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Journal du mois de juin 2009

D 4 juillet 2009     A par Viktor Kirtov - C 1 messages Version imprimable de cet article Version imprimable    ................... PARTAGER . facebook



Casino royal
Pas de doute : nous vivons désormais dans un grand film accéléré où une image chasse l’autre. A peine ai-je eu le temps de voir Obama se recueillir à Buchenwald que le crash de l’avion Rio-Paris me précipite dans une macabre pêche aux cadavres dans l’océan. J’ai juste le temps de considérer les résultats des élections européennes et la réjouissante percée de Cohn-Bendit que j’ai droit à une avalanche de nymphettes dans la vie de Berlusconi. J’assiste à un grand dîner à la Bibliothèque nationale de France en l’honneur de Guy Debord promu « trésor national », mais me voici aussitôt projeté en Iran sous des matraquages.

Enfin j’arrive à Versailles dans une longue séquence de Casino royal. Ici, le triomphe de Sarkozy est total, et nous sommes déjà en 2017.

L’opposition ? Quelle opposition ? Les socialistes ? Quels socialistes ? Ah, si François Bayrou, au lieu de la laisser piétiner sur le trottoir, avait fait monter chez lui Ségolène Royal ! Elle serait aujourd’hui présidente, et lui Premier ministre. Un tout autre film, sans doute plus comique mais moins énergique. Avec Sarkozy en vibrionnant 007, au moins, on ne s’ennuie pas, et Carla Bruni, dans le casting, monte indubitablement en puissance. Elle cultive son chouchou, sa dimension culturelle augmente, il lit maintenant Houellebecq, c’est tout dire. Enfin, un morceau de roi : la nomination du charmant Frédéric Mitterrand au ministère de la Culture. Il était à la villa Médicis, à Rome, il se retrouve à Versailles, ou plutôt (mais c’est pareil) rue de Valois. Tout le monde en reste baba. Ça, enfin, c’est une superproduction française !

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Cliquer pour découvrir l’album de la Villa Medicis connue et inconnue

Partout ailleurs le cinéma languit, Obama s’appellera bientôt « Obamarre », et nous pouvons, nous Français, malgré la crise, être légitimement fiers de nos studios rénovés, de nos acteurs et de nos actrices, de notre film ininterrompu, miracle de renaissance. J’attends avec impatience le prochain rebondissement, d’autres divines surprises. Pourquoi pas, demain, Cohn-Bendit au gouvernement ? Il tutoie le président, il est incontournable, et qui dira que Mai 1968 n’a pas réussi ? Allons, encore un effort vers cette révolution souterraine.

Stern
Dans les périodes de vide politique, il est bon d’en revenir aux faits divers, c’est-à- dire aux vraies passions criminelles. Prenez l’affaire Stern, par exemple, avec sa mise en scène particulièrement réussie. Un banquier plus qu’aventureux, une pauvre fille attendant le mariage ou, à défaut, un million de dollars, des séances sadomasochistes, le type attaché et enfermé dans une combinaison de latex, l’explosion de haine noire de la pauvre fille et quatre balles à bout portant sur la banque elle-même. Au passage, je remarque que personne n’a mis en doute la phrase qu’aurait prononcée le banquier : « Un million de dollars, c’est cher payé pour une pute. » Mais j’ai bien aimé la déclaration de l’avocat de la famille Stern : « Si chaque fois qu’un homme, au lieu de lui réciter un poème, traite une femme de pute et prend quatre balles, Genève serait jonchée de cadavres. »

A vrai dire, je n’imaginais pas que les moeurs, à Genève, en étaient arrivées à une telle décomposition morale, de quoi faire se retourner Calvin dans sa tombe. Comme quoi, le temps nous apprend toujours quelque chose de nouveau. Cet avocat récite-t-il des poèmes lorsqu’il se trouve dans une situation érotique ? On voudrait savoir lesquels. Quant à la pauvre Cécile Brossard, on ne doit pas oublier qu’elle était elle-même artiste, comme le prouve une hideuse sculpture réalisée par ses soins. Là, c’est Stendhal qui a définitivement raison : « Le mauvais goût conduit au crime. » Mauvais goût exorbitant du banquier, mauvais goût sinistre de la pute, mauvais goût généralisé un peu partout, y compris dans l’installation Pinault à Venise, à la pointe de la Dogana.

En contrepoint, on a de la sympathie pour le voleur, au musée Picasso, d’un carnet de dessins du grand Minotaure estimé entre 7 et 8 millions d’euros. Autre preuve de mauvais goût ahurissant ? Le sondage qui révèle que 73 % des catholiques pratiquants sont pour le mariage des prêtres. La belle affaire ! Mais que deviendra un prêtre ayant divorcé lorsqu’il voudra se remarier ? Ce genre de question me tourmente.

Courjault
Avouez que l’histoire des bébés tués par Véronique Courjault et placés dans un congélateur n’est pas mal non plus comme symptôme d’époque. Sa femme était enceinte, le mari n’a rien vu, elle accouchait en douce, étouffait sa progéniture et la mettait au frigo fort. Cet étrange mari, d’ailleurs, aime toujours sa femme et témoigne en sa faveur. Il n’a jamais dû se rendre compte, au fil des ans, qu’il lançait sa semence dans un con gelé. Beaucoup d’hommes sont dans ce cas, et ce n’est pas la burqa qui pourra arranger les choses. Par la même occasion, le débat s’est immédiatement porté sur le déni de grossesse, beaucoup plus répandu que prévu. Cette région étrange et peu raisonnable a été elle-même éclipsée par l’actualité brûlante des mères porteuses. Je l’avoue : tous ces sujets de société ont tendance à augmenter ma migraine.

Liberté
Excellente idée de l’éditeur Jean-Paul Rocher d’avoir réédité les textes d’Armand Robin, intraitable réfractaire, sous le titre Le Combat libertaire. Robin, qui parlait plusieurs langues, a beaucoup écouté les radios du monde entier, et s’est montré d’un antitotalitarisme absolu (il faut voir le mépris avec lequel il traite les épurateurs communistes de l’après guerre). Ainsi, dans Le Libertaire, le 19 avril 1946 : « L’homme est tenté de céder devant une poignée de politiciens qui parlent à toute heure pour rien, d’écouter avec respect comme un évangile une radio qui soit, comme tout le reste dans cette chute d’une civilisation, un décor créé artificiellement pour lui cacher sa condition désespérée et son paysage de perdition. »
C’était avant la télévision et le reste, avant, donc, la généralisation du décor.

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1 Messages

  • Bibbo | 7 juillet 2009 - 17:47 1

    Courjault. Avouez que l’histoire des bébés tués par Véronique Courjault et placés dans un congélateur n’est pas mal non plus comme symptôme d’époque. Sa femme était enceinte, le mari n’a rien vu, elle accouchait en douce, étouffait sa progéniture et la mettait au frigo fort. Cet étrange mari, d’ailleurs, aime toujours sa femme et témoigne en sa faveur. Il n’a jamais dû se rendre compte, au fil des ans, qu’il lançait sa semence dans un con gelé. Beaucoup d’hommes sont dans ce cas, et ce n’est pas la burqa qui pourra arranger les choses. Par la même occasion, le débat s’est immédiatement porté sur le déni de grossesse, beaucoup plus répandu que prévu. Cette région étrange et peu raisonnable a été elle-même éclipsée par l’actualité brûlante des mères porteuses. Je l’avoue : tous ces sujets de société ont tendance à augmenter ma migraine.

    CHER MR SOLLERS,

    Quand on écrit cela , on doit se doit de se poser la question : qui vous vous a appris à lire et a écrire ? vous êtes injurieux, afin de faire rire, sur ce qui est une GRANDE MISERE HUMAINE ; Vous êtes un provocateur, ( il n’y a plus que cela ,de nos jours ,ou presque) Je vous pose la question suivante, combien avez gagné pour ce misérable article , c’est une vraie question qui ne supporte aucune métaphysique, aucune fuite de votre part, surtout qu’actuellement des milions de personnes se trouvent dans de graves difficultés économiques. Puisque vous citez André Breton, vous devriez savoir ce qu’il signifiait quand il parlait de "" l’Ecurie Littéraire " et bien pour tout vous dire , vous en êtes le Valet, comme tous ce soi - disants " subversifs" qui mangent au système. Je salue Régis Debray pour son article en 1999 sur MARIANNE ;

    Que pense votre conjointe Mme Kristeva, de votre sens Culturel ?

    NOM DU SITE : Sollers en Celine