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De nouveau sur La Divine Comédie, traduite par Danièle Robert

Dante Alighieri (Florence, mai 1265 - Ravenne, 14 septembre 1321)

D 11 septembre 2023     A par Albert Gauvin - Danièle ROBERT - C 8 messages Version imprimable de cet article Version imprimable    ................... PARTAGER . facebook


Lecteurs de Pileface, les oeuvres de Dante sont bien entendu depuis longtemps vos livres de chevet. La Divine Comédie, c’est un peu le journal de Dante. On le suit jour après jour jusqu’au paradis (ce qui n’est pas donné à tout le monde car il s’agit d’une expérience singulière). Depuis 2016, nous avons beaucoup parlé des traductions que Danièle Robert a réalisées d’Enfer, Purgatoire et Paradis. Eh bien, le vendredi 15 septembre au matin, la dernière traductrice du poète italien interviendra, avec Didier Ottaviani et René de Ceccatty, aux Rencontres de Chaminadour sur les Grands Chemins de Dante (l’invité cette année est, je le rappelle, Mathieu Larnaudie). Intitulé de sa conférence : Les doux styles nouveaux (Dante, avant et après). Que vous alliez ou pas à Guéret (je m’étais inscrit, mais je suis retenu au purgatoire et ne pourrai m’y rendre), il se peut que ayez envie de relire ce dossier du 25 mars 2021, l’année du 700ème anniversaire de la mort du poète, au moment où la traduction de La Divine Comédie par Danièle Robert était éditée en un seul volume chez Babel. Pour en savoir plus, beaucoup plus, c’est simple : cliquez ici.

Dernière minute : Danièle Robert, traductrice, qui devait participer aux Rencontres de Chaminadour, en est empêchée pour des raisons personnelles.

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Le 25 mars 2021, EN DIRECT ICI.

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L’itinéraire "Dante dans le monde" continue en France avec "Un voyage au Paradis" : l’Institut Culturel Italien de Paris accompagne le public au-delà du seuil du troisième royaume ultra-terrestre visité par Dante, le paradis, en proposant le binôme lecture - Réflexion du Chant Ier du Paradis , la troisième cantique de la Comédie. À partir de la lecture d’un extrait par l’acteur Nicolas Bouchaud (dans la version en langue française traduite par Danièle Robert pour ACTES SUD, 2020), le philosophe Bruno Pinchard, professeur émérite des Universités, chercheur CNRS / PSL Centre Jean Pépin et président de la Société dantesque de France et Franco Costantini, professeur agrégé d’italien et doctorant (Sorbonne Université, Georg-August Göttingen Universität) approfondiront les thèmes qui marquent la première étape du voyage paradisiaque vers la contemplation du mystère divin.

Dantedì - Les célébrations du réseau diplomatique et des Instituts culturels italiens en France : LE PROGRAMME COMPLET DE LA JOURNÉE

et, ô surprise !, à 18h 37, dans « Open jazz » d’Alex Dutilh sur France Musique, rubrique Jazz Culture : "La Divine Comédie" de Dante, traduction de Danièle Robert. Il faut dire que Danièle Robert est aussi l’auteur, aux éditions Le temps qu’il fait, en 1993, d’une biographie « sélective » et intimiste de Billie Holiday, Les Chants de l’aube de Lady Day [1], dont elle a traduit l’autobiographie, Lady Sings the Blues (Parenthèses)

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Inferno, Finale : « Les rives du mont Purgatoire »
Lincoln Center Orchestra
Sherman Irby (saxophones alto et soprano, flûte, piccolo, clarinette ; compositeur)

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« La Divine Comédie, c’est un poème. C’est un poème d’un genre assez particulier, et c’est également un récit par lequel Dante nous invite à le suivre, en le lisant, dans le voyage qu’il a fait lui-même – qu’il dit avoir fait –, voyage à la fois onirique et réaliste, voyage à la fois poétique et également puisé dans son intimité, c’est-à-dire que c’est également un voyage intérieur, une expérience intérieure, et il nous invite à la partager... » D. R.

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« Dante a pris cette histoire dans un fait divers qui avait eu lieu quelques années avant, et qui mettait en scène une jeune femme, Francesca da Rimini, qui avait été épousé le Seigneur de Malatesta, qui était plus âgé qu’elle, et elle est tombée amoureuse de son beau-frère... » D. R.

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Le Printemps du poète. La Divine Comédie traduite par Danièle Robert en un seul volume.

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De la descente dans les profondeurs de la terre au milieu des cris, des gémissements et des corps soumis aux pires tortures jusqu’à la contemplation de "l’Amour qui meut le Soleil et les étoiles" en passant par l’expérience de la métamorphose à laquelle le poète nous convie, La Divine Comédie sonde l’âme humaine à travers les aspects les plus divers de ses questionnements comme rarement une œuvre l’aura fait. Et par la puissance du langage, la magie des images tantôt terribles, tantôt lumineuses qui scandent le récit, Dante nous rappelle à quel point l’art est au centre de toute vie.

La traduction neuve de Danièle Robert — auteure chez Actes Sud de versions de référence des grands textes d’Ovide, de Catulle, et de l’œuvre poétique de Paul Auster — s’attache à respecter dans notre langue l’intégralité de la structure élaborée par Dante. Au cœur de celle-ci : la terza rima, qui constitue, avec la terzina, un véritable moteur pour le poème selon une rythmique créatrice de sens. Animée d’un souffle constant, ne se départant jamais du souci de fidélité au texte, cette traduction unanimement saluée permet d’aller plus avant dans la découverte de la beauté inventive, de la puissance, de la modernité du chef-d’œuvre universel qu’est La Divine Comédie.

LIRE SUR PILEFACE : NOS PRÉCÉDENTS ARTICLES

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Extrait de la préface de la nouvelle édition
par Danièle Robert
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L’ENTRELACS MUSAÏQUE
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Ainsi je vais entremêlant
les mots et les sons affinant comme est la langue entremêlée
à la langue dans le baiser
 [2]

BERNART MARTI

Dans l’important ouvrage où il définit la Divine Comédie comme un "laboratoire de l’avenir [3]’’, Bruno Pinchard lance cette apostrophe qui concentre en quelques lignes les points essentiels à partir desquels je me propose d’exposer les choix qui ont présidé à la présente traduction : "Hommes, ne cherchez pas la modernité dans les rues, elle est là, rangée, compacte. Où ? Dans les rimes de la Comédie. La modernité n’aurait pas le goût de cet ordre, s’insurge­ t-on. Quelle naïveté ! L’ordre de la Comédie, pensé, calculé jusqu’au dégoût, n’est que le signe invincible qu’un désordre absolu règne hors des signes [4]."
Pour saisir ce qui fonde la modernité des rimes de la Comédie ou, plus précisément, l’ordre nécessaire dans lequel elles s’inscrivent, il faut tout d’abord se pencher sur la structure générale de l’œuvre et par conséquent sur le sens - la direction — que Dante a voulu lui donner, conformément à son intime conviction, puisée aux sources de la pensée d’Aristote : "La forme, dans l’acception aristotélicienne du terme, est ce qui donne sens à une matière (contenu) ; et là, surtout, où la forme se manifeste par rayonnement, elle n’est pas une enveloppe extérieure d’un prétendu fond indéterminé qu’on revêt du dehors, mais un acte unifiant qu’il s’agit de ressaisir de l’intérieur [5]."

L’œuvre est tout entière placée sous le signe des chiffres 1, 3, et de leurs multiples : trois parties intitulées cantiche [6] (Inferno, Purgatorio, Paradiso), comportant chacune trente­ trois chants avec un prologue à l’ensemble qui est le chant I de l’Enfer, lequel s’ajoute ainsi aux quatre-vingt-dix-neuf autres chants pour que la totalité du poème aboutisse au nombre 100. Et l’on sait que Dante situe la "vision" du voyage qui l’a conduit de l’ombre vers la lumière en 1300, soit à l’orée du Trecento (XIVe siècle).

Si l’on détaille rapidement la structure de chacun des trois règnes, on constate que l’enfer est composé de neuf cercles, le septième se subdivisant en trois anneaux, et le huitième se décomposant en dix bolges : c’est Malebolge, le bas enfer ; que le purgatoire est précédé d’un antipurgatoire (sorte d’antichambre) formé, après une vaste plage, de deux assises et constitué lui-même de sept corniches, soit neuf niveaux à gravir avant d’accéder au paradis terrestre, dixième étape ; et que le paradis proprement dit comporte neuf ciels qui conduisent le poète jusqu’au dixième, l’Empyrée, lieu où se contemple l’unité de la Trinité, définie avec force en trois vers (28-30) au chant XIV du Paradis :

Ce un et deux et trois qui toujours vit,
et toujours règne en trois et deux et un,
non circonscrit et qui tout circonscrit...

Le chiffre 3 se rencontre tout au long des chants : citons, à titre d’exemple, les trois bêtes qui, dès la sortie de la forêt obscure, viennent s’interposer entre Dante et la colline qu’il cherche à gravir, ou les trois dames qui incitent Virgile, au chant II, à lui venir en aide : Béatrice, Lucie, Marie, ainsi que les trois faces de Lucifer qui dévorent dans !’éternité les trois pires traîtres : Judas, Brutus et Cassius ; et surtout les deux rencontres avec Béatrice, pour elle comme pour Dante à neuf ans puis à dix-huit ans. Charles S. Singleton a mis en évidence d’autres aspects de la numérologie complexe à l’œuvre dans le poème dans un essai intitulé "The Poet’s Number at the Center [7]".

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Or, l’élément immédiatement visible de ce symbolisme numérique se trouve dans le choix de la cellule de base : la terzina, strophe de trois hendécasyllabes — soit trente-trois syllabes — liés par un jeu de rimes entrelacées par trois et constituant un "moteur" qui propulse le texte selon une rythmique véritablement créatrice de sens : c’est le principe de la terza rima, enchaînement inspiré par le sirventès des troubadours (dont Bertran de Born, figure emblématique qui apparaît au chant XXVIII de l’Enfer, fut l’un des plus illustres représentants) mais que Dante a repensé en l’adaptant à la terzina et faisant du système rimique ainsi créé le fil conducteur du poème entier, un fil qu’il déroule sur 14233 vers, ce que personne n’avait tenté auparavant. On sait que les stilnovistes, tout comme les troubadours, employaient le mot rime/ rimes pour désigner le poème entier, et rimatori/rimeurs, voire rimailleurs (sans connotation péjorative) pour se désigner eux-mêmes ; les nombreuses formules mélodico-rythmiques ainsi créées étaient destinées à servir le chant.
La terzina est donc bien, avec la terza rima qui en est l’élément constitutif, la matrice à partir de laquelle naît et se développe le poème dantesque ; et chaque étape du cheminement de la forêt obscure vers la lumière se termine par un vers dont le dernier mot est stelle :

E quindi uscimmo a riveder le stelle (Inferno)
puro e disposto a salire a le stelle (Purgatorio)
l’amor che move il sole e l’altre stelle (Paradiso),

triple reprise en forme de point d’orgue qui relance à l’infini la quête, ainsi que le souligne Ossip Mandelstam : "La Divine Comédie ne se contente pas d’arracher le lecteur au temps, elle amplifie le temps comme fait une œuvre musicale lorsqu’on la joue. À mesure qu’il se prolonge, le poème nous éloigne de son achèvement, la fin elle-même survient à l’improviste et sonne comme un commencement [8]."

En outre, la relation du 3 au 1 se retrouve à la fin de chaque chant sous la forme d’un vers isolé qui ouvre la voie (et la voix) au chant suivant. Par là, et par le rythme de valse qu’elle induit ("un, due, tre... nascita, copula, morte", ainsi traduit avec humour par Vittorio Gassman dans le commentaire qu’il a ajouté à sa lecture de la Commedia [9]) , la terzina est comparable à la cellule mélodico-rythmique enregistrée par l’ethnomusicologue Simha Arom chez les Pygmées Aka et désignée par eux comme Ngue wa lembo, "la mère du chant", où l’on entend s’instaurer, à une voix et sur un mode répétitif, un rythme — soubassement régulateur du temps — qui ouvre progressivement au chant polyphonique dans lequel la liberté d’expression va pouvoir se déployer [10]. La terzina est, quant à elle, le rythme initial "pensé, calculé", qui donne au poème l’impulsion d’où jaillit et se déploie le souffle poétique — na lege ni, "selon le chemin" disent les Aka ; et le tressage des rimes qui lie les terzine les unes aux autres dans un tournoiement sans cesse renouvelé dessine et fait éprouver la lente descente de Dante et Virgile au fond de l’enfer par cercles concentriques, puis l’ascension de la montagne du purgatoire et enfin celle des ciels tournant à l’infini, jusqu’à l’immobilité sereine de !’Empyrée et de la rose mystique.
Géniale structure, à la fois rigoureuse, voire contraignante et, paradoxalement, libératrice dans la mesure où elle se situe à l’opposé de ce que l’on pourrait considérer comme un monotone retour du même, le rythme ternaire des rimes introduisant au cœur de chaque terzina un son nouveau, une rupture aussitôt reprise par deux rimes qui lui font écho dans la terzina suivante. Par ce jeu entre le même e l’autre, Dante imprime au poème !’essence de ce qui fonde son inspiration, le marque dans sa chair et va jusqu’à en faire un élément clé du développement logique de sa pensée.
Ainsi, il utilise ce dispositif de maintes façons, dont une particulièrement éloquente dans le Paradis où il introduit, à quatre moments de la cantica, une triple reprise du terme "Christ" aux chants XII, XIV, XIX et XXXII. Cette répétition d’un même mot-rime sur deux terzine, par trois fois, en quatre points différents de l’œuvre, se réfère directement à la vision de la croix flamboyante qu’il décrit au chant XIV, au centre de laquelle apparaît le visage du Christ et dont les quatre branches sont inscrites à l’intérieur d’un cercle ("signe éminent / qui fait se joindre les quatre quarts d’un rond") et crée une suite arithmétique 1, 2, 3, 4 = 10... inspirée de la Tetraktys de Pythagore. Le nom de Virgile et celui de Béatrice sont également mis en relief sous des formes légèrement différentes, mais toujours liées à la symbolique des nombres, au chant XXX du Purgatoire.

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Or, cet ordre mûrement réfléchi, méticuleusement calculé, n’est pas sans créer un certain nombre de difficultés que le poète doit affronter, en cours d’écriture, afin de contourner les écueils — analogues à ceux de sa longue quête — que la structure lui impose, tant sur le plan métrique et prosodique que linguistique ; et l’on découvre alors que les contraintes qu’il s’est imposées deviennent pour lui une source inépuisable de créativité : ainsi, il a recours, pour respecter le jeu des rimes, à de multiples inventions verbales, puisant dans le latin, la langue d’oc et les divers dialectes des régions où il a séjourné la matrice des mots dont il a besoin et n’hésitant pas à les charger de sens inusités selon des déplacements sémantiques qui enrichissent le lexique et créent la langue italienne que nous connaissons. On en trouve tout au long du texte de nombreux exemples, comme le résume avec acuité Bruno Pinchard : "La rime n’est rien d’autre que l’épiphanie de l’ordre dans le hasard de la trouvaille verbale. C’est pourquoi elle plie à sa mesure tous les usages de la langue, même l’usage prosaïque, et le savoir lui-même lui est secrètement soumis [11]."
Il va sans dire que l’extraordinaire invention verbale dont Dante est l’artisan ne se limite pas aux seules rimes ; c’est toutefois là que sa place est la plus marquée.

Quant à la métrique et à la prosodie, Dante les traite également avec toutes les licences en usage chez les poètes du stilnovisme, celles-ci permettant de faire toujours entendre un endecasillabo sans heurter l’oreille du lecteur-auditeur ; dans ce vers, en effet, l’accent tonique tombe sur la dixième syllabe, soit sur la pénultième dans l’immense majorité des cas et sur la finale lorsque le vers se termine par une parola tronca : fè, levo, cosi, qui, più, fu ;il y en a moins d’une vingtaine dans l’Enfer  ; tout l’art consiste à agencer l’ensemble des sons, le poème étant une "fiction produite selon les règles de la rhétorique et de la musique [12]".
La poésie est en soi un chant ; à ce titre, toutes les règles érigées "mathématiquement" en système doivent se plier à une règle supérieure, celle de l’harmonie — science des rapports entre les nombres —, et à la dimension éminemment orale du poème. Pour ce qui concerne le vers d’une extrême souplesse qu’est l’endecasillabo, l’orthographe fluctuante de l’italien médiéval permet d’innombrables variantes : "homme" peut tour à tour s’écrire : omo, uomo ou ’om ; "chemin" : cammino ou cammin ; l’élision offre de multiples moyens pour réduire le mètre au nombre de sons voulus alors que de très nombreux vers, sans ce recours, auraient douze, treize voire quinze syllabes, témoin le vers 9 du chant I : diro de l’altre cose ch’i’v’ho scorte, qui donnerait, sans les élisions : diro delle altre cose che io vi ho scorte (soit : "je parlerai des choses que j’ai vues"). Pour allonger le vers, en revanche, on peut pratiquer la diérèse (par exemple dans scienzïa, grazïa, Marzïa).
Dans le même esprit, Dante emploie parfois la simple assonance, ou la rime "sicilienne [13]" — que l’on rencontre dès le chant I : mi desse / venisse / tremesse — et il note, dans le De vulgari eloquentia, la grande variété d’agencement des rimes que l’on trouve chez les poètes, même les choix les plus extrêmes qui vont des stances construites sur une seule rime jusqu’à celles qui en sont totalement exemptes, ce qui lui permet d’affirmer : "Il faut d’abord savoir que presque tous s’octroient dans ce domaine la plus grande licence et que c’est par là que l’on tend le mieux vers la douceur d’une totale harmonie [14]." Il accepte également le vers orphelin (sans l’utiliser cependant dans la Commedia), qu’il appelle clavis ("clé", en latin) ; un vers qui, en effet, "ouvre une porte, attire l’attention sur un mot essentiel, introduit un son autre, trompe le confort, déçoit l’attente [15]".
L’ordre est donc fait pour être dérangé, la règle pour être contournée au nom d’une valeur plus haute qui est la liberté créatrice par laquelle le poète retrouve l’âme de toute parole, la langue originelle. Et cette langue-mère ne se redécouvre que dans l’oralité du vers, dans la pulsation qui est la manière unique dont ce musicien du langage qu’est le poète compose une oeuvre, c’est-à-dire "lie" les mots de sa langue par ce qu’il appelle "l’arte musaica" — à la fois musa et musica, poésie et musique — et recrée ainsi le monde : "Par le vers rimé, un monde se déploie, qui n’est plus contingence, mais rosace des pouvoirs de l’esprit et possibilité universelle des conjonctions cosmiques et affectives [16]."
Par cette prise de position, et par ce que Gianfranco Concini considère comme la connotation essentielle de l’engagement dantesque, à savoir sa "concomitance avec le caractère absolu des valeurs formelles [17] ", le poète signe son indéniable modernité. Contini conclut : "Et si l’oeuvre de Dante est si foisonnante en virtualités vitales et contradictoires qui se ramifient dans toutes les directions, l’exemple le plus vif que l’on puisse en retirer est en fait celui d’un goût irrépressible pour l’expérimentation, d’une totale absence de préjugés à l’égard du réel [18]." Et l’on sait combien sont nombreux les poètes italiens qui, au cours des siècles, en ont développé les harmoniques dans leurs propres œuvres en adoptant, en signe d’hommage, le principe de la tierce rime : entre autres Pétrarque, Boccace, Leopardi, Pascoli, Pasolini enfin, notamment dans Les Cendres de Gramsci [19]

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Comment aborder, dans ces conditions, une nouvelle traduction du poème dantesque, comment en donner une lecture "moderne" sinon en prenant en compte la structure voulue par le poète, c’est-à-dire toutes les composantes de l’œuvre et, au premier chef, la tierce rime qui est le germe à partir duquel elle s’épanouit en une arborescence vertigineuse ?
C’est dans cet esprit et à la suite de la traduction et de l’édition critique que j’ai données des Rime de Guido Cavalcanti que j’ai entrepris une traduction de la Commedia, nouvelle dans sa forme donc dans son sens, comme j’ai pu le faire pour l’œuvre du "premier ami" de Dante : il m’est apparu essentiel de montrer que non seulement l’entreprise, si elle est difficile, n’est pas impossible, mais qu’elle permet au contraire d’aller plus avant dans la redécouverte de ce chef-d’œuvre universel, qu’elle offre au traducteur un champ immense d’exploration de sa propre langue sans que cela se fasse au détriment du texte original, puisqu’elle puise au cœur même de la création dantesque les éléments caractéristiques de son écriture afin de les transposer en français tout en respectant les spécificités des deux langues. J’ai voulu par là donner à entendre quelque chose de l’autre langue à l’ombre de laquelle se situe tout traducteur qui, "pour pouvoir reconstruire, dans sa propre langue, les sens et les sons, formes et rythmes qui étaient propres à l’autre langue, cherche des équivalences et des correspondances qui soient en mesure de remplacer dignement ce qui a été perdu [20]". Car on ne peut nier que l’acte de traduire soit un art de la perte et induise une prise de risque que tout traducteur affronte avec inquiétude, conscient qu’il est du fait que la musique de chaque langue est unique et intransmissible selon ses propres canons. Dante lui-même y insiste : "Et par conséquent que chacun sache qu’aucun objet dont l’harmonie repose sur l’entrelacs musaïque ne se peut transmuer de sa langue en une autre sans rompre toute sa douceur et son harmonie [21]."
Mais penser qu’il condamne, par ces lignes, toute entreprise de traduction serait erronée, si affûtée est sa réflexion sur les langues, si vive et profonde la connaissance qu’il en a. En réalité, il ne s’agit nullement, pour le traducteur d’un texte poétique, de produire un décalque du poème original qui rendrait celui-ci exsangue mais de saisir à la fois dans la texture dont il est fait et dans sa langue propre la matière d’un entrelacs [22] créateur d’une nouvelle harmonie qui ne sera ni tout à fait la même, ni tout à fait une autre ; une perte, oui, mais avec une compensation et c’est à ce prix que l’œuvre originale peut vivre à travers d’autres langues et défier le temps.

Compte tenu de la grande variété rythmique de l’endecasillabo, qui n’a pas son équivalent en français, et du caractère vif, concis du vers dantesque, j’ai choisi une alternance souple de décasyllabes et d’hendécasyllabes en jouant sur l’entrelacs du pair et de l’impair et surtout sur l’utilisation du e qui peut être muet ou sonore à l’intérieur du vers, en fonction de sa liaison avec le mot qui suit. Ce dispositif se substitue à l’élision ou à la diérèse largement utilisées par Dante, mais sans en employer la graphie, ce qui, en français contemporain, constituerait un artifice absurde et anachronique du type : "Géantes ail’, cou et visage humain", ou "ils sont avar’, envïeux et superbes".
Quant au système rimique, il est construit avec la rigueur et les libertés telles que préconisées par Dante et les stilnovistes, comme on l’a vu, ces dernières étant guidées par le discernement (discretio), que Dante considère comme l’activité la plus noble de la raison : "De la part du poète, la discretio présuppose une sorte d’ouïe spirituelle attentive à ce qui vient du logos lui-même. Il ne s’agit donc pas d’analyser rationnellement les éléments poétiques d’une matière linguistique, ou pas seulement, mais de les sentir [23]." J’ai donc de temps en temps employé une rime unique sur deux ou trois terzine, comme l’a fait Dante lui-même à plusieurs reprises, afin de produire un effet d’insistance en accord avec le climat du passage ; j’ai, par ailleurs, toujours privilégié l’oralité, comme par exemple dans le chant VI où l’on trouve ces trois assonances sur la syllabe accentuée "ac" que Malherbe, à l’époque classique, n’aurait certes pas acceptées en tant que rimes : "sac", "Ciacco", "cloaque" (v. 50-54). Notons toutefois qu’à la même époque Racine fait rimer, à l’acte II de Phèdre, "flots" avec "Minos’’, et que dans Les Animaux malades de la peste, La Fontaine fait rimer, quant à lui, "parler net" avec "baudet" — alors qu’aucun comédien ne prononce "Mino" ou "baudett" -, de quoi faire vaciller la rigueur malherbienne (rigueur que le Moyen Âge ignorait totalement). Et l’on sait que le vers français a connu un grand nombre de bouleversements depuis le XVIIe siècle, en particulier grâce à Hugo, Baudelaire, Rimbaud, Mallarmé.

La dernière question est celle des choix lexicaux et syntaxiques, dans la proximité des rimes — qui, comme on l’a dit, en sont souvent les guides déterminants — ainsi que des divers registres et niveaux de langue en usage dans le poème : la gravité, la noblesse de ton, le lyrisme des évocations, la splendeur des images voisinent chez Dante avec les familiarités, les effets comiques, le grotesque et la truculence, la méticuleuse précision des descriptions ou la vivacité des dialogues. Je me suis efforcée de faire entendre toutes ces voix en évitant les archaïsmes et en conservant seulement certains termes, facilement compréhensibles et rappelant discrètement l’époque à laquelle appartient le poème, tel le terme "pégot" pour la poix (c f.XVIII, n. 13). Quant aux tournures qui scandent le texte comme un leitmotiv, du type :"Et lui à moi", "et moi à lui", je les ai respectées du mieux possible car elles s’inscrivent dans l’écriture dantesque ; cependant elles font office, aussi, par moments, de "chevilles" auxquelles Dante a recours sur le plan métrique ; et lorsqu’elles devenaient pour ma propre métrique une gêne, je les ai raccourcies en : "et moi", "alors lui", ou modifiées de la même façon qu’il le fait selon les cas. En ce qui concerne l’inversion du sujet, extrêmement fréquente en italien, je l’ai respectée le plus souvent possible comme étant précisément l’une des caractéristiques de la langue. Enfin, j’ai conservé absolument les changements de temps impromptus qui marquent chez Dante la concomitance entre le passé relaté et le présent de narration, ou un présent intemporel qu’il utilise alternativement en tant qu’auteur du poème ou acteur des événements. Pour ce qui concerne les noms propres, je les ai traduits dans la grande majorité des cas ; comme, notamment, dans le passage du plus haut comique qui, au chant XXI, met en scène le peuple des démons, et partout où le jeu des rimes le rendait nécessaire. Dans d’autres cas, minoritaires, j’ai conservé le nom italien des personnages.

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Enfin, penser que la Divine Comédie est une œuvre dont on peut jouir à la simple lecture est un leurre. Du reste, Dante et ses amis stilnovistes — à l’instar des troubadours adeptes du trobar clus — voulaient que le sens de leurs œuvres ne soit pas immédiatement dévoilé mais nécessite au contraire une attention soutenue et un effort de réflexion permettant d’y accéder ; tel est le sens du verbe entrebescar qui y est lié : emmêler, embrouiller, entremêler. La difficulté est encore plus grande pour les lecteurs d’aujourd’hui, même italiens, et c’est la raison pour laquelle j’ai ajouté — en fin de volume, afin de ne pas gêner une lecture cursive — un appareil critique consultable selon les nécessités ou désirs de chacun.
Il ne faudrait pas croire pour autant que la Commedia ne s’adressait qu’à une élite de gens cultivés ; en effet, très vite le poème s’est transmis de bouche à oreille, par fragments, à toutes les couches sociales, tous les milieux, les uns retenant ce qui avait trait à la navigation, les autres à l’agriculture, d’autres encore à l’observation du ciel, au vol des oiseaux, etc. Et une anecdote a circulé, racontant que Dante, marchant un jour sur un chemin, entendit un ânier réciter, presque psalmodier, des passages de son poème au rythme de sa déambulation ; lorsque son âne s’écartait du chemin, l’ânier criait : "Arri ! Arri !" puis reprenait son chant. Dante, alors, lui aurait lancé malicieusement en passant : "Ça, ce n’est pas moi qui l’ai écrit [24]."
Que l’histoire soit vraie ou fausse, elle traduit de toute façon l’immense popularité de l’œuvre, et l’on comprend pourquoi celle-ci imprègne depuis lors, avec autant de force, non seulement la langue mais toute la culture italienne. Ainsi que le note très justement Paul Renucci : "La Comédie est à la fois le plus ouvert et le plus secret des livres. Rien de plus clair que sa narration, rien de plus instantané que son premier effet poétique. Ce n’est pas sans raison qu’elle fut si populaire, au sens propre du mot, en Toscane sinon ailleurs. Mais il faut accepter l’idée que, sujette au régime de la pluralité des sens, ce qu’elle recèle sous sa prodigieuse façade n’a pas moins de valeur que ce qui éclate aux yeux. De cette idée ne dépend pas seulement l’harmonieuse complexité de son ordre, mais la profondeur de sa poésie [25]."
La traduction, comme l’écriture, est une alchimie dont Antonio Prete, poète et auteur d’une impressionnante traduction des Fleurs du mal en vers rimés [26], écrit : "Il y a, dans cette alchimie, quelque chose qui s’apparente à l’expérience amoureuse, ou du moins à sa tension : comment pouvoir dire l’autre de façon que mon accent ne le déforme pas, ne le masque ni ne le censure et, d’autre part, comment me laisser dire par l’autre de façon que sa voix n’évacue pas la mienne, que son timbre n’altère pas le mien, que sa singularité ne rende pas opaque ma singularité [27]." De même que l’expérience à laquelle nous convie Dante a pour but "l’Amour qui meut le Soleil et les étoiles" — Béatrice étant, entre autres, la métaphore de la parole poétique —, celle qui consiste à traduire son œuvre ne peut être à son tour que joy d’amor.

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Après Le rire embrasé de l’étoile, la critique de Yannick Haenel sur le Paradis qu’il faut impérativement relire, voici la critique de l’édition complète par le poète Claude Minière.

LA FORME D’UN ESPRIT

Est-ce que leurs formes matérielles influent sur le contenu des livres ? Évidemment. Évidemment dirons-nous, ou bien… silencieusement, insinueusement. Voici posé sur mon bureau le volume “Babel” de La Divine Comédie de Danièle Robert (on peut le dire ainsi, n’est-ce pas ?). C’est un lingot d’or aux reflets moirés dans la lumière oblique d’hiver, cinq heures de l’après-midi. Un “dépôt de savoir et de technique” (Denis Roche), et d’enchantements. De rêve. Il est arrivé là, il y restera. Tous les critiques se sont accordé à dire que Danièle Robert avait rendu la structure d’ensemble de l’œuvre du Florentin. Et c’est un “miracle” : de la plus petite cellule textuelle jusqu’à l’ensemble de l’organisme : la structure.
Les différentes “parties” de l’œuvre ont été publiées à des dates différentes au cours de l’avancée dramatique de son écriture par Dante, la traduction de Danièle Robert a été éditée selon trois livraisons successives par Actes Sud, mais aujourd’hui les voici rassemblées, unies, tenues, inséparables, concentrées, rayonnantes, en un “coffret” vibrant sur la table où la main ira le prendre, l’ouvrir, le poser, le reprendre ; ou l’œil, de côté, s’assure qu’il est toujours là.
Le texte, l’idée que l’on se fait du texte, le sentiment que l’on entretient de lui en sont colorés, pondérés. C’est une forme, non un objet. C’est une clef, une petite clef pour tout l’univers, un pain de chaque jour. C’est de la physique.

Claude Minière, poezibao, 8 mars 2021.

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Entretien avec Danièle Robert

Danièle Robert était ce vendredi 12 mars à 22h15 à l’émission « Par les temps qui courent » sur France Culture (série : « Traduire : qui, quoi, comment, pourquoi ? ») pour la parution de La divine comédie de Dante aux éditions Actes Sud/ Collection : Babel. L’occasion d’évoquer cette grande aventure de traduction, sa relation à la langue italienne et au rythme si particulier de Dante, mort il y a 700 ans.

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Danièle Robert. Photo : Christian Tarting

« Par les temps qui courent », Romain de Becdelievre [28].

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Avec, en fin d’émission, la voix de Philippe Sollers (à propos des quatre sens de l’écriture tels que Dante les définit dans Le Banquet (Il Convivio) : le sens littéral, allégorique, moral et anagogique.

De la descente dans les profondeurs de la terre — au milieu des cris et des corps soumis aux pires tortures — jusqu’à la contemplation de « l’Amour qui meut le Soleil et les étoiles » en passant par l’expérience de la métamorphose à laquelle le poète nous convie, La Divine Comédie de Dante sonde l’âme humaine dans les aspects les plus divers de ses questionnements. Et par la puissance du langage, par la magie des images tantôt terribles tantôt lumineuses qui scandent le récit, elle nous rappelle à quel point l’art est au centre de toute vie.

La traduction neuve de Danièle Robert — à qui l’on doit également des versions de référence des grands textes d’Ovide, de Catulle, et de la poésie de Paul Auster — s’attache à respecter dans notre langue l’intégralité de la structure élaborée par Dante.

Sur les problèmes posés par la traduction de La Divine Comédie, lire aussi :
Jacqueline Risset
Marcelin Pleynet


Florence. La statue de Dante devant Santa Croce.
Photo A. G., 7 mai 2010. Zoom : cliquez sur l’image.
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ZOOM : cliquer sur l’image.
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[1Réédité en 2002 aux Éditions Triptyque.

[2C’aisi vaucentrebescant / Los motz e’lsoafinant :/ Lengu’entrebescadd / Es en la baizada. Sauf indication contraire et hormis pour les textes issus des Écritures, je suis l’auteur de toutes les traductions données dans cette préface ainsi que dans les notes venant en fin de volume.

[3Bruno Pinchard, Le Bûcher de Béatrice. Essai sur Dante, Paris, Aubier, coll. "Philosophie", 1996, p. 211. (À l’appui de cette assertion, on se référera à la somptueuse réécriture de l’œuvre dantesque par Giorgio Pressburger : Dans l’obscur royaume [Nef regno oscuro, 2008] et Histoire humaine et inhumaine [Storia umana e inumana, 2013), romans traduits de l’italien par Marguerite Pozzoli, Arles, Actes Sud, coll. "Lettres italiennes", 2011 et 2015.)

[4Bruno Pinchard, op. cit., p. 212.

[5Roger Dragonetti, Dante. La Langue et le Poème, études réunies et présentées par Christopher Lucken, Paris, Librairie classique Eugène Belin, coll. "Littérature et politique", 2006, p. 87.

[6Il est à noter que le mot féminin cantica ne signifie pas "cantique" mais désigne une composition poétique qui se développe sur un ou plusieurs chants ; ainsi des trois parties de la Commedia. Le mot masculin "cantique’’, à stricte connotation religieuse, se dit en italien cantico.

[7Charles S. Singleron, "The Poet’s Number at the Center" [1965], in La poesia della Divina Commedia, traduit de l’anglais (États-Unis) par Gaetano Prampolini, Balogna, il Mulino, 1978, p. 452-462.

[8Ossip Mandelstam, "Entretien sur Dante" [1930-1933], traduit du russe par Jean-Claude Schneider avec la collaboration de Vèra Linhartovâ, Argile (Paris), n° XII, hiver 1976-1977, p. 24.

[9Vittorio Gassman, in livret d’accompagnement du coffret (quatre DVD) Gassman legge Dante. Sceneggiatura per il racconto di un viaggio ... regia di Rubino Rubini [1996], Roma/Bologna, Garad/ EDB, 2004, p. 18.

[10Ainsi qu’il le rapporte dans La Fanfare de Bangui. Itinéraire enchanté d’un ethnomusicologue, Paris, Les Empêcheurs de penser en rond/La Découverte, 2009, p. 121 sq. (Cf également le texte de présentation de Centrafrique. Anthologie de la musique des Pygmées Aka, enregistrements réalisés par SimhaArom, Paris, Ocora/Radio France, 1978, p. 4.) 4. Ibid, p. 109.

[11Bruno Pinchard (dir., avec la collaboration de Christian Trottmann), "Pour Dante", in Pour Dante. Dante et l’Apocalypse. Lectures humanistes de Dante, Paris, Honoré Champion Éditeur, coll. "Le savoir de Mantice/Travaux du Centre d’études supérieures de la Renaissance de Tours", n° 7, 2001, p. 12.

[12Dante Alighieri, De vulgari eloquentia, Il, IV, 2.

[13Dans la rime dite "sicilienne", seule la syllabe finale — la plupart du temps non accentuée — rime avec la suivante (en l’occurrence le e muet).

[14Dante, De vulgari eloquentia, Il, XIII, 3.

[15Voir à ce sujet "Guido me prega ...", la préface que j’ai donnée à ma traduction des Rime de Guido Cavalcanti, Senouillac, vagabonde, 2012, p. 32 sq.

[16Bruno Pinchard, "Pour Dante", art. cité, p. 14.

[17Gianfranco Contini, Un’idea di Dante. Saggi danteschi [1970], Torino, Giulio Einaudi editore, coll. "Piccola biblioteca Einaudi", n° 275, 1976, p. 66.

[18 Ibid , p. 68.

[19Pier Paolo Pasolini, Le ceneri di Gramsci, Milano, Garzanti, 1957.

[20Antonio Prete, À l’ombre de l’autre langue. Pour un art de la traduction, traduit de l’italien par Danièle Robert, Cadenet, les éditions chemin de ronde, coll. "Stilnovo", 2013, p. 9.

[21Dante Alighieri, Convivio, I, VII.

[22Mot que, dans ce contexte, je préfère à "lien" pour rendre legame.

[23Roger Dragonetti, op. cit., p. 95.

[24Vittorio Gassman, op. cit., p. 25.

[25Paul Renucci, Dante, Paris, Hatier, coll. "Connaissance des lettres", n° 51, 1958, p. 136.

[26Charles Baudelaire, I fiori del male [Les Fleurs du mal, 1861], traduzione dal francese e cura di Antonio Prete, Milano, Feltrinelli, 2003.

[27Antonio Prete, À l’ombre de l’autre langue, op. cit., p. 9.

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8 Messages

  • Albert Gauvin | 5 janvier 2022 - 17:27 1

    A l’occasion des 700 ans de la disparition de l’auteur de la « Divine Comédie », une réflexion sur Dante au coeur d’un cercle de naissance et de renaissance.
    Voici donc le propos tenu en Sorbonne par Bruno Pinchard lors de l’hommage à Dante, le 10 décembre 2021, aux côtés de Manuele Gragnolati et de Jean-Luc Marion. La soirée s’est achevée par un concert de Michaël Levinas. LIRE ICI.


  • Albert Gauvin | 23 août 2021 - 15:38 2

    Lecture musicale de la Divine Comédie par sa traductrice Danièle Robert…avec Jaap Mulder and sons au son.

    Voici quelques photos. Pour le son, il faudra attendre encore un peu.


    Danièle Robert.
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    Danièle Robert.
    ZOOM : cliquer sur l’image.
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    …avec Jaap Mulder and sons au son..
    ZOOM : cliquer sur l’image.
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    Crédits : lundimatin


  • Albert Gauvin | 5 août 2021 - 22:09 3

    Danièle Robert sera présente à Eymoutiers, pour le festival "Les Écrits d’août" organisé par Serge Quadruppani : la journée du 14 prochain sera consacrée à l’Italie et tout particulièrement à Dante : elle présentera la Commedia et, le soir, elle en lira des extraits avec trois musiciens qui ont composé spécialement pour l’occasion.


    La journée du 14 août.
    ZOOM : cliquer sur l’image.
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    LE PROGRAMME COMPLET pdf


  • Albert Gauvin | 7 avril 2021 - 01:07 4

    Dantedì

    Yannick Haenel

    On censure Dante  ? Alors, lisons-le.

    « Dantedì » est un mot italien qui signifie « le jour de Dante ». Figurez-vous que l’année 2021 marque le 700e anniversaire de la mort du plus grand poète de l’Italie (à mon avis, le plus grand au monde). Et comme le 25 mars, jour de l’Annonciation – et premier jour de l’année dans l’ancien calendrier toscan –, marque, selon les spécialistes, le début de La Divine Comédie, c’est le jour qu’on a choisi pour le Dantedì.

    Il y a eu ce jour-là et il y aura toute cette année de ­nombreuses festivités en l’honneur du poète de l’Enfer, du Purgatoire et du Para­dis, mais la meilleure façon de le fêter serait de le lire. Ça tombe bien, les éditions Actes Sud rééditent dans leur collection de poche « Babel » la merveilleuse traduction de Danièle Robert.

    Pour 13,50 euros, c’est-à-dire le prix de quelques bières ou de deux kebabs, vous pouvez vous procurer cet épais petit volume de 900 pages sur papier bible.

    Ouvrez, c’est l’extase : il n’est question que du « haut désir qui t’enflamme et te presse de comprendre » (car le désir et l’intellect sont une même chose), du feu qui nous anime et du « torrent d’étincelles vives » qui ­allume l’existence. Tout y est physique : le corps des damnés aussi bien que les cercles du paradis qui giclent de sensualité.

    Écrit au XIVe siècle, cet immense poème théologico-existentiel vous donne la sensation qu’il s’adresse à vous, ici, tout de suite. Un type se perd dans une forêt, c’est-à-dire dans sa vie (dépression, souillure). Le voici qui rencontre son idole Virgile, lequel l’accompagne au gré d’un voyage initiatique qui le remet en vie. Autrement dit, il l’emmène faire une cure de poésie. Et nous autres qui avons perdu la source, nous en aurions bien besoin : « Ici, on vit et on jouit du trésor. »

    La littérature est à la poursuite du point le plus vivant. Vous sentez-vous privé d’esprit, de cœur, de désir  ? Dante raconte musicalement ce retour du vif en vous, jusqu’au dernier vers, qui chante la plus grande aventure des sens et de l’esprit : «  L’Amour, qui meut le Soleil et les étoiles. »

    Où en êtes-vous avec l’absolu  ? C’est la seule question. Vous cherchez désespérément la vérité alors qu’elle a sa demeure en vous. La poésie ne sauvera plus le monde, hélas (il est allé trop loin dans l’autodestruction), mais elle vous sauvera, vous.

    Infusez-vous ces vers, même en français ils agissent comme des comprimés de vie.

    Charlie Hebdo 1498, 7 avril 2021


  • Albert Gauvin | 31 mars 2021 - 01:54 5

    NOUVEAU : DEUX ENTRETIENS AVEC DANIELE ROBERT :
    Le jour où « j’ai traduit La Divine Comédie de Dante » pdf (La Croix)
    Sur les pas de Dante Alighieri pdf (Le Temps)

    ET A PROPOS DE LA NOUVELLE TRADUCTION NEERLNADAISE DE DANTE :
    Yannick Haenel, Dante censuré pdf (Charlie Hebdo)
    VOIR Le Chant XXVIII de L’Enfer de Dante


  • Insterburg | 25 mars 2021 - 18:04 6

    ...et la traduction de William Cliff, pas mal non plus !


  • Albert Gauvin | 23 mars 2021 - 14:50 7

    Deux rendez-vous à retenir (informations de Danièle Robert) :
    dans le cadre du Dantedì qui aura lieu ce jeudi 25 mars, Alex Dutilh consacre sa rubrique « Jazz Culture » dans l’Open Jazz sur France Musique à la parution de la Divine Comédie en « Babel ». C’est déjà une surprise, mais une autre surprise est attendue.
    « Par ailleurs, l’institut culturel italien de Paris a produit une video — diffusée dans 12 autres instituts dans le monde — comportant la lecture d’un chant de la Commedia dans toutes les langues. Pour la version française, c’est le chant 1 du Paradis, dans ma traduction, qui a été enregistré par Nicolas Bouchaud. Je vous copie les informations que l’IIC m’a données :
    "La vidéo sera diffusée en direct jeudi prochain 25 mars à 12 heures sur le site Corriere TV et sur celui du Centro per il Libro e la Lettura, puis disponible sur les pages Facebook du journal Il Corriere della Sera, du Centro per il libro e la lettura et de notre institut. Il sera également disponible sur notre chaîne YouTube". »


  • Albert Gauvin | 22 mars 2021 - 22:43 8

    Pierre Parlant et Jean-Philippe Cazier ont suivi les parutions des trois volumes de La Divine Comédie de Dante traduits par Danièle Robert pour les éditions Actes Sud. Les voici réunis en un volume chez Babel.

    « Mandelstam considérait qu’il est « impensable de lire les « Chants de Dante » sans les attirer vers l’époque contemporaine. C’est dans cette intention qu’ils ont été écrits. Ils sont des appareils à capter l’avenir. Ils appellent un commentaire au futur » (Entretien sur Dante, V, in Œuvres en prose, Ed. La Dogana-Le Bruit du temps, 2018). En ce temps où l’idée même d’avenir est obscurcie pour toutes les raisons qu’on sait, où l’humanité est sommée, sous peine de s’anéantir, de se reconquérir en se dépassant elle-même — dans le premier chant du Paradis, Dante forgera un néologisme lumineux sous l’aspect du verbe Trasumanar pour évoquer l’hypothèse nécessaire d’un tel dépassement —, la lecture des « Chants de Dante » (…) si proches de ce que nous vivons, relève plus que jamais d’une urgence salutaire » (Pierre Parlant).

    • Enfer : « Traduire Dante » , entretien de Danièle Robert avec Jean-Philippe Cazier & article de Pierre Parlant, consacré à L’Enfer.
    • Purgatoire : Article de Pierre Parlant.
    • Paradis : « Le mouvement de traduire », entretien de Pierre Parlant avec Danièle Robert.