère infinie.
    La coupure axiale qui s’interrompt en le point central d’une spirale, fait montre de ambiguïté entre cette coupure de la surface bilatère de ce fragment et la ligne de recoupement dans l’ auto pénétration de la surface unilatère de la sphère infinie, l’équivalent de la torsion moebienne. Ce qui est le propre de la figuration de l’immersion du plan projectif dans l’espace ordinaire, soit le cross-cap (que nous appliquons sur l’image).
    Le centre de la spirale est le point limite de la ligne de recoupement dont il ne fait pas partie ; autrement dit, il s’agit de ‘’l’ouvert‘’ qui engage l’infini intensif, mis en opposition avec l’infini extensif de la surface de la sphère.
    Cette intuition topologique de Brancusi, identifiable à sa méditation sur Finnegans Wake, manifeste sa position éminemment moderne. La modernité dans l’art est la prise en compte de l’infini (extensif/intensif).

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  • Pierre Vermeersch | 28 janvier 2021 - 16:22 2

    La suture des deux extrémités de la droite infinie équivaut au nœud trivial, soit un cercle qui aura effectué son parcours selon la double boucle de la coupure de la bande de Moebius.
    La dernière phrase de Finnegans Wake, se termine sur la première en son début. Le texte dans la répétition de sa lecture, à chaque fois différente, effectue la torsion de la bande de Moebius.
    Ici-même, l’une des études de « Symbole Joyce » représente une droite verticale parcourue de spires successives. Alors que sur un axe horizontal, des spires entées sur une spirale se prolongent en un zigzag qui se retrouve, en une perpendiculaire, sur une droite verticale.
    Ce dessin a la valeur d’un graphe qui n’est pas sans un renvoi à la sculpture célèbre de Brancusi, la Colonne sans fin.

    Voir en ligne : http://theoriedelapratique.hautetfo...