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L’Evénement Jésus

suivi de Le Suaire de Turin

D 23 décembre 2023     A par Albert Gauvin - C 6 messages Version imprimable de cet article Version imprimable    ................... PARTAGER . facebook



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Le 23 décembre 1999, Philippe Sollers publie dans L’événement du jeudi un article que l’hebdomadaire titre Jésus-Christ superstar. En illustrations une image en négatif du Saint Suaire de Turin, des reproductions d’une petite Crucifixion de Picasso (1930), de The Jolly Crucifixion de De Kooning (pleine page) et d’une Assomption de la Vierge de Titien. Le texte est repris dans Éloge de l’infini (folio 3806). Dans ce volume, il est d’ailleurs question de Jésus-Christ aux pages 38, 88, 121, 212, 256, 264, 265, 283, 362, 405, 516, 654, 669, 690-697, 886, 888, 906, 908.
En décembre 2011, Sollers et Kristeva revenait sur la parole du Christ dans Le monde des religions. Que vous soyez croyant ou mécréant, catholique ou athée, « l’événement Jésus » n’a pas fini de vous interpeller, de vous appeler à penser.

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The Jolly Crucifixion. ZOOM : cliquer sur l’image

L’Affaire Jésus

Il faudrait pouvoir tout oublier, les églises, les controverses, les films, les images, les passions, les crimes, l’histoire millénaire, et, à la limite le christianisme lui-même, pour se mettre une bonne fois devant le cas individuel brut : « Dieu », le Dieu biblique s’entend, s’est-il un jour incarné dans un être humain de sexe masculin, devenant ainsi, par des voies plus que mystérieuses, le Père d’un Fils qui est le Même que lui ?
Un homme ? Oui. Qui est aussi dieu ? Oui encore. Ah non, il faut choisir : c’est l’un ou c’est l’autre. Vous voyez bien que vous proférez ici une absurdité monstrueuse. Justement.
Question subsidiaire, mais de la plus grande importance : à supposer que ce Fils extraordinaire soit passé, pour s’incarner, par une Vierge, prénommée Marie, comment comprendre qu’un tel Fils soit simultanément le Père de sa Mère [1] ?

À partir de ces questions, tout le monde se prend la tête, personne n’écoute plus l’orateur. C’est d’ailleurs ce qui s’est passé au début. Vous me racontez une affaire scandaleuse, folle. L’histoire de Jésus-Christ est bien celle-là : un conte à dormir debout, un mythe contradictoire, un roman fabriqué peu à peu par des générations de pauvres d’esprit et de théologiens s’obstinant à abuser de la crédulité populaire en lui fournissant son opium.
Et pourtant, ça marche. Jésus est la superstar du spectacle. On peut le mettre à toutes les sauces, des plus sublimes à la plus kitsch, des fresques de Michel-Ange aux bandes dessinées, de Hollywood à Jean-Sébastien Bach ou Mozart : il tient le coup, résiste à tout, avale tout. On le prêche, il rebondit. On le nie, il se multiplie.

Le Saint-Suaire. ZOOM : cliquer sur l’image

Il n’est pas jusqu’à sa photographie supposée, dite « linceul de Turin », ou Saint Suaire, qui ne soit l’objet d’une controverse scientifique [2]. Il habite les bibliothèques, les discothèques, les musées, les cinémathèques. Il a ses poètes de génie (Dante, par exemple), ses négateurs acharnés, ses cinglés, ses croisés, ses saints et ses saintes, ses martyrs, ses papes. Toujours imité, jamais égalé. Constamment réinterprété, jamais épuisé. Schismes, anathèmes, guerres. Inquisitions, massacres : difficile d’imaginer un message d’amour et de paix ayant provoqué autant de bruit et de fureur. Suis-je catholique ? Orthodoxe ? Protestant aux mille variantes ? On ne sait plus. Suis-je par ailleurs Juif ? Musulman ? Ou tout bêtement païen matérialiste ? Athée ? Agnostique ? Bouddhiste ? Toutes les hypothèses sont permises, vous me permettrez de rester discret. En tout cas, une chose est sûre : qu’on le déplore ou non, ce type tient le calendrier universel. Toutes les opérations de Bourse sont datées, en ce moment même, d’après sa naissance. L’an 2000, c’est lui. Les agendas, c’est lui. Il y a d’autres calendriers, bien sûr, juif, arabe, maçonnique, et la République française, dans un premier temps, a bien essayé d’en créer un nouveau. Les noms de mois, surtout, étaient poétiques : Brumaire, Nivôse, Ventôse, Fructidor, Thermidor... Tout cela est très beau, mais impossible de déloger Jésus dans sa crèche. Tous les 24 décembre, à minuit, l’enfant divin vous salue, ainsi que Joseph, Marie, le boeuf, l’âne, les Rois Mages. Qui contrôle le coup du bébé dirige le Temps. Toutes les femmes le comprennent, ce sont elles qui favorisent la chose.

Quelqu’un me dit : « Je croirais volontiers en Dieu, mais je ne comprends rien à la Trinité. » Ou encore : « Jésus, oui, un type plutôt sympathique, mais la Vierge, là, je cale, je trouve ça plutôt glauque, assez dégoûtant. » Ou encore : « L’Incarnation, peut-être, et encore, mais la Résurrection, là, franchement, non. » Ou encore (c’est la version la plus comique) « Mais enfin, pourquoi Dieu n’aurait-il pas engendré une fille ? » En effet, il semble avoir eu un autre projet.

Le voilà donc incarné, ce corps double, mi-dieu, mi-homme, et pourtant complètement Dieu. Sur quoi, déluge de représentations, à commencer par un flot de jeunes Vierges-Mères tenant leur petit garçon divin dans leurs bras. Tous les artistes ont eu envie d’être cette merveille, la situation les inspire, ils vont rivaliser d’invention, en musique comme en peinture. Cette mère idéale, pourtant, héritera plus tard d’un cadavre, après la crucifixion de son fils. La scène la plus sensationnelle de ce destin tragique se trouve à Saint-Pierre de Rome, à droite, en entrant. Michel-Ange, là, est imbattable. Il a fallu d’ailleurs protéger sa sculpture, puisque à intervalles réguliers des cinglés venaient l’attaquer à coups de marteau.


La Pietà de Michel-Ange, 1498-1499, Basilique Saint-Pierre de Rome.
Photo A.G., 28 juin 2015. Zoom : cliquez l’image.
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L’Histoire christique, de part en part, mobilise tous les fantasmes, toutes les hallucinations. Elle rend fou, elle imprègne les perversions, elle est l’horizon indépassable des ruminations sexuelles, engendrement d’un côté, passions mimétiques de l’autre. Ce Jésus, au fond, n’était-il pas homosexuel ? Comme, peut-être, Dieu lui-même ? C’est une hypothèse récente [3], et cela expliquerait la beauté de L’Évangile selon saint Matthieu de Pasolini. Pourquoi se plaisait-il donc avec des prostituées ? On sait que la Bible raconte parfois, sur ce sujet, des choses étranges, mais tout de même, drôle de type, drôle de Dieu. Les apôtres sont de plus en plus troublés, ils ne comprennent pas grand-chose à ce roman subversif. Judas finit par une crise de jalousie mortelle, Pierre renie trois fois son Maître après son arrestation, Jean, le « disciple préféré », prépare déjà en douce son Évangile et son Apocalypse. Philippe, aigu, pose la question essentielle : « Montre-nous le Père, et cela suffit. » [4] Réponse fulgurante du Fils : « Comment ? Tu me vois, et tu ne vois pas le Père ? » On peut difficilement être moins oedipien.

Le Père doit avoir ses raisons dans l’invisible. Il vient d’abattre sa carte maîtresse : un coup de force intrabiologique. Ce corps, celui de Jésus, vous allez donc forcément y penser beaucoup, vous demander s’il a vraiment existé, s’il ne s’agit pas d’une fable. La série des Jésus-ceci et des Jésus-cela commence. Aux dernières nouvelles, il marche un peu partout sur les ondes, c’est un humaniste sensible, un militant des Droits de l’Homme, un idéaliste. On l’a vu tourmenté par la chair, travesti, prêchant le capitalisme comme le socialisme. Du côté des pauvres, évidemment, mais très bien vu par des régimes nantis. Jésus est-il de droite ou de gauche ? De gauche, évidemment, cela saute aux yeux. Mais alors, pourquoi plaît-il tant à la droite ? Peut-être, parce que en lui deux natures cohabitent ? Chaque camp a ses raisons, elles sont justifiées, le feuilleton continue. Jésus dit qu’il vomit les tièdes, mais les tièdes l’adoptent. À la limite, on lui fait dire tout et son contraire. On l’invoque en allumant des bûchers, et le voilà soudain en apologiste de la tolérance. Son église principale, la catholique, se repent de tous ses péchés. Quel stratège, ce Jésus ! Bébé, prophète, Messie crucifié, puis ressuscité, quel art ! Pendant longtemps, la doctrine était de ne pas trop insister sur ses origines douteuses. Désormais, plus le moindre doute : Jésus était bien Juif. Une minorité juive a parié sur lui, à l’époque, et puis on a oublié d’où il venait. Juif, Jésus ? Eh oui, c’est tout le problème. Pour savoir si le Nouveau Testament est bien digne de l’Ancien, il faudra, on s’en doute, attendre la fin des Temps. Ce n’est pas demain la veille. Quoi qu’il en soit, voilà Jésus centriste, c’est-à-dire central.

Reprenons : si vous basculez du côté de ce corps, vous irez jusqu’à le manger pour vous identifier de plus près à lui. C’est l’hostie consacrée, un morceau de pain transformé en vraie substance physique par des paroles. Bien entendu, mettre l’accent à ce point sur l’oralité provoque de violentes réactions de rejet (sans parler du fait que le prêtre du Christ, à ce moment-là, est censé boire son sang sous forme de vin dans un ciboire). Mais si vous tombez dans le refus exaspéré, vous serez obligé d’exorciser ce personnage gênant, de censurer son nom, de dire des messes noires, d’érotiser son aventure, ou, plus « scientifiquement », de vous consacrer à un travail inlassable pour prouver que son existence a été hautement improbable : analyse des textes, carbone 14, affairement en tout genre, rationalisme obstiné. Jésus est un aimant, on se demande qui il peut laisser indifférent. Les Chinois, peut-être (et encore : les jésuites avaient des idées révolutionnaires à ce sujet). En tout cas, certainement pas un artiste : il voudra étudier le cas personnellement, éprouver si, oui ou non, il peut aller, sur ce terrain, au bout de ses sensations, de son imagination créatrice. La liste des noms, ici, est impressionnante, elle remplit des dictionnaires. Rien qu’en peinture, voici des centaines d’Annonciations, de Crucifixions [5], de Résurrections [6]. Le pinceau fouille la lumière des anges, la chair torturée, la transfiguration sublimée, l’envol. L’Italie tout entière médite : architecture, fresques, orgues, violons. Jésus, en effet, change de style avec le temps. Il est roman, gothique, baroque, moderne, bientôt planétaire. La musique l’enchante, il a un faible, au paradis, pour Mozart, mais il ne craint pas le cinéma, les contresens à son sujet le font rire. Ce sont, dit-il, des preuves a contrario. Il feuillette de temps en temps des gros livres de théologie, saint Augustin, saint Thomas, saint Bonaventure, mais, soit dit entre nous, il préfère Pascal. Il trouve Claudel parfois inspiré, mais son amour va plutôt à Rimbaud, dont il ne se lasse pas de relire Une saison en enfer et les Proses évangéliques. Quand Jésus est vraiment sérieux, il écoute en même temps toutes les compositions de Bach : c’est son cinquième évangéliste, peut-être le meilleur [7]. La crucifixion qui le touche le plus ? Celle de Picasso, un petit tableau, qui approche de très près la cruauté indicible de son histoire.

Picasso, La crucifixion, 1930.
Photo A.G., 24 janvier 2017. ZOOM : cliquer sur l’image

Jésus, contrairement à ce qu’on croit, aime les oeuvres fortes, et subit, sans rien dire, l’énorme kitsch dont ses pseudo-dévots l’ont recouvert à travers les âges. Le marbre lui convient, le plâtre l’ennuie. Il est particulièrement sensible au thème de la Résurrection, pas assez traité à son goût. Trop de crucifix le fatiguent. Un athée radical lui paraît plus sympathique qu’une punaise de sacristie. Enfin, ne jugeons pas, tout le monde doit avoir sa chance.

Jésus, pendant sa vie humaine, est très calme. Il chasse, parfois, les marchands du Temple (beau tableau du Greco), mais, la plupart du temps, il rassure, calme la tempête, parle d’amour, de pardon, de paix. Son corps, bien entendu, a des pouvoirs miraculeux. Il fait voir les aveugles, courir les paralytiques, sa salive guérit, son toucher métamorphose, le clergé de l’époque considère toutes ces acrobaties d’un très mauvais oeil. Le comble : il ramène un mort récent à la vie. Les démons, préalablement envoyés dans des porcs à la noyade, souffrent de plus en plus. Un véritable enfer. Il ne faut quand même pas oublier que Dieu le Père a affaire à une révolte angélique permanente, à une insurrection de fond qui essaie, par tous les moyens, de le détrôner. C’est un ange déchu, Lucifer, Satan, qui mène la danse. Les mortels, là, sont entre deux feux. Ils se croient seuls, mais non, ça s’agite en eux entre le Bien et le Mal. Un des épisodes les plus mal connus de la vie de Jésus est sa tentation, dans le désert, par le Diable. Jésus s’attriste beaucoup, de nos jours, de voir les humains ne pas croire au Diable, quoiqu’il crève les yeux. Il voudrait qu’on lise davantage Shakespeare, Sade, Baudelaire, Dostoïevski, Nietzsche, Artaud. Vous serez sauvés, c’est entendu, encore faut-il que vous sachiez de quoi. La Mort n’est pas de la rigolade. Je sais bien, vous passez votre temps à accepter des crimes, des tortures, des massacres, vous protestez mollement ou du bout des lèvres, pourtant, à défaut d’héroïsme, un peu plus de décence vous conviendrait. D’accord pour Noël, d’accord pour Pâques, mais ce n’est pas une raison pour passer vite sur l’agonie, le dernier soupir, la mise au tombeau. Entre le possédé Hitler et le possédé Staline (auteur des fameuses formules : « à la fin, c’est toujours la mort qui gagne », et « le pape ? combien de divisions ? »), la voie du vingtième siècle a été étroite. Jésus, en ce temps-là, était particulièrement polonais, il a voulu que cela se sache à travers un pape. Il ne craint pas la grande politique, Jésus : mais ce n’est jamais celle qu’on croit. Dieu n’est pas ce qu’on croit, et il lui est même arrivé de murmurer qu’il n’était pas chrétien, comme à Marx d’avouer qu’il n’était pas marxiste.

« La Mort est le Maître absolu » a dit un philosophe. Et saint Paul : « Mort, où est ta victoire ? » C’est le fond de la question. L’évidence condamne Jésus, il a l’air du plus fou des hommes. Croire en Dieu est en effet une folie. Le plus curieux est qu’elle peut rendre aussi particulièrement raisonnable. Dieu, en somme, est à double tranchant, et le Diable y veille. Il aime les fanatiques de Dieu, le Diable, les dévots, les intégristes de tout poil. Il compte beaucoup aussi sur les déprimés, les mélancoliques, les négatifs, et encore sur les agités, les allumés, les maniaques du profit, la grande mafia du trafic, la bêtise intelligente, l’orgueil, le calcul, l’indiscrétion, l’envie, bref, sur la confusion générale.
Cependant, lisons Rimbaud :

« Jésus entra aussitôt après l’heure de midi. Personne ne lavait ni ne descendait de bêtes. La lumière dans la piscine était jaune comme les dernières feuilles des vignes. Le divin maître se tenait contre une colonne : il regardait les fils du Péché ; le démon tirait sa langue en leur langue ; et riait ou niait.
« Le Paralytique se leva, qui était resté couché sur le flanc, et ce fut d’un pas singulièrement assuré qu’ils le virent franchir la galerie et disparaître dans la ville, les Damnés. » [8]

Philippe Sollers, L’événement du jeudi du 23 décembre 1999
L’Infini 69, printemps 2000, p. 39-43 ; Éloge de l’infini, 2001, folio p. 690-697.
1ère mise en ligne le 23-12-09.

Titien (1488-1576), L’Assomption de la Vierge, 1516-18, huile sur panneau de bois, 6,90m x 3,60m.
Basilique Santa Maria dei Frari, Venise. Photo A.G., 20 juin 2016.
Zoom : L’autel. 22 juin 2014. Manet, <i>Lola de Valence</i>, 1862.

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« voix fleur lumière écho des lumières »

« soleil voix lumière écho des lumières soleil cœur lumière rouleau des lumières »

Le Saint Sépulcre

Monuments sacrés - Églises - La quête de la lumière.

Un voyage autour du monde à la découverte des chefs-d’oeuvre de l’architecture chrétienne : le Saint-Sépulcre à Jérusalem, le Mont-Saint-Michel, la cathédrale Notre-Dame de Chartres, le Duomo de Florence, la cathédrale de Séville, et la cathédrale Saint-Basile-le-Bienheureux de Moscou.

Le Saint Sépulcre.

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Le documentaire complet.

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« Avant qu’Abraham fût, je suis »

« En vérité, je vous le dis, si quelqu’un garde ma parole, il ne verra jamais la mort. »

JEAN 8, 51.

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« En vérité, en vérité, je vous le dis, avant qu’Abraham fût, je suis. »

JEAN 8, 58.


Titien, Polyptyque Averoldi. Au centre La Résurrection du Christ. 1520-1522.
Église Saint-Nazaire-et-Saint-Celse de Brescia. Zoom : cliquez l’image.
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« Avant qu’Abraham fût, je suis » est une parole capitale de Jésus qui va déclencher une convulsion tout à fait révélatrice et casser l’histoire en deux morceaux. Jésus opère là une scission, un brusque changement de temps à l’intérieur de la temporalité extraordinairement précise, généalogique du judaïsme, où il n’est question que de reproduction et de la prise de pouvoir que cela suppose.

Cette rupture temporelle est un acte métaphysique et politique incroyable : il y a la mort, il y a le temps humain, qui constitue la reproduction même de l’espèce humaine, et par-dessus, Jésus annonce une autre conception du temps : il se déclare issu d’un père vivant qui est dieu et dont il accomplit, incarne la parole. Ce fils de dieu reprend l’identité de Dieu lui-même révélé à Moïse — « Je suis » —, ce qui suppose une double naissance : une naissance constante, et une naissance dans l’histoire en tant qu’homme. C’est donc une naissance ahurissante, inconcevable qu’il affirme jusqu’à sa mort.

Celui qui gardera la parole de Jésus ne verra jamais la mort. Jésus passe au temps de la parole, qui se conjugue au présent. Au commencement « EST » le verbe. C’est le présent même de la puissance de la parole que nous sommes censés entendre.

Philippe Sollers, Le monde des religions, Hors-série n°17 (décembre 2011)

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Le geste de la parole, cette puissance


Véronèse, La Résurrection de la fille de Jaïre, 1546.
Musée du Louvre. Zoom : cliquez l’image.
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Marc, 5 : 25-34 : «  Et une femme, qui avait un écoulement de sang depuis douze ans/…/toucha son manteau./…/Et aussitôt la source de son sang sécha./…/ Aussitôt Jésus reconnut en lui même qu’une force était sortie de lui. /…/Alors il lui dit : « Ma fille, ta foi t’a sauvée. »

Après la journée des paraboles, Jésus en voyage accomplit quatre gestes de puissance qui mettent en évidence une nouvelle économie de la parole. La formule de Jean « le Verbe s’est fait chair » (1,14) résume cette révolution du parlêtre qui va marquer l’histoire des humains. Mais c’est Marc, dans ce que les commentateurs appellent la « structure enveloppante de son texte, si caractéristique de la pensée sémite », qui analyse finement son impact anthropologique.

Jésus le guérisseur de l’étape antérieure avait déjà attiré l’attention sur sa manière de s’exprimer : il n’explique pas, mais procède par « images » qui culminent dans la parabole du SEMEUR. Comme le grain « donne des fruits en montant » (en écho à Isaïe 55,10-11), SA parole à lui va FERTILISER l’auditoire, à condition que celui-ci l’écoute d’une certaine façon. Il ne s’agit pas de comprendre un message comme une « com », mais de se laisser d’abord ébranler par le paradoxe : les mots sont des grains, le Maitre est un semeur. Vous êtes sidérés, cascade de rêveries, de sensations. Puis vous transformez la sidération en curiosité, en désir de sens. Vous associez votre vie à la parole entendue, vous racontez, vous vous raconter, c’est vivre, c’est agir. En hébreu, DIBBER veut bien dire simultanément « Dire » et « Faire » ! Mais c’est dans l’intimité la plus secrète, la plus tempétueuse, que Jésus va distiller cette dynamique du dire/faire. Ses paraboles atteignent l’homme et la femme dans les catastrophes psychiques, physiques, mortelles de leur vie. Comment ?

Après avoir « clôt la bouche » de la mer démontée, au point que la puissance de ce miracle effraye ses disciples (le Maître ne serait-il pas le Béelzéboul (3,20-35), il calme un aliéné qui habite les tombes en chassant la légion de ses démons hors de cet homme, dans « deux mille porcs ».

Et c’est dans le contact avec deux femmes que se dévoile l’intense profondeur affective sous-jacente à sa puissance verbale. Le toucher, la levée et la force structurent ici le récit de Marc.

Alors que la foule se presse autour de Jésus jusqu’à l’écraser, après qu’il ait guéri l’aliéné, une femme affligée depuis douze ans (12 comme les apôtres) d’incurable écoulement de sang, s’approche « de derrière » et « touche son manteau ». Geste singulier s’il en est, impur et lourd de désir (l’hémorragique est attirée par le pouvoir de cet homme qui excite l’opinion), de défi obscène (toucher le Maître alors qu’elle saigne : double transgression), de peur et de confiance. Comme il a sorti des tombes le déséquilibré en l’appelant à s’identifier (« Quel est ton nom ? »), Jésus formule en mots le trouble rapport charnel que la femme hémorragique tente avec lui : « Qui a touché mon vêtement ? » La question amorce déjà une interprétation du contact entre une personne inconnue (Qui êtes-vous ?) et, non pas le Maître, mais un élément de son intimité : « mon vêtement ». Va-t-il se dénuder ?

Surprenant pour les disciples, cet appel qui nomme le désir confus de l’impétrante fait plus que la sortir de la foule. Acte de reconnaissance d’autrui, la parole de Jésus révèle aussi la puissance de son propre ressenti qui le transcende. « Une force était sortie de lui. », commente Marc en révélant le secret de cette séquence en quatre gestes de paroles.

De quelle « force » s’agit-il ? Dynamis grecque, virtus latine ? En hébreu, la racine shadad, « être puissant », « capable », évoquant l’akkadien « montagne, désigne la « montée », l’« élévation ». Le Dieu des patriarches et de Job est shaddaï, « Tout-puissant ». La virilité fertilisante du semeur (4.2-23) en passe de devenir élan psychique, signifiance, élévation subliminale ? Et transmissible. Une Foi qui sauve. La sienne, la mienne, la nôtre. Omnipotens Deus. « Ta foi t’a sauvée. »

La « force » (montée, la semence) de Jésus partage donc l’excitation de ceux qui se portent vers lui. Sans satisfaire leur désir en panne, il se contente de le nommer avec une justesse telle que la pulsion se transmue en curiosité psychique, en quête de rencontre et de survie, en amour. L’excitation muette et sans emploi disloquait l’aliéné. Elle s’écoulait dans l’impuissance esseulée de la femme intouchable. Elle saturait d’angoisse la supplication paternelle de Jaïre et sa fille pubertaire de douze ans (encore 12) que Jésus fera se lever de son coma (épileptique, incestueux ?) en lui « tenant la main » (encore le contact) et en lui enjoignant tendrement : « Talitha, koumi », « Fillette, je te dis de te lever ». Comme le grain, comme une plante qui pousse, qui lève, qui monte… Moi et Toi, moi et vous : dans la rencontre entre votre poussée insensée et la mienne/la nôtre que je formule. Par ce contact nommé, la jouissance dévastatrice devient un tact, le degré zéro de la communion, une force de l’amour.

Au carrefour de l’excitation sans nom et de la puissance sublimatoire : le toucher. Aristote savait que, générique de tous les sens, le toucher les fonde et les dépasse. Tandis que les disciples de Loyola devaient en faire une conséquence de l’amour (« De l’union de la charité vient le toucher, de la joie qu’elle procure vient le goût »), Thérèse d’Avila parvenait à le diffracter en subtiles immersions dans pas moins de quatre espèces d’eaux (la pluie, la rivière, la noria, le puits), pour transmuer le trop plein de désir en baptêmes extatiques.

Touchant la peau qui touche la chair, le manteau : protection ou passerelle de ces plaisirs qu’on nomme à la légère physiques ? Proust semble amplifier le ressenti de la femme hémorragique palpant l’étoffe du Maître, et/ou celui de l’homme qui sent monter en lui sa jouissance : il regarda « le manteau/…/son velouté encore doux/…/sentit le velours fondre sous sa main et crut qu’il embrassait sa mère. » Et Joyce le diabolique, complice de Molly Bloom, à moins que ce ne soit de Jésus lui-même : « est-ce que nous avons trop de sang dans le corps ou quoi O sainte patience c’est comme une mer qui coule en moi/…/ O Jésus que je me lève /.../ de ce vieux lit infernal aussi qui fait une musique de diable. »

Plus qu’un Maître guérisseur, Jésus est en train d’inviter les communautés juive et païennes à une nouvelle vie de l’esprit fait corps, du corps fait esprit. Par l’intensité de l’investissement réciproque dans ce lien que sera la Foi où le Verbe est Amour. Il ne l’accomplira pleinement qu’au Golgotha et par la résurrection. Fin de l’histoire.

Freud fonde la psychanalyse sur ce geste de la parole qu’il appelle un amour de transfert. Une autre histoire, sans fin.

Julia Kristeva, Le monde des religions, Hors-série n°17 (décembre 2011)

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Le Greco, Jésus chassant les marchands du temple

Le Greco, Jésus chassant les marchands du temple, 1570.
Zoom : cliquer sur l’image.

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Spéculations I

Une vie divine à Turin

Ici, le jour se lève chaque fois avec la même perfection et la même luminosité débordantes : les grands arbres splendides sur un fond jaune ardent, le ciel et le grand fleuve d’un bleu tendre, l’air de la plus grande pureté — un Claude Lorrain comme je n’avais jamais rêvé d’en voir. Des fruits, des raisins d’un brun suave — et moins chers qu’à Venise ! En toutes choses, je trouve qu’ici la vie vaut la peine d’être vécue.

F. Nietzsche, Lettre à H. Köselitz, Turin, 30 octobre 1888.

Sans doute faut-il aujourd’hui un peu complexifier les choses. C’est aussi à Turin où il vécut de manière particulièrement heureuse (cf. Nietzsche à Turin) avant de sombrer dans la « folie », que Nietzsche a écrit sa Loi contre le christianisme, « promulguée au jour du Salut, premier jour de l’An I (le 30 septembre 1888 du faux calendrier) ». Il en est beaucoup question, et pour cause, dans Une vie divine dont Sollers, adoptant le calendrier de Nietzsche, date expressément la fin : « 30 septembre 118 [9] » :

« Je suis à Turin avec Ludi, elle a une présentation de mode. Nous venons de Rome et de Milan, on finira par un week-end à Venise. C’est l’hiver, mais il fait très beau. L’avion plonge sur les Alpes blanches, et voici la ville.

Elle a ses rendez-vous, je marche dans ces rues où M.N. a été si heureux et si tragiquement malheureux. Étrange cité, où le fabuleux Joseph de Maistre est mort en 1821, à 68 ans (il est enterré dans l’église des Jésuites), où le Saint-Suaire, serré dans son coffre vous regarde depuis son énigme scientifico-théologique, où il est difficile, aujourd’hui, d’imaginer un fiacre, un cheval, un cocher brutal. Voici donc le lieu où M.N. est tombé. Silence. Turin, an 1.

On me dit que Turin est un lieu particulièrement satanique, que les sociétés secrètes y pullulent, qu’on s’y livre encore, la nuit, à de douteuses cérémonies sexualisantes, qu’on y officie sous le contrôle de la Congrégation du Sale Sacrement, inversion parodique de celle, ancienne et disparue, du Saint Sacrement. Tout cela est amusant, le plus cocasse étant la montée simultanée d’incrédulité et de crédulité (le dernier best-seller vous raconte les péripéties des enfants que Jésus-Christ a eus avec Marie-Madeleine, les Américains, et surtout les Américaines, raffolant de ce genre de conneries).

Le comte de Maistre, qui comptait tellement sur la Providence et les ressources intra-maçonniques de la tradition catholique, serait-il surpris de l’évolution en cours ? Mais non, il tiendrait bon, il poursuivrait sa démonstration grandiose sur l’erreur inconsciemment au service de la vérité. Quant au Suaire, est-il authentique ou faux ? La question semble encore suspendue entre la Palestine du 1er siècle du faux calendrier et le Moyen Âge du même. La science affirme que c’est un faux tardif (mais tardif par rapport à quoi ?), mais est encore incapable d’expliquer comment l’empreinte sanglante d’un crucifié aussi exact que solennel a pu s’imprimer sur ce linge. Est-ce LUI ? Vraiment LUI ? Le négatif photo est impressionnant, et, en effet, ce serait énorme. M.N. n’a jamais vu ce négatif, mais il savait que le Suaire était là, il ne pouvait pas ne pas y penser même s’il n’en parle jamais. Le Christ et l’Antéchrist dans la même ville, Dionysos et le Crucifié dans le même quartier, ça ne peut pas s’inventer.
Ricanez si vous voulez, moi j’écoute.

L’époque, à vrai dire, s’en fout. Rien n’est plus loin d’elle que cette histoire de dieu se sacrifiant dans un épisode de torture sanglante pour la rédemption des péchés. Si on montre ça au cinéma de façon un peu crue (coups, crachats, flagellation, mise en croix), tout le monde se convulse, se récrie, proteste, comme si n’avait jamais eu lieu, mauvaise plaisanterie porno antisémite. D’ailleurs, Dieu lui-même... Vraiment. Vous y croyez ? Créateur du ciel et de la terre ? Des choses visibles et invisibles ? Avec sa Loi et son peuple élu ? Avec ce Fils sanguinolent, tordu, inhumé et ressuscité ? Écoutez, ça ne marche plus, mais ça marche de plus en plus. Paradoxe ? Non, routine. » (2006, folio 4533, p. 180-182)

Peu après, le narrateur se voit suggérer une étrange proposition par de « braves illuminés », « athées (n’est-ce pas ?) » : « [...] une opération subversive d’envergure pourrait avoir lieu à Turin, et il serait souhaitable que je puisse en répercuter les effets en France. En gros : forçage du tombeau de Joseph de Maistre, ce pape de l’ultraréaction, et dispersion de ses restes aux cris de "vive la révolution !" ; commando armé sur la cathédrale avec rapt du Saint-Suaire brûlé ensuite sur le lieu où M.N. est tombé dans sa crise finale... » (folio 4533, p. 186)

En juin 2007, Sollers conclut un article sur Joseph de Maistre par ces mots :

« Sur le plan de la raison raisonnante, Maistre a eu tort. Il n’a rien vu, bien au contraire, de la régénération qu’il annonçait. Il est mort en 1821 à Turin (date de naissance de Baudelaire), et il est enterré dans l’église des jésuites, à deux pas du saint suaire contesté et du lieu d’effondrement de Nietzsche. Ces trois points triangulaires me font rêver. » (je souligne)

Plaque commémorative de Friedrich Nietzsche (15 octobre 1844 – 25 août 1900), Via Carlo Alberto, Turin.
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Graal

Nous sommes cette fois en 2022. Sollers insiste — dans la surdité générale.

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Photogramme du film GRAAL.

« Alors entre aussi l’autre, le premier arrivé au tombeau, il voit, et il croit ». Cette parole de Jean (20.8), le premier à croire à la résurrection du Christ, ouvre le film Graal réalisé par G.K. Galabov et Sophie Zhang en 2022. Elle s’entend au présent alors que la plupart des traductions la mettent à l’imparfait. « Il voit, et il croit ». Vers la fin du film, la tête du Christ qui figure dans La résurrection de Piero della Francesca se superpose à celle du saint Suaire de Turin jusqu’à si confondre... Cette tête du Christ de La résurrection de Piero figure telle quelle sur la couverture du numéro 19 d’art press daté de juin 1978 qui avait pour thème « Dieu est-il mort ? ». Un numéro, présenté par Jacques Henric, dans lequel Sollers donnait un long entretien intitulé La « lettre volée » de l’Évangile.

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Spéculations II

Depuis des années, le débat fait rage autour du saint suaire ou, plus exactement, du linceul de Turin. Est-ce un faux ? De quand date-t-il ? Les scientifiques multiplient les hypothèses tandis que les chrétiens étayent leur conviction.


Le linceul de Turin.
© Vernon Miller, 1978. ZOOM : cliquer sur l’image.
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Le linceul de Turin.
Pour voir l’image complète : cliquer sur l’image.
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L’énigme du suaire de Turin

2012. « Cette pièce de tissu est une des plus célèbres reliques au monde. S’agit-il du linceul du Christ ou d’une vaste escroquerie ? Les enquêtes n’ont jamais apporté de preuve concluante et le Vatican, bien que le suaire soit conservé depuis trois siècles en la cathédrale de Turin, a toujours évité de se prononcer. A en croire un test au carbone 14 opéré sur un échantillon, le tissu date de la fin du XIIIe siècle ou du début du XIVe siècle. Mais des traces de caractères hébraïques contrediraient la thèse d’une contrefaçon du Moyen Age. Une chercheuse italienne distingue un certificat de décès inscrit sur le linceul, alors que d’autres scientifiques ne voient absolument rien. En outre, les analyses chimiques n’ont révélé aucune application manuelle de peinture ou de pigment, aucun coup de pinceau, aucun trait. Comment cette image recto verso d’un homme nu, avec des marques de perforation aux poignets et aux chevilles, une blessure au thorax et des griffures à la tête, s’est-elle déposée ?

S’agirait-il d’une réaction de Maillard, que l’on observe lors de la cuisson des aliments, la chaleur du corps en décomposition ayant caramélisé le sucre contenu dans le lin ? Ou bien le suaire serait-il la première photo de l’histoire ? Oui, vous avez bien lu : une projection photographique obtenue à l’aide d’une « camera obscura ». Les peintres du Moyen Age recouraient à ces chambres noires, pourquoi pas un faussaire ? Projeter une image, c’est une chose, mais la fixer sur un support, c’est différent. Pas de problème : le sulfate d’argent était connu au Moyen Age. Les chercheurs ont réponse à tout. Chacun défend sa théorie mordicus. L’un d’eux n’hésite pas à recouvrir un cadavre de porc d’un drap de lin lavé avec de l’herbe à savon, comme au temps du Christ, pour étudier l’effet des gaz libérés par la putréfaction sur le textile. » (Eric De Saint Angel, téléobs)

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Le Linceul de Turin

2015. Alors que le Pape François se rend à Turin pour y vénérer le Saint-Suaire, Régis Burnet se penche sur cette insigne relique qui connaît une extraordinaire popularité. Au fil des siècles et en dépit de la science et de ses recherches, le Linceul de Turin reste un mystère controversé pour les uns, une icône pour les autres. En tout cas, ce linge unique ne laisse pas indifférent. Pourquoi cette relique du linceul du Christ, apparue en Champagne en 1357 comme nous le disent les historiens, suscite-t-elle une telle ferveur ? D’où vient-elle ? Quelle est son authenticité ? Quelle est la position de l’Église sur ce point ? Et enfin, pourquoi cette étoffe interpelle de si nombreuses personnes ? Autant de questions cruciales à aborder pour ne pas rester dans l’abstraction ni dans l’indifférence sur un objet de piété séculaire. Pour défricher le mystère, Béatrice Guespereau, vice-présidente de "Montre-nous Ton Visage", l’association chrétienne qui vulgarise et fait connaître les travaux autour du Suaire, intervient en compagnie d’un jésuite, le père Martin Pochon. Ce dernier, ingénieur de formation, pose le regard du prêtre et du théologien sur le Linceul, en l’appréhendant comme icône.
La Foi prise au Mot du 14/06/2015.

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Prière du Pape François devant le Saint-Suaire

Prière du Pape François devant le Saint-Suaire, à Turin, où il se rend les 21 et 22 juin 2015, pour vénérer le Linceul et fêter les 200 ans de la naissance de Don Bosco.

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LIRE : Pour le pape François, le Saint Suaire pousse vers le visage de toute personne souffrante

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Le Linceul de Turin ne peut venir que de la Résurrection du Christ

2018. Aujourd’hui, avec l’accumulation de découvertes étonnantes sur cet objet qui est le plus étudié au monde (500.000 heures de recherches scientifiques de haut niveau) il est possible de conclure que ce linge est bien celui qui a enveloppé le corps du Christ après sa mort en l’an 30 à Jérusalem et d’affirmer que le rayonnement qui a provoqué l’image imprimée sur le tissu, - image stupéfiante, inexplicable et non reproductible par la science à ce jour - (négatif montrant une image nette à partir d’une oxydation acide déshydratante de densité variable indiquant une information de distance) ne peut venir que du "flash" de la Résurrection.

En s’attachant à mettre en lumière 5 arguments précis qui sont tous décisifs, la présentation explique pourquoi, dans l’état de la connaissance actuelle, rester dans le doute et ne pas conclure serait une attitude idéologique, incohérente et inadaptée.

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Depuis la rédaction de mon article sur le saint Suaire de Turin en 2018, d’autres interprétations ont vu le jour.

Le Suaire de Turin - Une relique pour le XXe siècle

2020. Faire l’histoire
Série documentaire (France, 18mn)

Patrick Boucheron aborde l’histoire par le prisme des objets. Par le miracle de la révélation photographique, en 1898, le prétendu linceul du Christ s’est transformé en relique pour le XXe siècle : le négatif, par son pouvoir de dévoilement de traits invisibles à l’œil nu, est devenu lui-même le lieu d’inscription du merveilleux et le signe de présence d’un sacré devenu "reproductible".

Yann Potin, archiviste et historien, reconstitue pour nous les multiples avatars de cet objet sacré, depuis sa première attestation au XIVe siècle.

Objets d’histoire
Proposé et présenté par le médiéviste Patrick Boucheron (Quand l’histoire fait dates), ce nouveau rendez-vous hebdomadaire est animé par des historiens. Chaque semaine, un intervenant différent raconte la destinée d’un objet, associant récit et analyse. Tout peut "faire l’histoire" : objets génériques (le miroir) ou uniques (le suaire de Turin), matériaux (la brique) et documents (la déclaration d’impôt). Un traitement graphique original agrémente les images d’archives d’un trait ludique et pédagogique. En fin d’émission, la chronique de la Youtubeuse Manon Bril fait traverser la frontière entre cultures historique et numérique.

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Le Linceul de Turin, un signe pour notre génération

2022. Après l’analyse de Jean-Baptiste Rinaudo, biophysicien à l’université Montpellier, c’est cette fois un prêtre, le Père René Luc, lui aussi de Montpellier, qui fait le point sur ce qu’il appelle les "concordances" du saint Suaire avec les évangiles.

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Le Saint-Suaire de Turin daterait bel et bien de l’époque du Christ

2022. Selon des chercheurs italiens, le suaire de Turin, ce tissu dans lequel aurait été enveloppé le Christ, n’aurait pas 700 ans, comme on le croyait jusqu’ici, mais 2000 ans. Son âge serait donc compatible avec celui de la mort de Jésus.

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Une équipe de scientifiques du Conseil National de la Recherche (CNR) italien vient d’étudier un échantillon du Saint-Suaire à l’aide d’une nouvelle technique de datation par rayons X, appelée WAXS. Elle permet de mesurer le vieillissement naturel de la cellulose du lin à l’aide de rayons X puis de convertir ce vieillissement en temps écoulé depuis la fabrication du tissu.

Les chercheurs ont ensuite comparé les résultats de cette analyse avec quatre échantillons de tissus témoins datant d’époques allant de 3000 ans avant Jésus-Christ jusqu’aux années 2000. Leur conclusion est claire : l’échantillon analysé se rapproche le plus du tissu du siège de Massada, soit il y a environ 2000 ans.

La datation au carbone 14 de 1988 remise en cause

Le suaire de Turin serait donc bien plus ancien que les sept siècles d’âge que lui attribuaient les trois équipes de scientifiques qui avaient procédé en 1988 à une datation au carbone 14 à la demande de l’Eglise.

Mais aujourd’hui encore, alors que cette nouvelle analyse fait grand bruit au sein de la communauté scientifique et des catholiques, l’Eglise ne se prononce pas sur le caractère véridique ou non de la datation.

Il faut dire que l’âge du suaire fait toujours l’objet de controverses et qu’aujourd’hui encore, les conclusions de 1988 sont critiquées. Selon l’expert Gilles Perrault, spécialiste en art et en dépistage de faux, la technique au carbone 14 nécessite des conditions spécifiques de milieu et d’air qui n’existaient pas à l’époque.

Une méthode d’évaluation sujette à caution

Autrement dit, les expériences de 1988 n’ont pas été effectuées sous vide comme elles le sont aujourd’hui. Pour cette raison, les fibres du suaire ont pu être altérées par le toucher de fidèles, l’exposition au soleil ou encore les radiographies du tissu, qui ont elles aussi pu modifier la présence du carbone 14.

Ce sont autant d’éléments qui remettent en cause les conclusions scientifiques de l’époque, mais qui peuvent aussi entacher celles d’aujourd’hui. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle les chercheurs de cette dernière découverte appellent la communauté scientifique à confirmer leurs résultats par d’autres recherches, "surtout sur un objet aussi mystérieux que le Saint-Suaire", soulignent-ils.

Carole Pirker/RTSreligion/oang



[1Voir Dante.

[2Le saint suaire :
Note de L’événement du jeudi : « Le saint suaire ou le faux miraculeux. La datation au carbone 14 est formelle : le portrait le plus mystique du monde date de la fin du Moyen Age. C’est-à-dire des siècles après le Messie qu’il est censé représenter, mais aussi des siècles avant la photographie dont il emploie les techniques (l’image n’est cohérente qu’en négatif comme ci-contre). »

[4Voir saint Philippe.

[5Voir Crucifixions chez Picasso, Bacon, De Kooning.

[6Résurrection ? Celle, par exemple, évoquée dans Les Voyageurs du Temps...

La Résurrection de Mantegna (1431-1506), peinture sur bois, musée de Tours.
ZOOM : cliquer sur l’image

Voir Sois vainqueur ! Ressuscite ! et Dionysos et le Ressuscité.

[7Voir Triomphe de Bach.

[8Sollers revient longuement sur les Proses évangéliques de Rimbaud dans Illuminations à travers les textes sacrés, folio, 2003.

[92005.

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6 Messages

  • Albert Gauvin | 10 septembre 2022 - 16:11 2

    Précision : vous trouverez sous le tire Le Suaire de l’Histoire et le Suaire de la Foi, l’entretien que Jean-Christian Petitfils a donné au Figaro Magazine le 12 août et que VK a mis en ligne.


  • Albert Gauvin | 9 septembre 2022 - 12:19 3

    Suite des spéculations.

    Une enquête définitive sur le Saint Suaire ? Le titre accroche l’œil ces dernières semaines dans les bonnes librairies. Qu’apporte de nouveau l’ouvrage de Jean-Christian Petitfils ?

    Jean-Christian Petitfils, historien et écrivain, auteur de biographies reconnues de plusieurs rois de France (les Bourbon en particulier), s’est distingué depuis quelques années par un certain nombre d’ouvrages sur le Christ. Après son Jésus (Fayard, 2011) et son Dictionnaire amoureux de Jésus (Plon, 2015), il vient de publier Le Saint Suaire de Turin, Témoin de la Passion de Jésus-Christ (Tallandier, 2022).

    L’ouvrage se trouve en tête de gondole dans le rayon religieux de nombreuses librairies et porte un bandeau annonçant une « enquête définitive ». La formule accrocheuse pourra sembler excessive aux plus avertis, puisque les recherches sur la mystérieuse relique du drap mortuaire du Christ, celui qu’on appelle communément le «  Saint Suaire de Turin  », évoluent et progressent très rapidement. L’ouvrage de Jean-Christian Petitfils offre pourtant une synthèse claire et complète de l’état des études sur le linceul, tout en ajoutant un regard et des données originales sur certains points d’ombre, notamment en ce qui concerne l’histoire de l’objet et celle de la controverse quant à son authenticité.

    Le travail de Jean-Christian Petitfils est divisé en trois grandes parties. Il reprend dans un premier temps l’histoire de la relique, afin de montrer comment la connaissance que nous avons de son parcours, malgré certains points d’ombre, apporte une haute certitude à la conviction de son authenticité. Dans une deuxième partie – « Que dit la science ? » il retrace l’évolution des recherches effectuées sur le linceul, jusqu’à présenter l’état actuel des débats, et mentionne ainsi les trésors d’informations contenus sur ce grand drap de lin brun : taches de sang, traces du corps, pollens, constitution du tissu, présence ou non de pigments… Dans une troisième partie – « Témoin de la Passion et de la Résurrection », l’auteur réunit les données apportées par la recherche expérimentale et en tire un aperçu heure par heure de la Passion, une véritable méditation des instants ultimes du sacrifice du Christ, selon les données physiques et médicales contenues sur le Saint Suaire.

    L’apport de cet ouvrage est double selon nous. Il présente en premier lieu une synthèse efficace, bien informée et organisée, des données relatives au Saint Suaire. Il permet ainsi de prendre connaissance de l’état de la recherche effectuée sur la relique et des débats qu’elle a suscités, et récapitule les principaux arguments en faveur de son authenticité. On se référera ainsi avec profit à ce livre pour contempler ce précieux document, témoin des instants où s’opéra notre salut, comme pour se remettre en mémoire les principaux arguments qui font du linceul du Christ un formidable outil apologétique, un défi jeté par Dieu à la science humaine et à l’incrédulité contemporaine.

    Mais le travail de Jean-Christian Petitfils nous semble plus particulièrement novateur en ce qu’il doit au talent d’historien de l’auteur, qui s’était déjà illustré dans ses principales biographies par la dextérité avec laquelle il sait présenter les énigmes encore non-élucidés de notre histoire, et mener à plusieurs siècles de distance l’enquête, pour dirimer l’affaire du collier ou mettre en lumière le mystérieux complot commanditaire de Ravaillac. Il identifie ainsi dans l’histoire du linceul deux zones d’ombre, sur lesquelles il s’efforce de jeter un certain éclairage. La première est la plus épineuse et la plus floue : il s’agit de l’origine même de la relique et des premiers siècles de son histoire. Entre les légendes (la fameuse histoire d’Abgar, roi d’Osrhoène qui aurait écrit une lettre à Jésus et en aurait reçu en réponse le Suaire) et les quelques traces d’apparition de la relique en Orient, l’auteur s’efforce de reconstruire le parcours qui aurait pu être le sien, de Jérusalem à Edesse, puis à Constantinople, où sa présence est attestée avec certitude au Xe siècle (l’homélie prononcée le 16 août 944 pour sa translation solennelle dans la capitale impériale est pleine de détails qui permettent une identification presque sûre) et plus encore au milieu du XIIe (le témoin irréfutable en est la double miniature du Codex Pray, dont les détails correspondent parfaitement au tissu – jusqu’aux trous laissés par diverses brûlures).

    L’enquête reprend lorsque la trace du Suaire s’estompe à nouveau, dans le chaos du sac de Constantinople par les croisés en 1204. Pour cette période où les données historiques sont plus nombreuses mais parfois contradictoires, Jean-Christian Petitfils mène avec brio une enquête où paraît tout son talent d’historien : il expose les principales thèses avancées jusque-là avec leurs objections majeures, mentionne les explications plus farfelues esquissées par certains, puis apporte de nouvelles preuves qui lui semblent permettre de dessiner un parcours crédible du Suaire, de Constantinople à Lirey, petit village de Champagne où il réapparaît au milieu du XIVe siècle. Le passionnant voyage dans lequel il nous emmène fait croiser les pas de saint Louis marchant nu-pieds à la rencontre des saintes reliques de la Passion arrivant de Byzance, ou celles de Philippe VI, roi malheureux d’une France embarquée dans la Guerre de Cent ans.

    Outre l’intérêt historique et presque romanesque de ces enquêtes, elles viennent conforter l’authenticité de la relique, dont la traçabilité historique est considérablement renforcée. L’identification à coup sûr du linceul de Turin avec le drap mortuaire représenté vers 1170 sur le Codex Pray est un premier argument majeur contre la datation controversée établie à la fin des années 1980 par le Carbone 14, qui voulait faire correspondre l’origine du Suaire avec son arrivée en Champagne, vers la seconde moitié du XIVe siècle.

    Après ces enquêtes qui nous plongent dans les méandres de la grande histoire, Jean-Christian Petitfils prend le temps, dans la seconde partie de l’ouvrage, de détailler les grandes étapes de la recherche scientifique sur le linceul, depuis la première photographie réalisée par l’italien Secundo Pia jusqu’aux dernières hypothèses considérées (il apporte ainsi des données très récentes sur l’étude des possibles traces de pièces de monnaie posées sur le yeux du Christ, ou encore sur les écritures grecques semblant apparaître de part et d’autre de son visage). Il reprend son costume d’enquêteur lorsqu’il s’agit de débrouiller la controverse autour de la datation au Carbone 14, dont il montre clairement les enjeux et les zones d’ombre, offrant ainsi une explication possible pour son surprenant résultat.

    Plus qu’une enquête définitive, cet ouvrage est une porte ouverte sur le mystère du Christ, que Dieu nous donne à contempler à travers cette relique qu’il a voulu nous léguer de sa Passion et sa Résurrection. L’impressionnante somme de données apportées par l’auteur, comme les questions demeurant irrésolues et qu’il ne manque pas de soulever, sont une invitation à chercher sur le Suaire le visage de Jésus, et à admirer comment la Providence vient appeler le monde du XXIe siècle, dans son rationalisme et son scientisme effrénés, à la foi en la folie d’amour de la croix.

    Abbé Paul Roy, FSSP, 1er septembre 2022.

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    Le Saint Suaire de Turin, l’enquête définitive !

    Fasciné depuis 44 ans par le linceul, Jean-Christian Petitfils lui consacre une enquête complète dans un livre « le Saint Suaire de Turin ». Il était l’invité de Culture Club ce 8 septembre 2022. Nombreuses sont les reliques présentées comme le Saint-Suaire : le Suaire de Turin, de Compiègne, de Besançon, de Cadouin, de Lierre ou encore…

    Nombreuses sont les reliques présentées comme le Saint-Suaire : le Suaire de Turin, de Compiègne, de Besançon, de Cadouin, de Lierre ou encore d’Oviedo. Jean-Christian Petifils a tenté de percer les mystères de cette relique.

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    « Ce n’est pas une question de foi, (…) c’est une énigme d’histoire, d’archéologie, une énigme scientifique aussi, bien sûr » prévient l’historien. Son livre questionne l’histoire, la science mais aussi la foi de l’auteur. Le Saint-Suaire va voyager, si bien que sa trace sera perdue les premiers siècles, «  par conséquent historiquement, il n’y a pas de certitude absolue que ce soit bien celui de Jésus  », explique Jean-Christian Petitfils, il apparaît en l’an 387-388 dans une ville qui s’appelle Edesse en Turquie ». Le début de la vénération du linceul va changer l’iconographie de Jésus, «  à la fin du IV ème siècle, Jésus est représenté en imberbe, en dieu romain, puis on va se caler sur les représentations de l’homme du linceul.  » Jésus est représenté avec une barbe à partir de cette époque. Le Saint-Suaire va ensuite traverser l’histoire, Au XVe siècle, les suaires de Compiègne et Cadouin vont concurrencer celui de Turin.

    Datation au carbone 14 et fleurs de Jérusalem

    La datation au Carbone 14 de 1989 sera un fiasco pour Jean-Christian Petitfils : « échantillon surnuméraire », prélevé sans autorisation et « ajouté quand le cardinal Ballestrero avait le dos tourné. Résultat, explique l’historien, les premiers résultats ont été publiés dans la revue Nature, il y avait une contradiction entre les résultats des laboratoires d’Oxford, Zurich et Tucson, avec cent ans d’écart dans les datations. En 2017 il y a un jeune chercheur a obtenu du British Muséum, le coordinateur de l’opération les chiffres bruts. Et là, ça part dans tous les sens, c’est à dire qu’aucun des trois échantillons ne semble appartenir au même linge. » Selon les derniers tests, réalisés par rayon X en avril 2022, le linceul de Turin daterait du Ier siècle. Une expérience réalisée par le professeur Giovanni Fanti, à l’aide de rayon X. En comparant le linceul à un échantillon de linge, trouvé à Massada, haut lieu de la résistance juive détruite en 73, le scientifique y a trouvé des traces de « 27 fleurs identiques ».

    Pour l’historien, le Saint-Suaire de Turin représente bien la figure de Jésus mis au tombeau. Une enquête à découvrir à travers 464 pages, «  Le Saint Suaire de Turin – l’enquête définitive, 8 septembre 2022.


  • A.G. | 27 décembre 2017 - 10:39 4

    Jésus - L’encyclopédie

    Si Jésus apparaît comme une figure éminente dans l’histoire de l’humanité, sa vie, ses actes et son message réels demeurent paradoxalement assez méconnus. Dans quel milieu a-t-il vécu, qu’a-t-il dit, fait et transmis ? Et que penser de la valeur historique des récits évangéliques, au-delà des discours dogmatiques et des strates culturelles accumulées depuis deux millénaires ?
    Conçue et dirigée par Joseph Doré, voici la grande synthèse inédite des données établies (ou discutées) par la recherche historique, qui répond sans tabou à toutes les interrogations du public. Outre une lecture critique des textes, elle propose aussi les regards croisés de philosophes, psychanalystes, écrivains et autres personnalités chrétiennes, juives, musulmanes, athées et agnostiques.
    Un ouvrage de référence sur un personnage unique, Jésus, qui garde son mystère et interroge chacun de nous sur le mystère qu’il est à lui-même. albin.michel

    Table ronde au Collège des Bernardins

    LIRE : Un entretien avec Mgr Joseph Doré
    Odon Vallet, Tout Jésus pour tous.


  • A.G. | 22 mars 2017 - 11:43 5

    Au Saint Sépulcre, le tombeau du Christ fin prêt pour Pâques

    La première phase de rénovation de l’édifice qui abrite le rocher original du sépulcre du Christ à Jérusalem touche à sa fin. Une célébration œcuménique est prévue mercredi 22 mars pour célébrer la fin de ce chantier collectif.


    Le tombeau du Christ rénové dans l’église du Saint-Sépulcre, le 20 mars.
    Sebastian Scheiner/AP ; Zoom : cliquez l’image.
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    L’événement est aussi historique qu’émouvant : après neuf mois de travail continu, le petit édifice qui, selon la tradition chrétienne, abrite le tombeau de Jésus-Christ, a fait peau neuve. La façade en calcaire rose, assombrie par la flamme des lampes à huile et des bougies, a retrouvé sa couleur originelle et révèle désormais nettement les écritures en grec byzantin gravées sur les parois. C’est officiel : « Les travaux de réhabilitation sur le saint édicule sont terminés ».

    Mercredi 20 mars au matin au Saint Sépulcre, Antonia Moropoulou, qui a dirigé le chantier, a troqué son casque jaune contre un foulard coloré noué autour du cou. Autour, des ouvriers s’activent pour défaire les palissades qui protégeaient le bâtiment situé sous la rotonde de la basilique.

    Entamé en mai 2016, le chantier se termine avant les célébrations de Pâques, calendrier liturgique oblige. Et selon l’accord conclu en mars 2016 par les Églises en charge des travaux – les grecs-orthodoxes, les franciscains (de rite catholique) et les Arméniens orthodoxes, lesquelles ont confié la restauration à une équipe scientifique de l’école polytechnique d’Athènes, sur proposition de l’Église grecque-orthodoxe.

    Un bâtiment construit en 1810

    Il s’agissait d’assurer « la stabilité structurelle » du bâtiment construit sous la direction de l’architecte grec Komnenos en 1810, après la destruction du précédent dans un incendie en 1808. Les intempéries, le séisme de 1927, l’intense fréquentation et l’humidité persistante avaient fortement endommagé l’ensemble actuel.

    Dès juillet 2016, l’édicule a donc été désossé – ses pierres numérotées, nettoyées et remises en place. Les fresques à l’intérieur et les peintures sur bois du dôme ont été restaurées. Enfin, en février dernier, la structure métallique installée en 1947 pour soutenir l’édicule a été retirée, une fois sa stabilité assurée.

    Mais le point d’orgue de la rénovation reste l’ouverture du tombeau du Christ le 26 octobre 2016. Ce soir-là, une fois les portes de la basilique closes, et l’autorisation obtenue de la part des chefs des trois Églises, les scientifiques ont tiré les deux plaques de marbre qui recouvrent la pierre où le corps de Jésus crucifié aurait été déposé. Moment unique, pour les témoins, religieux et laïcs, qui ont eu la chance d’entrevoir la pierre du tombeau taillé dans la roche, pendant les soixante heures d’intervention technique.

    Technologies de pointe

    « S’agit-il vraiment du tombeau de Jésus ? » La question est sans cesse posée au professeur Moropoulou. Mais elle n’a pas la réponse. On l’a mandatée pour une « rénovation conservatrice » et non pour une « étude archéologique », rappelle le P. Eugenio Alliata, archéologue et professeur au Studium Biblicum Franciscanum de Jérusalem.

    Des moyens technologiques de pointe ont été déployés sur le chantier, lequel a mobilisé plus de 70 personnes – ingénieurs, architectes et conservateurs grecs, ainsi que des manœuvres locaux. Mais le volet archéologique de l’opération n’a pas été traité. « C’était pourtant une occasion unique », regrette le P. Alliata.

    Il tire néanmoins quelques conclusions des rapports transmis par Antonia Moropoulou. Tout d’abord, sur les dimensions de la chambre funéraire : une « banquette étroite » taillée pour « un seul corps ». Ensuite, sur l’identification des deux plaques de marbre de couleur grise et marquée d’une croix lorraine, « caractéristique de l’époque croisée ». Les examens archéométriques ont été réalisés pour déterminer l’ancienneté des matériaux. « Les données seront mises en libre accès pour les chercheurs du monde entier », a également assuré le professeur Moropoulou.

    Trois millions et demi d’euros de travaux

    Malgré tout, l’archéologue franciscain salue la réussite du chantier vécu dans un « contexte humain et religieux difficile », sous le statu quo qui régit la vie des communautés sur place. Une cérémonie œcuménique aura d’ailleurs lieu pour bénir l’édicule restauré.

    Avec un montant des travaux estimé à trois millions et demi d’euros, les Églises gardiennes du lieu ont été aidées, entre autres, par le Fonds mondial pour les monuments, la compagnie aérienne grecque Aegean Airlines et le roi Abdullah II de Jordanie.

    Le 18 mars, la Custodie de Terre Sainte a annoncé que le Saint-Siège offrait 500 000 dollars pour la rénovation future du dallage autour de l’édicule. Une contribution attribuée lorsque « les communautés titulaires du statu quo » se seront mises d’accord sur ce nouveau chantier.

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    « L’émotion n’est pas retombée »

    par Marie-Armelle Beaulieu, rédactrice en chef de Terre Sainte Magazine.

    « Je suis entrée dans l’édicule le lendemain de l’ouverture du tombeau de Jésus. Il faisait sombre et c’est avec la seule lumière de mon téléphone que j’ai pu découvrir la pierre où aurait été déposé le corps de Jésus. Potentiellement celle que Marie-Madeleine, Pierre et Jean ont vue. Quatre mois après, l’émotion n’est toujours pas retombée. Mon cerveau est comme en état d’apesanteur.
    Cette expérience n’a rien ajouté à ma foi en la résurrection de Jésus. Car après tout, je suis entrée pour constater que le tombeau était vide : c’est ce qui me dit que le Christ est vivant ! L’édicule a beau être restauré, il reste un écrin vide.
    Ce mystère de la vacuité à cet endroit du Saint Sépulcre nous engage à une démarche de foi. Il faut y croire. Car le seul endroit où Il n’est pas, c’est bien ici. »

    Claire Bastier (à Jérusalem), La Croix


  • Viktor Kirtov | 24 décembre 2016 - 13:28 6


    L’Osservatore Romano, 24 décembre 2016
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    Noël religieux ou marchand est un symbole et une occasion de rassemblement,
    c’est dire une double opportunité de tuer pour les tueurs djihadistes.
    Ce fut, hélas, à nouveau le cas à Berlin en cette période de Noël 2016.

    Derrière ce symbole, un nom celui du Christ !
    Est-ce un hasard si Julia Kristeva dont le nom porte l’empreinte du Christ et auteure de « Cet incroyable besoin de croire » ou « Thérèse mon amour » sur cette figure exceptionnelle que fut Thérèse d’Avila, soit régulièrement présente dans les colonnes de L’Osservatore Romano, bien qu’athée ? Récemment encore, dans l’édition du 16 décembre 2016, L’Osservatore Romano consacrait une critique à son dernier livre « Je me voyage. ».

    Le Christ, …le Verbe « …quand le Verbe s’est fait chair », la langue, autre observatoire de l’évolution des mœurs enregistre un mouvement, un glissement, comme le soulignait un commentateur à la radio : le traditionnel « Merry Christmas », le « Joyeux Noël » perd du terrain au profit de « Joyeuses Fêtes »… Signe des temps !