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Le premier mot « Au commencement » - Histoire d’un contresens

Pierre-Henry Salfati

D 11 avril 2021     A par Albert Gauvin - C 0 messages Version imprimable de cet article Version imprimable    ................... PARTAGER . facebook



Ni essai, ni roman, mais mieux qu’un essai ou un roman, Le premier mot « Au commencement »/Histoire d’un contresens, le dernier livre de Pierre-Henry Salfati devrait faire date comme celui, paru l’an dernier, de Marc-Alain Ouaknin La Genèse de la Genèse. Tout se joue dans les sept premiers mots de la Bible, nous disait Ouaknin. Les traducteurs ont oublié deux petits mots. Il ne faut pas lire « Au commencement, Dieu créa le ciel et la terre », mais « Premièrement. Elohim créa l’alphabet du ciel et l’alphabet de la terre ». Exit le commencement donc et place à l’écriture. Salfati se concentre sur le premier mot de la Torah בראשית (Bereshit), un hapax intraduisible, dit-il, et montre, lui aussi, s’appuyant sur Rachi de Troyes, que ce mot n’a jamais voulu dire « Au commencement ». Quand un cinéaste-documentariste se mêle de philologie, de religion, de philosophie, de sociologie et de géopolitique, cela peut nous amener à revoir deux mille ans d’Histoire et de malentendus. « Il n’est pas question de croyance, de piété ou de foi, mais simplement de relecture appliquée d’un texte qui se révèle plus impressionnante qu’une simple lecture. »

Le premier mot « Au commencement »

"Toutes les Bibles du monde font commencer « la » Bible par l’expression « Au commencement ».

L’expression est devenue tellement usuelle qu’il peut sembler parfaitement incongru de préciser qu’en hébreu, le mot Bereshit, premier mot de la Torah hébraïque, n’a pour sa part jamais signifié « Au commencement ». C’est tout simplement un mot qu’aucune langue ne peut réellement traduire, on ne le trouve qu’une unique fois dans l’ensemble du livre, aucune autre référence ne permettant de circonscrire son sens littéral.

A l’aide du commentaire de Rashi, célèbre rabbin et exégète du XIIe siècle, Pierre-Henry Salfati mène l’enquête.

Il nous éclaire sur le contresens qui a émergé après la traduction grecque de la Torah, la Septante, et sur ses conséquences considérables dans l’imaginaire collectif occidental, et tente ici de restituer le sens du texte origine." (Présentation de l’éditeur)

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Berechit : aux origines d’un contresens

Antoine Mercier - Journaliste, Pierre-Henry Salfati - Scénariste, réalisateur

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n°1 - citation - Le premier Rachi. L’étonnement de l’exégète
Rachi s’étonne que le livre de la Torah ne commence pas de suite par présenter les commandements. Le code de la Loi ne devrait-il pas commencer par la loi ?

n°2 - citation - Les incohérences chronologiques de la Torah. Torah et récit historique
Le texte de la Torah ne se lit pas de façon chronologique, ce principe est l’une des règles de l’herméneutique Talmudique

n°3 - citation - La traduction de la Septante

n°4 - citation - La source d’inspiration de Dieu. La Torah, plan du monde
Le Zohar présente la Torah comme ayant servi de plan lors de la création du monde. Elle constitue donc en quelque sorte la grille de lecture qui permet de déchiffrer le monde.

n°5 - citation - La souveraineté juive en Terre. Les trois serments de l’exil
Talmud bavli, traité Ketoubot, page 111A en hébreu accompagné de sa traduction...

AKADEM

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Pierre-Henry Salfati est l’invité de Marc-Alain Ouaknin pour son livre Le premier mot "Au commencement" Histoire d’un contresens.

Talmudiques par Marc-Alain Ouaknin, 4 et 11 avril 2021.

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Marc-Alain Ouaknin

« Longtemps, je me suis couché de bonne heure. Parfois, à peine ma bougie éteinte, mes yeux se fermaient si vite que je n’avais pas le temps de me dire : « Je m’endors. »

Ces deux phrases sont les deux premières d’À la recherche du temps perdu de Marcel Proust. Elles constituent ce que l’on nomme l’incipit, c’est à dire ce qui commence une œuvre et qui donnent la tonalité, qui intrigue, séduit, attire, ouvre des horizons d’attentes selon une formule chère aux classe de littérature.

Chaque roman et récit possède leur incipit, les œuvres musicales, les films aussi, et bien sûr les grands textes des traditions religieuses et spirituelles. Ainsi en va-t-il de la Bible hébraïque, de la Tora qui commence par une première lettre, un premier mot et une première phrase qui ouvrent ce texte.

Un mot en hébreu de six lettres qui se prononce béréshit et qu’une certaine tradition largement partagée propose de traduire par « Au Commencement ».

Mais est-ce vraiment une juste traduction de ce terme ? C’est à dire une traduction qui, avec justesse, rend justice à ce mot ? À son pouvoir dire qui dépasse de loin le seul fait d’être le début de quelque chose, l’origine, l’inauguration, l’amorce, l’éclosion ?

L’invité

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Pierre-Henry Salfati

Pierre-Henry Salfati débute sa carrière au cinéma dans les années 1980. En 1989 sort Tolérance, avec Rupert Everett, et obtient déjà une nomination aux Césars 1990, comme meilleure première œuvre.

1. La Torah et le premier mot

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2. Le Talmud et le premier mot

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« Le Temps n’est pas un ennemi. Le Temps est un ami. Il faut prendre son temps. »

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Pierre-Henry Salfati n’est pas que réalisateur et documentariste, puisqu’il signe le scénario de son propre film Zadoc et le bonheur, et en écrit d’autres pour Pavel Lounguine, avec Ligne de vie, et pour Miguel Courtois, avec Un Ange.

Pierre-Henry Salfati joue comme acteur dans Francorusse de Alexis Miansarow, où il interprète le rabbin Menahim.

Filmographie de Salfati pdf
Crédit : Talmudiques.

Il est auteur de plusieurs ouvrages dont Le destin de l’Occident, Athènes, Jérusalem avec Jacques Attali.

Pause musicale

L’ouverture de La flûte enchantée

LIRE AUSSI : Le premier mot de la Bible.

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Le film évoqué dans la deuxième partie de l’entretien avec Marc-Alain Ouaknin.

Talmud : un livre, un peuple

Un film de Pierre-Henry Salfati, 2006

C’est à Venise, en 1519, que fut imprimé pour la première fois le Talmud, par le chrétien David Bromberg. La rédaction de ces quelque 10 000 pages commença en 70 de l’ère chrétienne, peu de temps après la destruction du second Temple de Jérusalem. Enrichi par les commentaires et les questionnements des plus éminents exégètes, le Talmud a survécu à tous les autodafés. Pierre-Henry Salfati a choisi de partir d’une histoire amusante qui figure dans le Livre, celle de deux ramoneurs qui sortent d’une cheminée. L’un est sali, l’autre non : lequel ira se laver en premier ? Un point de départ original qui conduit le documentariste à New York, au Madison Square Garden, où 46 000 personnes achèvent ensemble le onzième cycle d’étude de l’intégralité du Talmud.

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Le Talmud, objet de toutes les méprises, est depuis deux mille ans au cœur de la vie juive traditionnelle. Livre unique, il a subi, à l’image de son peuple les errances, les persécutions, les métamorphoses.
Pierre-Henry Salfati, lui-même talmudiste, nous fait découvrir à travers tous les continents et toutes les époques comment le Talmud a généré communautés et individus incroyables, aux histoires surprenantes et uniques : les génies qui connaissent chaque cm2 de ses milliers de pages par cœur, les employés de Manhattan qui l’étudient chaque matin dans le train, les hassidim messianiques de Jérusalem, les collectionneurs fous… Parmi cette galerie fantastique, le livre est lui-même un personnage à part entière. On découvre ainsi des histoires de faux traités, d’autodafés, de cimetières livresques, de controverses avec le Ciel, d’imprimeries babéliennes, ou encore de divorce royal – celui d’Henry VIII en l’occurrence…
De New York à Jérusalem en passant par Paris, Venise ou Worms, Pierre-Henry Salfati nous initie avec bonheur à un monde peu connu, peuplé de figures exubérantes et de mystères historiques. Une vraie belle histoire juive, en somme, dans tous les sens du terme.

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LIRE AUSSI : Dévoilement du Messie

ET VOIR : Le séminaire de Stéphane Zagdanski, notamment L’inscription du monde.