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Le nouvel ordre sexuel en marche / "Passion fixe" de Ph. Sollers

Espace privé, espace public

D 14 décembre 2006     A par Viktor Kirtov - C 14 messages Version imprimable de cet article Version imprimable    ................... PARTAGER . facebook


Cette entrée, aujourd’hui, est le résultat de la concomitance de deux faits divers :
L’un, public : l’annonce par marie Drucker de son retrait de la télévision pendant la campagne présidentielle, pour raison de liaison avec un ministre de la république... que le grand public ignorait malgré le dévoilement d’un journal.

L’autre, privé : la réception d’un courriel de Michaël Nooij, visiteur du site, poète et peintre citant un passage de « Passion fixe » de Sollers relatif à un personnage secondaire du roman : Théophile de Viau, poète inconnu du public, mais que l’on a quand même, en son temps, condamné au bûcher, pour érotisme libertin, un rebelle à la morale publique du temps qui jugeait cela licencieux et répréhensible. Le Cardinal de Richelieu était au pouvoir.

En arrière plan : vie privée, vie publique, femme, sexe, jugement public pour Théophile de Viau, ...privé pour Marie Drücker avec son annonce en forme d’autojugement, ...vie privée et publique de Philippe Sollers et Dominique Rolin.

La passion de Marie Drucker

Passion : un même mot pour désigner un amour sublimé et la souffrance. Comme s’il était de l’ordre des choses q’une passion soit sanctionnée. Marie Drucker, en annonçant son retrait de la télévision pendant la campagne officielle présidentielle, confirme, de facto, sa liaison avec un ministre de la République. Sa liaison est-elle scandaleuse, défait-elle un couple, la différence d’âge est-elle contre nature ? Non, rien de tout cela, l’homme est divorcé, la petite quarantaine. Alors ? Vie publique et vie privée complètement étanches, en France, jusqu’au dévoilement de Mazarine, la fille de Mitterrand ( avec son consentement implicite tant les apparitions en sa présence dans des lieux non privés, restaurants ou autres se multipliaient),eh bien, ne le sont plus.

Mazarine, c’était en 1994, après 20 ans de secret. Pour le public. Pas pour la presse et le « microcosme » parisien, selon la formule de Raymond Barre. Car, entre l’espace privé et l’espace public, il existe un espace intermédaire, Hannah Arendt, elle, l’appelle un espace commun ( partagé ici par une communauté d’initiés) qui ne se confond pas avec l’espace public... Un sous-ensemble en quelque-sorte ou un sas de décompression avant l’entrée dans l’espace public.

Après une autre présentatrice de Journal télévisé Béatrice Schönberg, que sa liaison puis son mariage avec un autre ministre de la République a écarté des studios, c’est au tour de Marie Drucker de s’incliner devant le nouveau diktat qui stipule que la vie privée des personnes publiques doit être publique. Nouveau diktat ou credo, - selon le point de vue - de la société du spectacle. Dévoilement implicitement choisi comme pour les mâles Mitterand et Sollers, ou dévoilement, encore subi, pour les femmes du JT pourrait faire remarquer la candidate, Ségolène Royal, à la présidence. Et il ne serait pas encore tolérable, d’utiliser le mot le plus symétrique de mâle pour ces femmes.

Néanmoins, et malgré les apparences, le point le plus important et commun à tous ces cas : la femme au centre du jeu. Le « nouvel ordre sexuel » en marche ! Sollers en a aussi relaté un amour caché dans « Passion fixe ».


Passion fixe de Philippe Sollers

Début 2000, Philippe Sollers publie Passion fixe, l’histoire d’un amour clandestin entre le narrateur et Dora, vingt ans de plus que lui. Au même moment, une romancière Dominique Rolin publie Journal amoureux. Hasard ? Non, Sollers y est pour quelque chose, à double titre. Il a été le coach de D.R. pour qu’elle accouche du livre. Et puis dans ce livre, l’auteur raconte sa passion pour « Jim », écrivain brillant de vingt ans son cadet. Bernard Pivot, dans son émission « Bouillon de culture » lance son "scoop" : Jim c’est Philippe et Dora c’est Dominique annonce t-il goguenard, sûr de son effet sur le public. C’était quand ? Il y a un demi siècle ? Non, il y a six ans, seulement ! « Bien sûr le Tout-Paris connaissait cet amour entre ces deux-là, le respectait et s’en foutait mais Romorantin ne le savait pas. » résumera Françoise Xénakis.

Quatrième de couverture

«  Je dis passion fixe, puisque j’ai eu beau changer, bouger, me contredire, avancer, reculer, progresser, évoluer, déraper, régresser, grossir, maigrir, vieillir, rajeunir, m’arrêter, repartir, je n’ai jamais suivi, en somme, que cette fixité passionnée. J’ai envie de dire que c’est elle qui me vit, me meurt, se sert de moi, me façonne, m’abandonne, me reprend, me roule. Je l’oublie, je me souviens d’elle, j’ai confiance en elle, elle se fraye un chemin à travers moi. Je suis moi quand elle est moi. Elle m’enveloppe, me quitte, me conseille, s’abstient, s’absente, me rejoint. Je suis un poisson dans son eau, un prénom dans son nom multiple. Elle m’a laissé naître, elle saura comment me faire mourir. »

L’exergue

« Notre pratique est un chemin dans les sables, où l’on doit se conduire par l’étoile du Nord plutôt que par les vestiges qu’on y voit imprimés. La confusion des traces qu’un nombre presque infini de personnes Y ont laissées est si grande, et on y trouve tant de différents sentiers qui mènent presque tous dans des déserts affreux, qu’il est presque impossible de ne pas s’égarer de la véritable voie que les seuls sages favorisés du Ciel ont heureusement su démêler et reconnaître. »

LIMOJON DE SAINT-DIDIER
Amsterdam, 1710

Le début

«  Ce mois-là, novembre ou décembre, j’avais vraiment décidé d’en finir. Le revolver de Betty était là, sur la droite, je le regardais de temps en temps, je n’oublierai pas cette tache noire dans le tiroir, la fenêtre ouvrant sur la cour mouillée, la chambre étroite et mal meublée, le logeur obèse et sénile venant tous les deux jours me gueuler dans les oreilles que j’avais encore oublié la lumière en sortant. Il me restait un peu d’argent pour huit ou dix jours, mais autant le claquer en une nuit, non, et puis shlack, bonsoir l’horizon buté, baisées les bêtises. Dans ce genre de situation, les injures vous fusent directement dans la tête, elles éclatent en silence, elles s’adressent à une masse physique indifférenciée ramenée à son fond merdeux. L’ennui, quoi.

Ça m’aurait amusé de laisser mon cadavre en prime de souci au logeur. [...] »

La fin

«  Le soir tombe, la nuit est là. J’ai rendez-vous pour dîner, avec Dora, au Marly. C’est l’anniversaire de notre rencontre. On ne va pas manquer ça.
J’écoute encore une fois, avant de sortir, une Partita de Bach interprétée par Clara. Elle surgit du disque, monumentale, délicate, agressive. Je la vois rapidement jouer dans une salle attentive et bondée, légère transpiration sur le front quand elle salue, bien droite, puis un peu pliée, le bras gauche sur son piano noir.
Il fait doux et sec, la lune brille sur les pyramides du Louvre. L’incroyable statue équestre de Louis XIV par Bernin peut être vue différemment de huit côtés à la fois.
La salle du restaurant donne sur un large aménagement de statues françaises du dix-septième siècle. Danses et mouvements en tous sens. On est dans un coin.
Dora est gaie, les affaires sont excellentes. Quand les coupes de champagne sont là, je sors de ma poche les deux petites boîtes rouges que j’ai préparées avec soin. Deux anciennes bagues de jade chinoises rondes, une verte, une blanche. La verte pour elle, la blanche pour moi.
Elle est surprise. Ses beaux yeux s’embuent. Pleurer, elle ? Sûrement pas. C’est juste un murmure de merci qui franchit ses lèvres.
 »


Théophile de Viau.

Ce qu’en dit Philippe Sollers.

« Un autre mort de 36 ans, le 25 septembre 1626, s’appelle Théophile de Viau, poète du sud-ouest de la France. Lui, il est condamné à mort, par un arrêt du Parlement, précisant qu’il doit être "mené et conduit en la place de Grève et brûlé vif, son corps réduit en cendres, icelles jetées au vent et ses livres aussi brûlés." Comme on n’arrive pas à l’arrêter, on fabrique un mannequin habillé comme lui et on y met le feu solennellement. Il court dans la nature, on l’arrête, il passe deux ans dans la tour de Montmorency, y est exilé, se réfugie dans l’île de Ré, puis à Chantilly, puis à Paris, où il semble que le roi le protège. Mais enfin, il est usé par la prison, il meurt. »

L’auteur parle de Théophile après une disgression sur la mort trop jeune à 36 ans de Cyrano de Bergerac, qui dans ce roman de Ph. S. joue un rôle stimulant... précise M. Nooij.

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Théophile de Viau par Michaël Nooij
ZOOM : Clic sur image

Ce qu’en dit Michaël Nooij

« Coureur, bretteur, né au pays des mousquetaires.[...] quoique né de bonne noblesse agenaise, ne se sent à l’aise qu’avec des gens de sac et de cordes. A Leyde le bouillant gascon passe son temps dans les tavernes entabagées au milieu de trognes tireurs de couteau, du soldatesque démobilisé, des catins, conasses et prostiputes.
Au cours de ses ribotes, le beau frenchy a très bien pu manger du pain chaud dont la farine venait du moulin du père de Rembrandt, situé pas loin de son logis, au bord du Rhin-ancien. Le génial rapin batave y naît en 1606... »

Plus sur son blog



Critiques de Passion fixe

L’avis de la Fnac

« Philippe Sollers écrivain raconte Philippe Sollers écrivain, mais homme aussi, définitivement. Au début Sollers erre, déprime. Pistolet en main, envie de suicide, envie de sauter dans le fleuve... Jamais. Sollers aime la vie. Un soir il rencontre Dora, qu’il suit pour une étreinte charnelle, indélébile. "Et, d’emblée, une fidélité de fond, à la vie à la mort, difficile de savoir pourquoi." Un chemin, une vie rythmée par le corps de Dora. "Partout la route est accueillante, un bouquet d’arbres, l’amour dans la forêt, debout ou couchés dans l’herbe." L’écrivain Sollers raconte également la philosophie chinoise et ses instants créatifs, l’ ?uvre qui naît dans l’immobilisme. Une rose rouge sur du papier blanc, une fleur qui fane et parfois des mots griffonnés rapidement. "Voilà comment mes livres se sont écrits." »

Services Documentaires Multimedia (SDM)

« Les amours heureuses du narrateur et d’une avocate, son aînée de quelque douze ans, constituent le point de départ de ce roman ; et les lecteurs attirés par les secrets d’alcôves s’empresseront de le mettre en parallèle avec Journal amoureux de Dominique Rolin. Mais comme dans tous les récits de Sollers depuis Femmes, bien plus qu’à une autobiographie transposée, la trame romanesque sert de prétexte à une critique de la société contemporaine (l’impératif production-consommation-distraction de la mondialisation économique) ainsi qu’à la défense et illustration de sa contrepartie : l’art de vivre libertin du narrateur. Les digressions et les citations abondent, et il sera particulièrement question de la Chine et du Yi-King, de Cyrano de Bergerac (l’auteur et non la pièce), de Lautréamont, de Rimbaud, de peinture et de musique, tous remèdes souverains aux entreprises de lavage du cerveau qui empoisonnent l’époque. »

MichelCrépu (L’Express)
«  Sollers l’immoraliste
Dans Passion fixe, [Philippe Sollers] compose, sur fond d’après-Mai, un duo amoureux. Léger et chinois.
 »

Michaël Nooij

Note de lecture d’histoires-littéraires

« On retiendra en particulier d’abondantes citations de Lautréamont, de Cyrano de Bergerac ou du Yi King version horoscope. L’égoïsme féroce qui s’exprime ici au nom de la poursuite du " bonheur " et de l’ "amour " nous change par ailleurs agréablement du narcissisme geignard de beaucoup de productions courantes, que Sollers condamne avec raison (autres citations à l’appui). »


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14 Messages

  • michael nooij | 25 septembre 2011 - 14:21 1

    vers virils bien sûr...


  • michael nooij | 25 septembre 2011 - 14:20 2

    Quelques vers viriles de Théophile pour les connaisseurs :

    Mes couilles, quand mon vit se dresse,

    Gros comme un membre de mulet,

    Plaisent aux doigts de ma maîtresse

    Plus que deux grains de chapelet.

    ______________________________________________

    L’autre jour inspiré d’une divine flamme,

    J’entrai dedans un temple, où tout religieux,

    Examinant de près mes actes vicieux,

    Un repentir profond fit soupirer mon âme.

    Tandis qu’à mon secours tous les Dieux je réclame,

    Je vois venir Phyllis : quand j’aperçus ses yeux,

    Je m’écriai tout haut : ce sont ici mes Dieux,

    Ce Temple, et cet Autel appartient à ma Dame.

    Les Dieux injuriés de ce crime d’Amour

    Conspirent par vengeance à me ravir le jour ;

    Mais que sans plus tarder leur flamme me confonde.

    Ô mort, quand tu voudras je suis prêt à partir ;

    Car je suis assuré que je mourrai martyr,

    Pour avoir adoré le plus bel oeil du monde.

    Voir en ligne : 71 portraits à zoomer deux fois


  • Marie-Gabrielle Montant | 24 février 2008 - 08:48 3

    Quid au deuxième sexe... (puisqu’à bien y parler on eut dit l’homme).

    http://www.voltaire-integral.com/Html/19/faste.htm

    Franche amitié,

    Marie


  • Marie-Gabrielle Montant | 24 février 2008 - 08:28 4

    Juste Viktor... un(e) petite prise ! puisqu’à ces mots, les miens n’en firent plus qu’un dont la substance (est) grise : "Le potier ajoute un sexe aux icônes féminines sans changer la tête, ni le corps." (voir votre comm. le 14).

    Comment pouviez-vous - et nous le pûmes - vis(s)er un vers de terre sans qu’il en faille alors aucun droit de cité ? Un peu "scandalisée", je n’oserai - outrée...

    Un reste étant tassé plutôt juste... la femme est bien du grand mystère le beau de nos géographies.

    Faste,

    Marie


  • anonyme | 15 janvier 2007 - 16:53 5

    L’intitulé doit être du N.O. et pas des deux écrivains sinon je suis tout à fait d’accord avec vous sur les deux points !


  • Alina Reyes | 14 janvier 2007 - 15:26 6

    A.G., "sauver les couples" sonne à mon oreille comme "sauver le mariage" comme mode de reproduction de toutes les tares de la société, ainsi que le disait à peu près Barthes, sauver les "couples menteurs" ainsi que le disait Rimbaud, sauver les apparences et le patrimoine, la sécurité etc, tout le vieux système bourgeois. D’ailleurs le mot couple m’a toujours fait assez horreur. Je préfère suivre le mouvement de ma vie, sans souci de préserver un quelconque acquis.

    Pour Ségolène Royal, je ne l’accuse évidemment pas de national-socialisme, le problème est que ce sont les mêmes réflexes de besoin de sécurité qui font se tourner vers elle ses électeurs et ceux de Le Pen. Je suis en train d’étudier tout ça dans le détail, il faudrait qu’on s’en rende compte un peu mieux car eux, les leaders, savent très bien par où ils attrapent les électeurs et on ne peut pas penser que ça n’aura pas de conséquences, sinon immédiates du moins à court ou un peu plus long terme.

    Voir en ligne : http://alinareyes.com


  • A.G. | 14 janvier 2007 - 14:28 7

    Quand l’infidélité sauve les couples, par Philippe Sollers et Julia Kristeva

    N. O. - Avouer son infidélité ou la dissimuler, cela reste le grand problème des couples...

    Julia Kristeva. - Je crois qu’il n’y a pas de secret, du moins pas de secret absolu. Notre art de déchiffrer les sensations et les comportements est très subtil, et il est facile de comprendre sans mettre les points sur les i. Par ailleurs, l’information, la médisance, les ragots se propagent. Donc, on sait, indubitablement. Maintenant : dire ou ne pas dire ? (...) Mieux vaut d’abord s’interroger personnellement sur le fait de dire. Pourquoi dire ? Dans quel but ? Cacher est parfois impossible, mais la sincérité dans ce domaine est aussi une illusion.

    Philippe Sollers. - Je suis pour le secret ou du moins pour la plus grande discrétion. Je crois que l’être humain n’a jamais à se justifier de sa sexualité. Il en est entièrement responsable. Il n’a pas à en parler, sauf si cela le rend malade, et alors là il peut aller sur ton divan. On peut avoir des comptes à rendre dans l’existence sociale, matérielle, intellectuelle, affective, mais sexuellement jamais. Je crois aussi que la surveillance sociale a toujours tendance à vouloir limiter sur ce plan la liberté des individus. (...) Le secret est donc nécessaire. C’est l’étoffe de la liberté. Maintenant, pour vous amuser, voici une phrase de Kierkegaard : « Femme, elle me hait ; femme intelligente, elle me craint ; femme supérieure, elle m’aime. » C’est beau, non ?

    Propos recueillis par François Armanet et Sylvie Véran, N. Obs. 8 août 1996.

    PS : Quoiqu’on pense de Ségolène, évoquer le national-socialisme, n’est-ce pas un rapprochement un peu excessif ?


  • Alina Reyes | 14 janvier 2007 - 11:17 8

    Oui, bien sûr, je comprends tout à fait ce "fixe". Ce qui tout en changeant demeure. Et puis ce mot me fait penser aussi au "fix", vous savez, le trip dans les veines. Une fixation pour le voyage, nous revoici à l’étoile polaire.
    Les sociétés matriarcales, j’y crois à moitié, les archéologues je pense ne savent pas exactement non plus, elles étaient matriarcales dans une certaine mesure seulement. Chez moi dans les Pyrénées c’est aussi une sorte de société matriarcale au temps où une toute jeune fille voit la Vierge dans une grotte et un siècle après encore, où s’applique le droit d’aînesse y compris pour les filles, l’aîné(e) héritant tout le patrimoine et devenant chef d’une famille étendue à la fratrie ; où les femmes aussi travaillaient comme les hommes et étaient de moeurs très libres. Encore aujourd’hui il faut entendre le respect des montagnards pour les femmes, ce n’est pas rien... N’empêche que les hommes restent des hommes et le sont aussi librement qu’ailleurs. Donc l’avènement, ou le ré-avènement des femmes ne serait une bonne nouvelle que s’il se fait dans un esprit de respect et non de mort, souvenez-vous le début de "Femmes", les femmes c’est la mort, aussi... C’est la mort quand elles veulent abolir toute distance avec leurs proches pour les avaler, les ré-intégrer, les garder prisonniers. Tendance de notre monde, en effet, et dans ce sens pas forcément bonne nouvelle !

    Voir en ligne : http://alinareyes.com


  • Viktor | 14 janvier 2007 - 10:52 9

    Quand je vous fixe, je vous vois. Quand Sollers clame sa « passion fixe », je ne pense pas qu’il fasse l’éloge du statique, du figé. Fixe, au sens de référence, de « boussole », oui. Ne pas se laisser déboussoler, pour autant : ce n’est pas le Nord qui change, seulement l’aiguille de la boussole, ( encore que les scientifiques nous disent qu’il a bougé dans le temps).

    Et, quand vous vous retirez au « désert », le lieu change, mais vous restez vous-même. Fixe ET changeante à la fois. Paradoxal ? Même pas pour les physiciens qui sondent l’infiniment petit des particules de la matière et restent cois devant ce constat : les lois de l’infiniment petit sont paradoxales et défient notre « bon sens » très primaire. Elles stipulent, rien moins, qu’une particule peut se trouver, en même temps, en deux endroits différents.
    _ Je vous fixe et voila que je vois trouble !

    Sur le rôle des femmes, on peut aussi noter que les recherches archéologiques tendent à montrer que les plus anciennes sociétés dont on retrouve la trace, d’ avant le néolithique, étaient matriarcales. Leurs vieux mythes reconstitués à partir de leurs icônes en terre cuite, les dessins qui les illustrent le disent : c’étaient les femmes qui détenaient le pouvoir et contrôlaient les échanges commerciaux. Alliance du pouvoir économique et du pouvoir tout court. Déjà ! C’est ce qu’ont montré les fouilles de Karakoum au Turkménistan. Et puis, progressivement, basculement vers des sociétés patriarcales. Le potier ajoute un sexe aux icônes féminines sans changer la tête, ni le corps. Quand ceci a t-il eu lieu ? Il faut toujours de grands événements pour modifier les rapports de force et engendrer de nouveaux mythes nous disent, encore, les archéologues. Ils notent que ce basculement progressif du matriarcat au patriarcat coïncide avec la maîtrise du feu. Aujourd’hui, le grand événement de l’époque, c’est la maîtrise de la conception par les femmes qui coïncide avec leur montée en puissance et maîtrise du pouvoir.

    Retour aux sociétés matriarcales ? Je vous regarde et je vous vois en couverture de « La vérité nue », en compagnie de votre comparse Stéphane Zagdanski, dans le costume d’Adam et Eve nous annoncer la bonne nouvelle... (pour vous les femmes, mais est-ce une si bonne nouvelle pour vous ?)
    _ Je vous fixe et je ne vois pas trouble.


  • Alina Reyes | 14 janvier 2007 - 00:21 10

    Viktor, vous êtes un comique... Rien n’est fixe chez moi, tout est souple et en mouvement !
    Quant à Sollers, qu’il aime avec constance, oui c’est très beau, je partage ça avec lui quoique de façon différente, constante en amour et en amitié, moi sa "fidèle infidèle" comme je le lui écrivis un jour en dédicace de mon petit livre "Moha m’aime" il me semble.
    En tout cas la partie politique de ma réponse à votre article m’a donné envie de développer bien mieux, j’y ai travaillé jusqu’à cette heure avancée de la nuit car cela mérite davantage que quelques lignes de commentaires.
    P.S. Des femmes parmi les Pères, comme vous dites, c’est intéressant. J’ai moi-même été père, même si le jeune homme que j’adoptai ainsi n’en sut rien (c’est pourtant pourquoi il m’aima sans jamais défaillir, ce que je comprends bien, ayant été fille d’un père aussi...) Et du temps de Rûmî en Anatolie, treizième siècle, les femmes aussi pouvaient être des maîtres spirituels et avoir des disciples. Vous voyez, rien de ce qui est vivant n’est fixe, mais vient, évolue, change, revient...

    Voir en ligne : http://alinareyes.com


  • Viktor | 13 janvier 2007 - 20:02 11

    « accorder son discours et son être et agir avec une justesse réelle. » : oui, Alina, il faut saluer ceux qui y parviennent. Et Sollers, dans ses passions fixes pour Dominique Rolin & Julia Kristeva a dû y réussir, il me semble ! Ce serait d’ailleurs une bonne grille d’appréciation pour choisir le/la futur(e) président(e). Est-ce qu’on peut le dire pour Ségolène Royal.. ? Hum, hum, hum... !! Pour Nicolas Sarkozy.. ? Hum, hum... !!
    _...Ce ne doit pas être un critère politique ; dommage pour eux et pour nous.
    Est-ce que j’y arrive moi-même ? Hum, hum, hum, hum............ !!!!!!!!!!

    ... « Je lis aussi Ignace de Loyola, Bernard de Clairvaux, Thérèse d’Avila et toujours Jean de la Croix, Chestov, Rûmi » nous dit Alina Reyes sur son site... Vous êtes sceptique ? Alors allez y voir et lisez l’entrée du 9 janvier 2007 : « Un bateau nommé désir ». Jusqu’au bout S.V.P. Oui, les Pères de l’Eglise font aussi partie de ses passions fixes.

    ( Et de me souvenir du premier texte de Sollers, « Introduction aux lieux d’aisance » en forme de canular de potache (écrit pendant les cours), avec pour exergue « Faîtes ce qui est en vous. » Th. D’Avila. )

    PS : La même Thérèse d’Avila : « Quand il y a des perdrix, on mange des perdrix ; et quand c’est le temps de la pénitence, on fait pénitence ! » Toujours d’actualité, et à méditer en période de promesses électorales. Il faut absolument relire les Pères de l’Eglise. Même chez eux, il y a des femmes. C’est pour rendre plus justes nos grilles d’appréciation.


  • Alina Reyes | 13 janvier 2007 - 11:19 12

    Le libertinage quand il est conçu comme joyeuse participation au monde, tel qu’il nous est présenté ici, n’est évidemment en rien condamnable. Mais il est en réalité rarement innocent, respecte rarement les personnes, souvent manipule et fait du mal, qui plus est un mal stérile contrairement au mal que peut faire l’amour.
    Pas de libertinage dans le cas de Marie Drucker, ni d’ailleurs dans la relation de Philippe Sollers et Dominique Rolin, autant qu’il semble, mais de l’amour, justement. Je vois dans le cas de Marie Drucker un souci de justesse tout à fait honorable même si ça paraît déplacé dans un monde où toutes les corruptions et toutes les compromissions sont admises, c’est dans le même esprit qu’elle a refusé le cadeau d’une voiture à l’occasion de je ne sais quel prix qui lui a été décerné. Certes le ministre aurait pu démissionner, au lieu d’elle, mais elle l’a voulu ainsi, a préféré séparer sa vie professionnelle et sa vie privée, nul ne lui en demandait autant mais c’est un beau geste.
    Quant à Ségolène Royal, je ne vois pas ce qu’elle pourrait en dire. Herbert Marcuse a bien montré comment l’Etat national socialiste avait effacé la distinction entre Etat et société, comment il avait phagocyté vie privée et vie culturelle, jusque-là séparées du champ de l’Etat dans la démocratie. C’est exactement ce que tend à faire le socialisme en organisant les fêtes et manifestations publiques, et entrant dans la vie privée, spécialement Royal la blogueuse qui veut "remettre les familles au carré".
    Nous vivons dans un temps dangereux, où beaucoup rêvent "Le Pen président, Royal premier ministre", on voit ça sur internet, la tentation d’allier nationalisme et socialisme n’est pas nouvelle en période de crise profonde ; et il faut saluer les personnes qui ont le souci de leur conscience, d’accorder leur discours et leur être et d’agir avec une justesse réelle.

    Voir en ligne : de la justesse


  • V.K. | 15 décembre 2006 - 18:33 13

    Merci à DB pour ces vers de Théophile, bel écho au «  je n’ai jamais suivi, en somme, que cette fixité passionnée. » de Sollers, ou l’inverse.

    Marie Drucker pourra aussi méditer ces autres vers de Théophile de Viau :

    « Quand j’aurai ce contentement
    _ De te voir sans empêchement,
    _ Objet unique de ma joie,
    _ Cher maître de ma volonté,
    _ A quoi voudras-tu que j’emploie
    _ Les heures de ma liberté ? »

    Il a écrit des vers plus virils, c’est sûr ! « Le Parnasse des Poètes Satyriques » (1622) en a rendu compte, mais, hélas, ne dispose d’aucune édition de ces textes... ni du recueil signalé par DB.


  • db | 14 décembre 2006 - 21:25 14

    Oui, oui, oui... mille fois oui à Théophile...
    Filez aux textes bien sûr et encore à
    "Théophile de Viau : un poète rebelle", de Guido Saba, PUF Ecrivains, 1999 et pour une belle évocation "La fleur des rues" de Michèle et Michel Chaillou, Fayard, 2000.

    "J’approuve qu’un chacun suive en tout la nature :
    /
    Son empire est plaisant et sa loi n’est pas dure ;
    /
    Ne suivant que son train jusqu’au dernier moment,
    /
    Même dans les malheurs on passe heureusement."

    Et tenez, comme ça, par hasard :
    "Le savoir est honteux depuis que l’ignorance
    /
    A versé son venin dans le sein de la France."