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Nelson Algren, une voix dans la ville (1909-1981)

D 19 octobre 2015     C 0 messages Version imprimable de cette Brève Version imprimable   

« Ce n’est pas volontairement que j’ai rejoint le monde des maquereaux, des voleurs et des vagabonds, j’y ai été jeté. » — Nelson Algren

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Nelson Algren en 1956 Photo : Albertin, Walter.

Nelson Algren, une voix dans la ville (1909-1981)

Par Christine Lecerf. Réalisation : Christine Diger. Attachée de production : Claire Poinsignon. Avec la collaboration d’Annelise Signoret, de la Bibliothèque centrale de Radio France.


De son vrai nom Nelson Ahlgren Abraham, Nelson Algren débarque à Chicago, à l’âge trois ans. Issu d’une famille d’immigrés juifs, ce fils de mécanicien grandit dans la rue et cumule les petits jobs avant d’obtenir son diplôme de journaliste. En 1931, la grande dépression le jette sur les routes, où il côtoie la misère et fait de la prison après avoir « volé » une machine à écrire qui ne servait plus.

Dès ses premiers écrits, comme Le matin se fait attendre (1942) ou Le Désert du néon (1947), Algren immortalise les bas-fonds de Chicago et donne voix à tous ceux que l’Amérique rejette ou ne voit pas : les pauvres, les noirs, les putes, les criminels. Il aimait citer ces vers du poète Walt Whitman. « Je suis l’un deux, je le sens. Je suis ces forçats, je suis ces prostituées ».

Considéré aujourd’hui comme l’un des plus grands poètes de la ville, souvent rattaché à la tradition des écrivains réalistes ou des romanciers noirs américains, ce passionné de boxe et de base-ball assimilait la littérature à un sport de combat. Puisé à la source, dans les bars maffieux, les salles de boxe ou les meublés sordides, le style d’Algren « cogne » (comme disait Hemingway) avec précision et grâce.

En 1950, Algren connaît un bref succès. Premier écrivain à obtenir le National Book Award avec L’Homme au bras d’or (1949), il est aussi le premier à mettre en scène un anti-héros drogué, qui sera interprété au cinéma par Frank Sinatra, en 1955, dans l’adaptation d’Otto Preminger. Mais Algren ne quittera jamais les siens. Il restera un outsider. Son engagement politique en faveur des époux Rosenberg ou contre la guerre du Vietnam lui vaudra de la part du FBI un dossier de plus de 500 pages.

Par sa façon inédite d’allier le trivial au sublime, d’écrire de la poésie avec la langue des gueux, Nelson Algren était sans aucun doute un « dangerous beloved man  », comme l’appelait Simone de Beauvoir, l’une des femmes qu’il a le plus aimées. Grand séducteur, amateur d’alcool et de poker, il est mort, en 1981, oublié et dans la misère. Sur sa tombe à Sag Harbor est gravée cette phrase en guise d’épitaphe : « The end is nothing, the road is all  ».

France Culture