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Tracts (N°37) - Santé publique année zéro

D 24 mars 2022     C 3 messages Version imprimable de cette Brève Version imprimable   

« Allons-nous enfin, dans un cadre républicain, affronter ensemble le bilan scientifique, éthique et politique de deux ans de crise sanitaire ? » Barbara Stiegler et François Alla

Le 17 mars 2020, le confinement était décrété sur tout le territoire national, ouvrant une longue période de suspension de la vie démocratique au nom du risque pandémique. Pour les deux auteurs de cet essai, philosophe et praticien de santé publique, cette opposition entre santé et liberté, imposée par un nouveau libéralisme autoritaire et contraire à l’esprit de la "Charte d’Ottawa pour la promotion de la santé" (1986), remettait en cause tous les acquis de notre histoire récente. Relevant de l’argument d’autorité et de l’erreur politique, elle a, parmi d’autres effets délétères, transformé le terrain de la santé publique en un grand champ de ruines. Revenir à cette faute matricielle, source de toutes les défaillances dans la gestion de la crise, c’est réaffirmer la centralité des déterminants sociaux et environnementaux de la santé publique, lesquels n’auraient jamais dû cesser d’inspirer et orienter les politiques, au nom même de l’intérêt général. Après De la démocratie en Pandémie de Barbara Stiegler (janvier 2021), ce Tract offre la première grande lecture critique des années Covid.

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Barbara Stiegler (© Jean-Noël Cassan)

Barbara Stiegler revient sur la pandémie dans un essai au vitriol

par Amélie Quentel

Publié le 23 mars 2022 à 16h50
Mis à jour le 23 mars 2022 à 20h15

Dans “Santé publique, année zéro”, la philosophe Barbara Stiegler et le professeur en santé publique François Alla esquissent le bilan de deux années de crise sanitaire, lesquelles “ont transformé le terrain de la santé publique en un champ de ruines”.

En janvier 2021, Barbara Stiegler publiait De la démocratie en pandémie (Tracts/Gallimard), un manifeste plus que remarqué où la philosophe revenait sur les conséquences de l’irruption du Covid-19 dans nos vies.

L’intellectuelle y appelait le monde savant à “résister” face à un pouvoir qui, faisant passer pour un choix rationnel indiscutable des décisions relevant d’une idéologie “libérale autoritaire”, n’hésitait pas à suspendre les libertés individuelles au nom de la santé publique. Le tout alors même que nos gouvernements n’ont eu de cesse, depuis trente ans, de démanteler avec un zèle infatigable nos services publics, abandonnant au passage les Français·es les plus démuni·es à leur sort.

Un peu plus d’un an après, celle qui soutient Mélenchon pour la présidentielle 2022 revient sur la pandémie et poursuit son analyse dans Santé publique, année zéro, un livre co-écrit avec François Alla, professeur de santé publique à l’université de Bordeaux. Le constat esquissé dans ce nouveau texte est tout aussi terrible, si ce n’est pire que dans De la démocratie en pandémie : pour Stiegler et Alla, ces deux années de crise sanitaire ont “transformé le terrain de la santé publique en un champ de ruines” tout en “liquidant les principes fondamentaux de notre République”.

À partir de l’allocution présidentielle du 12 juillet 2021 annonçant la mise en place d’un ‘passe’ qui conditionnait, pour toute la population de plus de douze ans, la poursuite de la vie sociale à son statut sanitaire, nous basculions dans un nouveau type de société”, est-il ainsi écrit dans un chapitre revenant sur le “schème ami-ennemi” instauré par le gouvernement. Les personnes n’approuvant pas les yeux fermés chaque décision prise par l’exécutif (les confinements, le couvre-feu, le passe sanitaire puis vaccinal) se sont vues renvoyées, via un “processus d’inversion des responsabilités”, au statut d’”ultimes coupables accusé·es de ruiner les efforts de tous en prolongeant la crise”, et ce quand bien même l’État fut défaillant pour protéger les plus précaires, notamment dans l’accès à la vaccination. Car on ne “meurt pas du seul fait d’avoir contracté un virus […] [mais], le plus souvent, de sa position dans la société”.

D’où leur critique virulente des stratégies globalisantes mises en place pour lutter contre la pandémie, qui “en mettant tous les individus en compétition pour les mêmes ressources rares”, ont conduit à “mettre de côté ceux qui en avaient le plus besoin”, le tout en “fabriquant le consentement des populations” à coups de “paternalisme soft”. Une “faute matricielle et sanitaire majeure”, opposant démocratie et santé publique quand les deux sont pourtant unis par un lien “indissociable”, qui a plongé notre société dans un état de sidération. Ce livre, dont la position sur le vaccin est de rappeler son statut d’”outil indispensable” sans en faire “la panacée”, est un appel à ce que nous en sortions.

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